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Liban - Polémique

Une performance musicale à la mémoire de Castro « escamotée » à l’Unesco ; la Toile s’enflamme

Des milieux communistes pointent un doigt accusateur contre le Hezbollah et al-Manar.

Le député Mohammad Raad prononçant le discours de Hassan Nasrallah lors du meeting à la mémoire de Fidel Castro.

Un hommage au dirigeant cubain Fidel Castro, organisé samedi à l'Unesco par « La campagne nationale pour honorer la mémoire du militant Fidel Castro », qui regroupe différents courants politiques, notamment des mouvements communistes et le Hezbollah, fait l'objet d'une vive polémique sur les réseaux sociaux depuis qu'il a eu lieu samedi dernier.

Au programme de cet hommage au Lider maximo, plus d'une douzaine de discours prononcés par des personnalités politiques et partisanes... et des performances musicales. Les discours ont bien été maintenus dans l'ordre prévu. Mais la musique, elle, n'a plus été diffusée.
L'explication qui s'est répandue comme une traînée de poudre est que le Hezbollah aurait demandé d'annuler toute diffusion de musique durant le meeting à la mémoire du dirigeant cubain, condition à laquelle les organisateurs de l'événement auraient obtempéré. Indignés, des membres de la campagne se sont interrogés sur les motifs de ce changement de programme, et bruyamment, puisqu'ils ont fait entendre leur voix sur les réseaux sociaux et les différents blogs.

La réponse est tombée comme un couperet : « Le chef du bloc de la Fidélité à la résistance, le député Mohammad Raad, prononce une allocution au nom du secrétaire général du parti, Hassan Nasrallah. Pas de musique. » Telle est l'explication qu'ils auraient reçue, selon une source qui a suivi de près l'organisation du meeting, mais qui a requis l'anonymat. Car ce n'est pas que la musique que le parti chiite a réussi à prohiber. La parole, aussi, a du mal à briser le mur du silence et de la peur.

L'Orient-Le Jour a ainsi interrogé hier plusieurs personnes proches des milieux communistes libanais, présentes lors de l'événement. Mais c'est la loi du silence, accompagnée d'une grande confusion, de contradictions dans les témoignages, au final bien dociles à l'égard du Hezbollah, qui règne à la suite du tollé suscité par l'affaire. Preuve en est, tous ces témoins ont catégoriquement refusé de prendre la parole, même sous le couvert de l'anonymat.

L'un des rares à s'exprimer, le président d'un groupe de gauche, « l'Union des jeunes démocrates », Ali Mteirek, est monté au créneau pour décrédibiliser la version selon laquelle il y aurait eu une demande de la part du Hezbollah d'annuler les performances musicales prévues à la gloire de Fidel Castro, et que celles-ci ont finalement été « reportées » jusqu'à la fin de la cérémonie pour des contraintes de temps uniquement. « Le temps prévu pour les discours a été largement dépassé par les orateurs de sorte que nous n'avons plus eu le luxe de consacrer du temps aux musiciens », a-t-il indiqué.

Une autre raison, selon lui, était la couverture en direct de l'événement par les deux chaînes proches du parti chiite, al-Manar et al-Mayadeen. Celles-ci auraient préféré que les performances musicales soient reportées jusqu'après les discours, trop nombreux pour des contraintes de temps dues à la diffusion en direct.
L'abstention d'al-Manar de retransmettre, par idéologie, de la musique ne serait-elle pas derrière cette proposition de report des performances? « Jamais », répond M. Mteirek, qui dément toute requête du Hezbollah d'éliminer les performances musicales du programme.

À la même question, un autre organisateur, de mouvance communiste, retranché dans l'anonymat, a affirmé le contraire à L'OLJ : « Bien sûr que oui. La chaîne al-Manar n'a jamais diffusé de la musique, et cet événement n'allait pas être l'exception à la règle. » Selon ce responsable communiste, l'annulation de la diffusion des prestations musicales prévues pour six minutes a été décidée la veille, lorsque les organisateurs et la chaîne al-Mayadeen se sont rendus compte de l'impossibilité de consacrer un temps à la musique avec treize discours prévus. Un chant à la mémoire de Fidel Castro d'une minute et demie a donc été envisagé spontanément pour parer à cette contrainte de direct. Or, ajoute-t-il, « le jour même, al-Manar a demandé de reporter ce chant jusqu'à la fin de la cérémonie pour qu'elle puisse arrêter la diffusion du direct juste après la fin du dernier discours », a-t-il assuré.
« Mais il ne faut surtout pas établir un lien quelconque entre l'événement en question et les deux affaires de l'UL et de Kfar Remmane », s'empresse-t-il d'ajouter.

Le Hezbollah avait, rappelons-le, interdit la diffusion des chansons de Feyrouz dans le campus de la faculté de génie de l'Université libanaise à Hadeth, fin 2016. Et, il y a deux semaines, des habitants de Kfar Remmane, une localité du caza de Nabatiyé, avaient découvert non sans surprise que leur conseil municipal (dont plusieurs membres sont des partisans du Hezbollah) avait discuté de l'interdiction de la vente des boissons alcoolisées dans le village.
Pourtant, dans les milieux démocrates chiites, il est difficile de ne pas faire le lien entre tous ces événements. Ces derniers ne sont guère surprenants, ajoutent-ils, « lorsque l'on en sait suffisamment sur l'idéologie et les croyances du Hezbollah pour savoir que c'est un parti intégriste ».

« Le Hezbollah n'est pas à blâmer », affirme ainsi l'analyste politique Moustapha Fahs, fils de l'uléma disparu Hani Fahs. « Ceux qui sont plutôt à blâmer, ce sont ces amoureux transis » du Hezbollah, « notamment les intellectuels de la gauche qui adoptent vis-à-vis du parti la politique du "laisser faire, laisser passer" et lui justifient absolument tout, sous le couvert de la résistance, la guerre sainte ou le devoir sacré... », dénonce-t-il.
Pour M. Fahs, le Hezbollah a toujours été clair sur ses objectifs et n'a jamais menti, ni sur son identité ni sur ses projets. « Je ne comprends pas que l'on puisse être surpris de cette attitude, que ce soit concernant la prohibition de la musique ou de la vente des boissons alcoolisées. Après tout, le Hezbollah est un parti religieux, le même depuis toujours. Et les partis religieux ne créent jamais ni de l'art, ni des poèmes, ni des chansons. »
Et de conclure : « C'est cette harmonie avec le Hezbollah qui l'a amené à imposer de pareilles mesures dans différentes régions. Ses adversaires sont aussi reprochables à ce niveau que ses alliés. Les premiers sont faibles et sans projets précis, et les seconds tendent à lui justifier tous ses comportements. »

 

 

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Au programme de cet hommage au Lider...

commentaires (1)

Tout comme leur Khomeinéééh ! Les premiers qu'il avait éliminé après la destitution du Shah, furent ses "câlins" alliés du Toudeh, des Feddayins-khâlk et des Moudjahidines-khâlk ! Même Bani Sadr, leur Béret Per(c)sé local ! Sans oublier, bien entendu, son "fils spirituel" le fameux Ghotbzadeh qui a fini.... fusillé à peine deux années après !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

08 h 17, le 19 janvier 2017

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Commentaires (1)

  • Tout comme leur Khomeinéééh ! Les premiers qu'il avait éliminé après la destitution du Shah, furent ses "câlins" alliés du Toudeh, des Feddayins-khâlk et des Moudjahidines-khâlk ! Même Bani Sadr, leur Béret Per(c)sé local ! Sans oublier, bien entendu, son "fils spirituel" le fameux Ghotbzadeh qui a fini.... fusillé à peine deux années après !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    08 h 17, le 19 janvier 2017

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