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Comment le coup d’État manqué a catalysé la transformation de la Turquie - Décryptage

L’appareil sécuritaire turc, autre victime des purges...

Les services de renseignements, les juges antiterroristes ainsi que la police ont été largement affaiblis par les épurations menées par Erdogan.

La police sécurise les lieux autour du bâtiment où s’est produite l’attaque contre l’ambassadeur de Russie en Turquie, à Ankara, le 19 décembre 2016. Umit Bektas/ Reuters

La Turquie est en guerre sur trois fronts : contre les gülénistes, fidèles de l'imam Fethullah Gülen qui serait, selon le président turc, à l'origine du putsch de juillet 2016; contre le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et ses filiales ; et contre l'État islamique (EI). Ces trois groupes, considérés comme terroristes par la Turquie, sont accusés d'avoir mené de nombreux attentats dans le pays ces derniers mois ou ont été accusés de chercher à renverser le pouvoir. Et la situation ne semble pas s'arranger. En seulement quelques jours, la Turquie a encore été frappée deux fois : par l'EI, le 31 janvier, dans une boîte branchée d'Istanbul, puis par le PKK le jeudi 5 janvier à Izmir.

Les attaques se sont accélérées après les purges engagées par le président Recep Tayyip Erdogan. Suite au putsch du 15 juillet dernier, fomenté par une partie des militaires de l'armée turque, ce dernier a entrepris d'épurer une grande partie des services publics. Au moins 87 membres des services de renseignements, plus de 12 800 policiers, dont 2 500 commissaires, et plus de la moitié des généraux ont ainsi été évincés.
Les services de renseignements et la police, qui s'occupent de protéger la population de possibles attaques terroristes, sont eux aussi affectés par cette purge qui affaiblit l'appareil sécuritaire turc ainsi que les moyens de sa défense extérieure.

« Les purges qu'a réalisées et que réalise le président turc ne peuvent qu'affecter le bon fonctionnement de la protection du pays. Les nombreux postes supprimés dans l'armée, les services de renseignements mais aussi dans la justice n'ont fait qu'affaiblir le système de protection », explique Jean Marcou, professeur et directeur des relations internationales à Sciences Po Grenoble, et spécialiste de la Turquie, interrogé par L'Orient-Le Jour.

 

(Lire aussi : Comment le coup d'État manqué a catalysé la transformation de la Turquie)

 

« Un véritable formatage »
« Erdogan réalise un véritable formatage au niveau de la sécurité », insiste M. Marcou. Une purge qui bloque la sécurité extérieure, mais aussi intérieure du pays. Entre les soldats qui ont perdu leurs généraux, qui ne savent pas vraiment ce qu'ils doivent faire et les renseignements qui, eux, sont concentrés à trouver les derniers organisateurs du putsch, « le pays est fortement déstabilisé », déclare l'expert.

Pour tenter de remédier à cela, le gouvernement turc a entrepris des embauches hâtives dans l'armée. Ce qui n'est pas sans risque. « L'agent qui a tué l'ambassadeur russe en Turquie, en décembre dernier, faisait partie des nouvelles recrues. Cela montre bien que ces recrutements sont risqués », affirme Jean Marcou. Avec près de 90 % des effectifs des renseignements extérieurs écartés, et leurs remplaçants qui manquent d'expérience, le pays est sérieusement fragilisé. Le président turc aura finalement contribué à affaiblir son appareil sécuritaire au moment où la Turquie en a le plus besoin. Ouvrant ainsi la voie à une longue période d'instabilité.

 

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