Le sort de l'ambassade américaine en Israël n'a pas été au programme des discussions entre le président des États-Unis Donald Trump et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu dimanche soir, à l'occasion d'un entretien téléphonique. Le jour même, le porte-parole de la Maison-Blanche, Sean Spicer, a déclaré dans un communiqué : « Nous sommes aux prémices des discussions sur ce sujet. »
Le déplacement de l'ambassade des États-Unis en Israël à Jérusalem était une promesse de campagne de M. Trump. « Je n'ai pas oublié », a déclaré le nouveau président au quotidien israélien Israel Hayom, mardi 17 janvier, au sujet de celle-ci. Néanmoins, le déplacement de l'ambassade US de Tel-Aviv à Jérusalem n'est pas encore certain. Le conseiller en politique étrangère de M. Trump, Walid Phares, a annoncé le 11 novembre 2016 que la décision serait prise « dans le cadre d'un consensus ». Le secrétaire à la Défense James Mattis s'est distancié des positions du président en affirmant le 11 janvier : « La capitale d'Israël où je me rends est Tel-Aviv. » Tandis que les nouveaux arrivants aux responsabilités se montrent favorables au choix de Jérusalem, les vétérans apparaissent plus prudents.
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M. Trump devrait prendre sa décision au plus tard en mai, six mois après le dernier décret de renoncement signé par M. Obama. Depuis 1995, les présidents américains successifs signent deux fois par an un décret empêchant l'entrée en vigueur de la loi qui prévoit le transfert de l'ambassade de Tel-Aviv, où elle se trouve depuis 1966, à Jérusalem. Bill Clinton et George W. Bush, qui avaient pourtant promis durant leur campagne le transfert de l'ambassade à Jérusalem, n'ont pas dérogé à la règle sur le sujet. Les soixante ans de la guerre des Six-Jours étant commémorés en juin, une annonce tardive du nouveau président pourrait lier les deux événements, ce qui pourrait provoquer de violentes réactions diplomatiques et populaires. Dès son annonce officielle, ce transfert pourrait s'effectuer rapidement. Les États-Unis disposent d'ores et déjà de bâtiments qui pourraient faire office d'ambassade provisoire.
« La communauté internationale demande que Jérusalem soit la capitale reconnue de deux États, Israël et la Palestine, donc sur le principe il n'y a rien d'illégitime que les ambassades soient déplacées à Jérusalem, mais, dans ce cas, il en faudra deux, une pour l'État d'Israël et une pour l'État de Palestine », rappelle Vincent Lemire, historien spécialiste de Jérusalem. À l'heure actuelle, les Américains disposent d'un consulat général à Jérusalem-Est, représentant leurs intérêts en Palestine, mais aucun projet d'ambassade n'est envisagé. Et le 45e président des États-Unis ne semble pas voir les choses ainsi : il a qualifié Jérusalem de « capitale indivisible de l'État d'Israël » le 25 septembre dernier. L'État hébreu revendique la totalité de la ville, tandis que les Palestiniens revendiquent sa partie orientale, actuellement en voie de colonisation par Israël, qui a autorisé dimanche la construction de 566 logements à Jérusalem-Est.
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Une rupture
Cette reconnaissance des prétentions israéliennes sur Jérusalem, unique dans la communauté internationale, ne serait toutefois pas nécessairement favorable à l'État hébreu. Israël a jusqu'alors réussi à éviter une troisième intifada, notamment grâce à l'aide des services de renseignements de l'Autorité palestinienne. Or, « une telle décision constituerait une rupture, qui remettrait en cause ce type de coopération et qui surtout provoquerait une réaction populaire, qui prendrait sans conteste une dimension violente », analyse Béligh Nabli, directeur de recherche à l'Iris (Institut de relations internationales et stratégiques). Le porte-parole du Fateh, Osama Qawasmeh, a déclaré samedi 14 janvier que « le peuple palestinien ne permettrait pas » l'application d'une telle décision, ajoutant qu'elle « ouvrirait les portes de l'enfer dans la région et le monde ».
La volonté de M. Trump de transférer la représentation diplomatique américaine est essentiellement symbolique. Depuis 2006 et le déplacement des ambassades du Salvador et du Costa Rica, plus aucune représentation diplomatique en Israël ne se trouve à Jérusalem. Toutefois, aucun pays n'a la possibilité d'empêcher une décision unilatérale de la première puissance mondiale. Mais « les réactions diplomatiques qui surviendraient dans le monde arabe sunnite pourraient poser problème à Israël. Une telle décision américaine constituerait potentiellement un obstacle à l'actuelle tentative de rapprochement non officielle entre Israël et les pétromonarchies sunnites du Golfe, dans la mesure où l'Arabie saoudite se veut le défenseur des lieux saints musulmans dans le monde », rappelle Béligh Nabli. « Cela aura un profond impact sur la capacité de la Jordanie et de l'Égypte d'être en mesure de soutenir et de s'allier avec Israël, comme elles le font aujourd'hui », a souligné vendredi 6 janvier John Kerry, secrétaire d'État américain durant la présidence de Barack Obama.
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15 h 23, le 24 janvier 2017