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À La Une - Analyse

Que fera Pyongyang de la crise politique en Corée du Sud?

"Kim Jong-Un (...) n'a aucune raison de se livrer à des actes de provocation qui donneraient raison aux faucons à Séoul".

Photo non datée et diffusée le 11 décembre 2016 montrant le leader nord-coréen Kim Jong-Un durant une simulation de combat des forces spéciales de l'armée nord-coréenne. AFP PHOTO/KCNA VIA KNS

La chute annoncée de la présidente Park Geun-Hye est une victoire pour de nombreux Sud-Coréens. Mais le vide du pouvoir qui en découle pourrait aussi inciter Pyongyang à la surenchère.

Les révélations qui ont accompagné, semaine après semaine, le scandale politique qui a débouché vendredi sur un vote de destitution de la présidente, ont fait passer au second plan la question du conflit intercoréen, alors que 2016 aura été tendue sur la péninsule. Avec deux essais nucléaires et une vingtaine de tirs de missiles, la Corée du Nord a fait depuis janvier des progrès dans ses efforts pour se doter de missiles intercontinentaux.

Face à ce menaçant voisin, la dernière chose que souhaite le Sud est de se montrer vulnérable. Or la longue transition politique qui s'ouvre après le vote de destitution des parlementaires sud-coréens constitue pour Pyongyang une occasion en or de montrer les muscles.

Cette menace a d'ailleurs été d'emblée évoquée par le Premier ministre Hwang Kyo-Ahn, un ancien procureur jamais élu qui, du fait de la mise sur la touche de Mme Park, devient soudain le chef des forces armées sud-coréennes. Lors d'une réunion d'urgence samedi, il a exhorté l'armée à la vigilance. "Le gouvernement met en œuvre toutes les mesures nécessaires pour empêcher le vide de pouvoir et apaiser l'angoisse de la population", a-t-il dit. "Pour l'instant (...) aucun développement notoire n'a été observé au Nord. Mais tous les agents sud-coréens doivent avoir en tête cette situation."

 

(Lire aussi : Séoul va instaurer de nouvelles sanctions contre Pyongyang)

 

'Vieille sorcière psychopathe'
Dimanche toutefois, les médias officiels nord-coréens ont fait état d'un important exercice militaire simulant une attaque du siège de la présidence sud-coréenne. Ils n'ont pas précisé quand ces manœuvres auraient eu lieu.

Les médias du Nord, jamais à court d'insanités à l'endroit de Mme Park, ont suivi avec délectation tous les épisodes de sa disgrâce. Samedi, le Rodong Sinmun, organe du Parti des travailleurs au pouvoir à Pyongyang, l'a qualifiée de "légume" et estimé qu'en refusant de démissionner, elle se comportait comme "une vieille sorcière, une psychopathe sans égal".

Pyongyang ira-t-il au-delà de la rhétorique puérile? Beaucoup d'experts en doutent, estimant que Pyongyang choisira d'attendre et d'observer l'évolution politique au Sud, et surtout ce que sera la diplomatie américaine sous Donald Trump.

La Corée du Nord a certes toujours aimé tester les nouveaux présidents américains. Mais les choses pourraient être différentes tant on s'interroge, à Pyongyang aussi, sur la politique étrangère du prochain occupant de la Maison blanche.

"La Corée du Nord va vouloir comprendre les orientations politiques de l'administration Trump", estime Yang Moo-Jin, professeur à l'Université pour les études nord-coréennes de Séoul. "Elle ne devrait pas réaliser un nouvel essai nucléaire qui contraindrait d'emblée Trump à la fermeté."

 

(Lire aussi : Séoul va instaurer de nouvelles sanctions contre Pyongyang)

 

Patience
Le calendrier nucléaire et balistique nord-coréen est déterminé par des considérations scientifiques, croit de son côté Leif-Eric Easley, chercheur à l'Institut Asan pour les études politiques de Séoul. "Les derniers tests ont donné aux scientifiques et ingénieurs (du Nord) beaucoup de données techniques sur lesquelles travailler", a-t-il dit. "Pyongyang pourrait donc attendre de voir quel leader émergera du tumulte politique en Corée du Sud."

Mme Park, elle, a mené une politique de fermeté, refusant toute concession tant que le Nord ne prenait pas des engagements tangibles vers la dénucléarisation. Elle a même fait fermer le complexe industriel de Kaesong, ultime projet de coopération intercoréenne.

Pour Koh Yu-Hwan, professeur de sciences politiques à l'Université Dongguk, "Kim Jong-Un sait exactement ce qu'il fait". "Il n'a aucune raison de se livrer à des actes de provocation qui donneraient raison aux faucons à Séoul", explique-t-il.

Au Nord, on prépare la commémoration d'une série de grandes dates, comme les anniversaires de la naissance de Kim Jong-Il et Kim Il-Sung en février et avril, ou celui de la fondation de l'armée. Ces dernières années, ces célébrations ont été marquées par des essais d'armes nord-coréennes.
Reste à savoir si Pyongyang aura la patience d'attendre que la crise politique se termine au Sud.

La Cour constitutionnelle pourrait mettre jusqu'à six mois à confirmer la destitution. Le cas échéant, il faudrait peut-être attendre deux mois de plus pour qu'une présidentielle se tienne au Sud.

 

 

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