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Liban - Santé publique

Mobilisation contre la stigmatisation des toxicomanes

« Jugez moins, aidez plus. » Tel est le slogan de la campagne lancée par le Cénacle de la Lumière pour la prévention contre les addictions.

De gauche à droite : Atef Majdalani, Pierre Bou Assi et Souraya Frem. Photo Annahar

« En 2012, j'ai été complètement guéri de mon addiction à la drogue. Au lieu de me soumettre toujours à l'examen des autres, et d'évoquer en permanence les années sombres de mon passé, j'aimerais plutôt qu'on me félicite pour ma capacité à tourner la page ou qu'on me dise simplement : Bravo ! » Tel est le témoignage d'un ancien toxicomane qui a suivi le programme de réhabilitation du Cénacle de la Lumière (CDLL), une ONG libanaise vouée au service des personnes dépendantes de l'alcool et des drogues. Le Liban compte, selon le CDLL, 23 000 toxicomanes répertoriés, pour la plupart des jeunes entre 15 et 34 ans.

« Durant la période de réhabilitation, j'ai réussi à découvrir les vraies raisons qui m'ont amené à sombrer dans ce gouffre, et ce n'était pas facile. La période de réhabilitation n'a pas été un emprisonnement, mais une école dans laquelle j'ai appris à me reconstruire », a ajouté l'ancien toxicomane. « Aujourd'hui, cinq ans après la guérison, les gens me jugent toujours. Mais la différence est que je suis en paix avec moi-même », a conclu le jeune homme, qui s'exprimait lors d'une conférence de presse tenue par le CDLL dans un hôtel de Hamra pour lancer, sous le patronage du ministère des Affaires sociales, la campagne médiatique nationale « Bala drugs » (sans drogues).

C'est cette triste réalité de la montée du taux de toxicomanie chez les jeunes Libanais que le CDLL tente de dénoncer en axant son message sur la réinsertion sociale et la solidarité. « Jugez moins, aidez plus » est ainsi le slogan principal de la campagne qui repose sur deux volets essentiels.
D'une part, un vidéo-clip réalisé à partir de dessins animés qui sera diffusé sur les chaînes de télévision, une bande-son à la radio et des visuels dans les revues, journaux et autres espaces de publicité. La vidéo distingue premièrement entre différents types d'addiction et met en relief l'addiction à la drogue, qui est la plus dangereuse de toutes, pour ensuite retracer le chemin d'une personne guérie grâce à la solidarité des autres. « Nous sommes tous humains après tout. Aidons-nous les uns les autres pour ne pas tomber. » Tel est le message du CDLL diffusé à la fin de la chanson qui accompagne la vidéo et qui sera diffusée dans différents programmes tout au long de l'année.

La campagne s'appuie également sur un site web (www.baladrugs.com) qui servira de plateforme interactive et dont le but est d'apporter les informations et conseils aux personnes victimes d'addiction, ainsi qu'à leur entourage. Le site web consacre un volet différent à chaque cas. Ainsi, la personne droguée trouvera les réponses à ses questions et une personne qui soupçonne un proche de se droguer des conseils. Les parents, quant à eux, bénéficieront d'un espace qui leur est propre.

 

(Pour mémoire : 90 % des toxicomanes ne bénéficient d'aucun traitement)

 

 

Poser un regard positif
« Si nous lançons aujourd'hui la campagne "Bala drugs", c'est parce que nous sommes convaincus de l'importance de poser un regard positif, inconditionnel et personnalisé sur chaque cas, et parce que nous croyons fortement au pouvoir de la collectivité à servir de moyen et de contexte pour opérer un véritable changement », a affirmé Souraya Frem, présidente du CDLL. « L'individu construit sa personnalité à travers son interaction avec son environnement, et non pas dans l'isolement », a-t-elle ajouté, avant de conclure : « Nous avons besoin les uns des autres parce que quand une personne se sent écoutée, respectée et acceptée, nous lui apprenons que la vie vaut la peine d'être vécue. »

Pour sa part, le ministre des Affaires sociales, Pierre Bou Assi, a insisté sur le rôle du gouvernement libanais dans la bataille contre ce danger qui affecte les jeunes. « Le but primordial est de renforcer la sensibilisation aux dangers de l'addiction, de prendre des mesures strictes vis-à-vis des agents moteurs contribuant à sa propagation et d'agir de manière responsable avec le toxicomane afin de l'aider à sortir de son addiction, regagner sa liberté et se réinsérer dans la société », a-t-il expliqué. Et de poursuivre : « Souvent la négligence, la maltraitance, la désintégration de la famille et la situation socioéconomique sont les causes qui poussent une personne à fuir la dure réalité et à se noyer dans des rêves fabriqués qui ne sont en réalité que des cauchemars fatals. »

Le député Atef Majdalani a abondé dans le même sens : « C'est pour cela que les toxicomanes doivent être soignés et non pas punis. Le gouvernement doit offrir plus de capacités aux institutions afin qu'elles puissent aider les milliers de toxicomanes qui n'ont pas accès aux soins. »

 

(Pour mémoire : Les hôpitaux n'ont plus l'obligation de rapporter les cas d'overdose : les associations crient victoire)

 

 

La légalisation du cannabis : le Liban est-il prêt ?
Évoquant par ailleurs la question de la légalisation du cannabis au Liban, M. Majdalani a déclaré qu'« il faut noter tout d'abord que ce dossier comprend deux aspects, d'une part celui de la légalisation et la réglementation de la culture du haschich et son utilisation par l'industrie pharmaceutique, et d'autre part celui de la légalisation de sa consommation ». Le député a précisé qu'il s'opposait catégoriquement aux deux. « En ce qui concerne la première, une réglementation stricte de la culture du cannabis est requise, or l'État libanais n'a même pas réussi à faire appliquer la loi antitabac en vigueur. Quant à la consommation du haschich, d'autres pays l'ont légalisée », mais les chiffres montrent des résultats décevants, a-t-il conclu.

 

Pour mémoire

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