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Économie - Splendeurs et misères économiques

Davos : forum des vanités

Né à Beyrouth, Michel Santi est un macroéconomiste franco-suisse qui conseille des banques centrales et des fonds souverains. Il est l’auteur de « Misère et opulence » et de « Pour un capitalisme entre adultes consentants. »

« À Davos, les milliardaires informent les millionnaires sur la situation de la classe moyenne. » C'est en ces termes que Jamie Dimon, grand patron de JPMorgan Chase et vétéran de l'événement, décrit l'ambiance régnant sur cette rencontre annuelle qui a eu lieu cette semaine dans la célèbre station alpine helvétique. Il semblerait en effet que le « business as usual » ait continué comme si de rien n'était pour l'establishment, qui n'a décidément rien appris des leçons de ce passé très récent ayant vu coup sur coup le Brexit et l'élection de Donald Trump. Pire même, puisque les gardiens de ce temple, désormais quasi désert, se sont plus que jamais complu dans cet ultralibéralisme, dans cette dérégulation et dans cette mondialisation qui sont pourtant en train de rendre l'âme et qui sont responsables du déclassement de cette classe moyenne.
Souvenez-vous de leurs imprécations et de leurs doctes avertissements ayant précédé le Brexit, présenté comme le cataclysme à venir. La réalité est qu'ils se sont – et les économistes avec eux – totalement trompés sur les effets de ce Brexit dont les conséquences restent incertaines. Face à des modèles de prévision inadaptés et à un processus dont l'issue finale sera dépendante de la manière dont seront menées les négociations, c'est pourtant la modestie qui s'imposait au lieu d'attiser la peur du chaos. Alors, faut-il encore écouter les experts ne souffrant nulle contradiction et se fier aux économistes dont nul n'osait – préalablement au Brexit – contester les verdicts sans appels ? Notre système capitaliste est-il seulement capable d'autocritique, d'arrêter d'insulter les électeurs en méprisant leurs suffrages ?
Bon courage, donc, pour faire parvenir ces messages aux réfugiés de luxe abrités dans leurs hôtels 5 étoiles hypersécurisés de Davos, et à leurs alter ego qui ont déambulé dans les soirées privées arrosées au champagne organisées dans des chalets somptueux. Vous n'êtes pas à Versailles mais presque, tant la hiérarchie et l'esprit de cour règnent en maîtres absolus au sein de ce microcosme stérile n'ayant rien prévu aux événements de 2016 ! Une simple lecture du rapport 2016 du World Economic Forum montre en effet que nulle mention du Brexit, de Donald Trump ou du revenu universel n'y figurait ! Du reste, aucune mention à l'agenda de cette année de l'inéluctable limitation du flux des capitaux et des populations qui sera le thème incontournable de 2017.
Mais il est vrai que la clairvoyance n'est pas vraiment l'apanage de cette caste toujours prompte à excommunier. Voyez plutôt l'économiste keynésien Paul Krugman qui, en guise de boutade, n'a de cesse d'appeler depuis près de dix ans de ses vœux une invasion des « aliens » qui contraindrait les États à enfin se lancer dans des dépenses qui favoriseront la reprise économique... et qui se déchaîne désormais contre Trump qui projette précisément de lancer de grands travaux pour stimuler la croissance !
Le consensus ayant fait ces quarante dernières années la gloire du WEF, qui consacrait la globalisation et l'ouverture des marchés comme seuls et uniques vecteurs du développement des économies, est désormais en sursis, et ce même si – peut-être pour la dernière fois ? – les délégués présents à Davos ont à nouveau entonné l'hymne à un capitalisme mondialisé à l'agonie. Quant à la montée du populisme, elle n'est pas tant le rejet de la politique préconisée par les experts que la manifestation la plus limpide de la répudiation de ces mêmes experts.

« À Davos, les milliardaires informent les millionnaires sur la situation de la classe moyenne. » C'est en ces termes que Jamie Dimon, grand patron de JPMorgan Chase et vétéran de l'événement, décrit l'ambiance régnant sur cette rencontre annuelle qui a eu lieu cette semaine dans la célèbre station alpine helvétique. Il semblerait en effet que le « business as usual »...

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