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Liban - PSP

Walid Joumblatt à Teymour : « Tu es le gardien de l’héritage de ton grand-père »

Devant la grande foule rassemblée pour le quarantième anniversaire de l'assassinat de son père, le leader druze a fait porter à son fils le keffieh, dans un geste symbolique.

Passation de flambeau, hier, entre Walid et Teymour Joumblatt, à Moukhtara, devant une centaine de milliers de partisans. Le keffieh symbolique, signe d’une cause, d’un combat et de la prise en charge, à l’occasion, de toute une communauté, a été déposé par le père sur les épaules du fils – d’un bey à l’autre. Photo D.R.

Dire que la cour du palais de Moukhtara était hier noire de monde serait un euphémisme : plusieurs dizaines de milliers de personnes avaient répondu à l'appel pour participer à la quarantième commémoration de l'assassinat du leader druze Kamal Joumblatt. La foule était si dense qu'il était pratiquement devenu impossible de s'y mouvoir, tant et si bien que les secouristes de la Croix-Rouge libanaise ont dû intervenir pour traiter plusieurs cas d'évanouissement. Toutes les routes menant au palais étaient bondées, ainsi que les toits des maisons alentour.

De tous les âges et de toutes les générations, la plupart n'étant probablement même pas nés au moment du drame, les participants à cette grande manifestation n'ont pas hésité à faire des kilomètres de marche depuis les arrêts de bus jusqu'à la place, pour être présents à cette occasion. Dans la bonne humeur, la plupart portaient des drapeaux du Parti socialiste progressiste (PSP), certains des drapeaux libanais, et l'indétrônable « keffieh » noir et blanc sur les épaules ou enroulé autour de la tête.

Sans surprise, cette foule était en totale osmose avec son leader Walid Joumblatt et sa famille. Du littoral jusqu'au village de Moukhtara, des banderoles du PSP portaient des slogans reproduisant des idées chères à Kamal Joumblatt, comme « Non au confessionnalisme politique » ou « Non à la grande prison » (en référence à la réponse qu'il avait donnée au président syrien Hafez el-Assad, qui tentait de le convaincre du bien-fondé de l'entrée des forces syriennes au Liban). Ou alors des références politiques plus récentes comme « L'accord de Taëf est une garantie ». Toutefois, quand on approche de Moukhtara, ce sont des photos de Walid Joumblatt, de son fils Teymour ou des photomontages avec le leader assassiné Kamal Joumblatt qui prédominent, accompagnées de slogans, tels que « Nous renouvelons notre confiance ».

« Je suis très heureuse que cette grande foule se soit déplacée pour l'occasion, mais je suis aussi surexcitée à l'idée de voir Walid et Teymour Joumblatt en personne pour la première fois ! » s'exclame Marwa, une jeune femme de Aïn Zhalta, dans le Chouf. Au final, elle ne le verra que de loin sur grand écran. Ce qui ne l'empêchera pas, à l'instar de la foule sur place, d'acclamer l'apparition du leader druze sur la place du palais de Moukhtara.

« Tu peux marcher la tête haute »

Flanqué du Premier ministre Saad Hariri d'un côté, et du député Ali Bazzi, représentant le président du Parlement Nabih Berry, de l'autre, mais aussi par une délégation du Hezbollah emmenée par Hussein Hajj Hassan, ainsi que par Jean Aziz, conseiller du président Michel Aoun, et entouré par la foule qui comptait aussi une grande délégation de députés chrétiens du Chouf présidée par Georges Adwan, le député Walid Joumblatt a prononcé une allocution très courte, qu'il a commencée par le moment où il a endossé la responsabilité politique suite à l'assassinat de son père. Il a ponctué son discours par une phrase qui était devenue la devise de cette époque noire : « Enterrez vos morts et relevez-vous. »

Le leader druze a parlé des difficultés et des défis qu'il a rencontrés, ainsi que des assassinats qui se sont succédé, insistant sur la fidélité de ce public qui ne s'est jamais démentie. Ses références à la lutte propalestinienne de Kamal Joumblatt et de ses compagnons ont été accueillies par les applaudissements, tout comme celle à la réconciliation de la Montagne avec le patriarche maronite Nasrallah Sfeir, en 2001. « Après quarante ans, je vous recommande de toujours privilégier la paix, le dialogue et la réconciliation, quels que soient les sacrifices, car tous les sacrifices sont faciles comparés à l'aventure de la violence, du sang et de la guerre », a-t-il affirmé, demandant une nouvelle fois pardon pour « le sang des innocents » chrétiens versé après l'assassinat de Kamal Joumblatt.

Mais le summum de son discours a été le moment où il s'est adressé à son fils Teymour, qui se trouvait près de lui. « Voilà pourquoi tu peux marcher la tête haute, Teymour, lui a-t-il dit. Sois le gardien de l'héritage de ton illustre grand-père Kamal Joumblatt, et arbore fièrement le keffieh de la Palestine arabe occupée, du Liban progressiste, des hommes libres et des révolutionnaires, des résistants contre Israël, le keffieh du palais de Moukhtara. Et, le moment venu, avec Aslan et Dalia (son frère et sa sœur), enterrez vos morts et relevez-vous. » Dans un geste symbolique de passage du flambeau politique, Walid Joumblatt a passé le keffieh autour du cou de son fils aîné.

« Si Kamal Joumblatt était encore là... »

Cette commémoration était de toute évidence vécue comme exceptionnelle par la foule présente. Mohammad, habitant Moukhtara, avait 18 ans lorsque Kamal Joumblatt a été assassiné. « Chaque année, la commémoration est un événement et les partisans fidèles sont là, assure-t-il. Mais cette année est plus spéciale, parce que les circonstances nécessitent un rassemblement de cette ampleur. La population veut une entente au sein de la classe politique, et quelle meilleure occasion que celle où l'on célèbre Kamal Joumblatt, qui était un grand rassembleur. »

Comme beaucoup d'autres manifestants, Mohammad est nostalgique de la philosophie du « moallem », « dont les idées auraient permis de construire un réel pays alors que nous ne faisons que rétrograder ». Hussein, un jeune venu de Barja avec sa famille, pense même que « si Kamal Joumblatt était encore là, le pays n'aurait pas connu les problèmes dans lesquels il se débat, et il n'y aurait plus eu de pauvres ».

Beaucoup n'ont même pas lu Kamal Joumblatt mais se disent « imprégnés par sa pensée, qui les accompagne depuis l'enfance ». Hier, cette grande foule paraissait forte dans sa certitude et sa fidélité, alors même qu'elle assistait à l'entrée en politique du petit-fils de l'homme dont elle est venue célébrer la mémoire.

 

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commentaires (5)

D,ARRIERE GRAND-PERE, A GRAND-PERE, A PERE, A FILS, A PETIT FILS, A GENDRES, A PARENTS, ETC... ET LES MOUTONS ET LEURS PROGENITURES SUIVENT... A QUAND LE GRAND REVEIL ?

LA LIBRE EXPRESSION

16 h 48, le 20 mars 2017

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Commentaires (5)

  • D,ARRIERE GRAND-PERE, A GRAND-PERE, A PERE, A FILS, A PETIT FILS, A GENDRES, A PARENTS, ETC... ET LES MOUTONS ET LEURS PROGENITURES SUIVENT... A QUAND LE GRAND REVEIL ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    16 h 48, le 20 mars 2017

  • il a été adoubé ?

    lila

    13 h 07, le 20 mars 2017

  • Quel contraste entre les scènes du centre de Beyrouth ou des milliers de citoyens ont exprimé leur refus de vivre dans une mascarade d'état, et les scènes de Moukhtara ou cette passation de pouvoir tribale a eu lieu.

    Mounir Doumani

    11 h 47, le 20 mars 2017

  • ET AU NORD, ON A L'AUTRE GARDIEN DE L'HÉRITAGE DE SON GRAND PÈRE SLEIMAN PREMIER. ET BIENTÔT ON VA VOIR LE GRAND TITRE SUR LA PREMIÈRE PAGE DE CE JOURNAL. "SLEIMAN FRANGIÉ CHEZ TAYMOUR POUR LE FÉLICITER" ....WOW...QUE LA FÊTE COMMENCE...VIVE LE LIBAN LIBRE.

    Gebran Eid

    11 h 23, le 20 mars 2017

  • Pauvre defunt Kamal Joumblat ! s'il voyait cette comedie ......

    aliosha

    11 h 07, le 20 mars 2017

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