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Économie - Splendeurs et misères économiques

Revenu minimum universel : une idée de droite ?

Né à Beyrouth, Michel Santi est un macroéconomiste franco-suisse qui conseille des banques centrales et des fonds souverains. Il est notamment l’auteur de « L’Europe, chroniques d’un fiasco économique et politique » et de « Misère et opulence ».

Le revenu minimum universel – que certains économistes avant-gardistes appellent de leurs vœux depuis plusieurs années – a le vent en poupe. Sa mise en place est désormais sérieusement considérée non seulement par la gauche (ce qui est compréhensible), mais (plus surprenant) également par la mouvance capitaliste traditionnelle de droite. Pourquoi l'ensemble du spectre des économistes, mais aussi de plus en plus de politiques, s'accordent-ils pour que chaque citoyen – avec ou sans emploi – puisse recevoir un salaire lui permettant de subvenir à ses besoins élémentaires?

L'abolition de la misère, un meilleur équilibre de vie autorisant d'opter pour le volontariat ou pour le travail à la maison, la sortie de la précarité de nombre de femmes toujours exclues du monde du travail dans un Occident encore dominé par les hommes, sont les avantages immédiats et intuitifs offerts par le revenu minimum universel. Pour autant, la gauche y voit également une source de renforcement de la masse salariale qui sera ainsi en mesure de prolonger ses grèves afin de manifester son mécontentement, sans mettre en péril son niveau de vie grâce à cette sécurité supplémentaire. Ce salaire universel représente enfin une nécessité impérieuse dans notre monde postcapitaliste de demain (voire d'aujourd'hui) dominé par la robotisation massive qui privera de leur emploi de plus en plus d'humains.

Tous ces arguments ne nous expliquent cependant pas pourquoi la droite se reconvertit elle aussi, lentement mais sûrement, au revenu minimum universel. En fait, son instauration permettra de supprimer nombre d'allocations et d'aides sociales tout en réduisant la taille des services publics, donc de l'État. Par ailleurs, la droite considère que le revenu minimum universel insufflera une flexibilité bienvenue au sein du marché du travail car les salariés seront moins motivés à lutter contre les réductions de salaire et les licenciements. En effet, les salaires – et donc le coût du travail – s'ajusteront bien plus rapidement aux modifications des conditions économiques et de marché.

De plus en plus de politiques de gauche comme de droite tombent donc d'accord pour opérer cette authentique révolution des mœurs qui consiste à séparer le revenu du travail, mesure qui ne nécessitera nulle réforme complexe au sein de nos économies, si ce n'est une injection de liquidités en faveur de chaque citoyen. Ce salaire déconnecté de toute activité professionnelle sauvera un capitalisme de plus en plus remis en cause, tout en propulsant la demande agrégée sans forcément gonfler l'épargne. Le mode de production capitaliste restera effectivement identique, à la différence près que le capitalisme – lui – sera en quelque sorte humanisé et que les travailleurs ne seront plus en compétition avec la robotisation contre laquelle il est inutile de lutter car elle est inéluctable.
En conclusion, le revenu minimum universel est une manière de redistribuer les richesses autrement que par le salaire d'un travail.

 

 

Pour mémoire
Pour un revenu minimum universel

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