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Président ? Candidat ?

Il y a quelques mois, cette seule éventualité sonnait encore comme une mauvaise blague. Depuis hier, l'atypique Donald Trump, détenteur d'une fortune colossale mais totalement dénué d'expérience politique, comme de bonnes manières, est pourtant le chef de la nation la plus puissante du monde.

De ce président absolument pas comme tous les autres, vivement controversé, dont la légitimité se trouve même contestée à grand fracas dans la rue, on attendait, une fois investi, des mots de rassembleur, de fédérateur, rôle qu'il se décernait lui-même quelques heures seulement auparavant. C'est le candidat Trump, un Trump plus vrai que nature, qui a parlé. On a vu ainsi l'invétéré populiste flétrir l'establishment politique de Washington, largement représenté pourtant autour de lui, et qu'il accuse de s'enrichir aux dépens du bon peuple ; à celui-ci, il fait miroiter derechef une profusion de chantiers et d'emplois. L'Amérique d'abord, acheter américain, embaucher américain, a décrété, quant à lui, le farouche protectionniste, insistant pour qu'on en prenne bien note dans chaque ville, chaque capitale étrangère.

Est-ce pour autant un retour à l'isolationnisme du XIXe siècle qu'érigea en doctrine le président Monroe? Et la grandeur retrouvée de l'Amérique – un thème cher au nouveau président – saurait-elle tenir à des considérations exclusivement domestiques? Le nouveau pensionnaire de la Maison-Blanche souhaiterait-il réellement claquemurer l'Oncle Sam à l'intérieur de ses frontières qu'il devrait forcément prendre en compte les énormes intérêts US disséminés dans le monde. Usant de phrases sibyllines, il s'est engagé hier à renforcer les vieilles alliances, mais aussi à en nouer de nouvelles. Mais c'est sur la question du terrorisme d'inspiration islamique que l'homme à la célèbre houppe s'est exprimé avec le plus de force, sinon de netteté, s'engageant à unifier le monde civilisé en vue d'éradiquer complètement le terrorisme d'inspiration islamique.

Sur ce terrain, celui du Moyen-Orient, ce qui n'est encore qu'une bien inconsistante doctrine Trump va se heurter dès lors à plus d'une contradiction. Dans son désir affiché de coopérer avec Vladimir Poutine, le président se retrouvera, par ricochet, du même côté de la barricade que ce même Iran qu'il entend dessaisir de ses acquis nucléaires. Et ses débordantes sympathies pour Israël ne sont pas faites pour mobiliser sérieusement les gouvernements et populations musulmans contre les hordes de Daech.

Lors du déjeuner au Capitole qui a suivi sa prestation de serment, Donald Trump a fait preuve d'une élégance insoupçonnée en faisant applaudir sa rivale Hillary Clinton, qu'il qualifiait systématiquement de crapule. S'il n'a pas perdu de temps pour torpiller plus d'un des programmes mis en place par son prédécesseur Barack Obama, le président va devoir démêler les nœuds de politique étrangère dans lesquels il s'est emberlificoté durant sa campagne électorale. Sans encore en venir à se dédire, il laisse faire déjà certains de ses ministres. Qui, passant récemment leur examen oral devant le Congrès, n'ont pas fait de difficulté pour admettre que le brave Poutine ne fait pas grand-chose en réalité pour détruire l'État islamique ; qu'il essaie de casser l'OTAN, que les Européens ont donc toutes les raisons du monde de s'inquiéter ; et enfin, que la crédibilité internationale de l'Amérique exige qu'elle respecte ses engagements, notamment ceux contractés envers Téhéran.

Singulier feuilleton de télé-réalité à suivre.

Issa GORAIEB
igor@lorient-lejour.com.lb

Il y a quelques mois, cette seule éventualité sonnait encore comme une mauvaise blague. Depuis hier, l'atypique Donald Trump, détenteur d'une fortune colossale mais totalement dénué d'expérience politique, comme de bonnes manières, est pourtant le chef de la nation la plus puissante du monde.
De ce président absolument pas comme tous les autres, vivement controversé, dont la...