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À La Une - Brésil

Michel Temer face aux défis colossaux d'un Brésil en crise

Le président par intérim, d'origine libanaise, aura peu de temps pour savourer sa victoire après la probable destitution de Dilma Rousseff.

D'origine libanaise, Michel Temer, 75 ans, est l'homme fort du principal parti du Brésil, le PMDB (centre droite). Mais sa popularité est au plus bas (14%) et il arriverait au pouvoir de manière accidentelle, sans la légitimité des urnes. AFP / ANDRESSA ANHOLETE

Si Michel Temer est confirmé comme président du Brésil après la probable destitution de Dilma Rousseff par le Sénat, il aura peu de temps pour savourer sa victoire, dans un pays en crise historique. Il lui faudra en effet relancer une économie en récession tout en ménageant la base hétérogène de partis ayant permis son ascension. En coulisses, l'ombre du méga-scandale de corruption Petrobras continuera de peser.

 

Partis fragmentés
D'origine libanaise, Michel Temer, 75 ans, est l'homme fort du principal parti du Brésil, le PMDB (centre droite). Mais sa popularité est au plus bas (14%) et il arriverait au pouvoir de manière accidentelle, sans la légitimité des urnes.

Désigné président par intérim le 12 mai après la suspension de Dilma Rousseff, il veut gouverner jusqu'à l'élection présidentielle fin 2018. Pour cela, il s'appuie sur une équipe économique prestigieuse et sur le "centrao", le grand centre : majoritaire au Parlement, c'est un groupe conservateur sur le plan politique et libéral en matière d'économie.

"Temer a été coopté par des secteurs conservateurs (...) mais il est un conciliateur, il n'a jamais défendu la privatisation de Petrobras ou la vente de terres, toutes ces idées qui apparaissent maintenant", explique à l'AFP Roberto Requiao, sénateur du PMDB opposé à l'impeachment. "S'il ne mène pas ce programme radical, il ne va pas résister aux exigences de ces groupes conservateurs, et s'il le mène, une autre crise éclatera".

La fragmentation des partis fragilisait déjà Rousseff, qui devait convaincre 14 partis pour faire approuver par majorité simple un projet au Parlement. L'ex-président Fernando Henrique Cardoso (1995-2002) disait en avoir besoin de seulement trois.

 

(Lire aussi : Rousseff au Sénat : « Votez contre l'impeachment, votez pour la démocratie »)

 

Économie enrhumée
C'est le plus grand défi à relever : passer d'une économie reposant sur une large intervention de l’État à un modèle plus libéral.

Le PIB a chuté de 3,8% en 2015 et devrait reculer de 3,1% en 2016. Ces deux années consécutives dans le rouge sont inédites depuis les années 1930, dans un contexte de chômage (11,3% en juin) et inflation (8,74% sur un an) élevés. En réaction, le ministre des Finances Henrique Meirelles veut freiner les dépenses, flexibiliser le marché du travail et réduire le coût des retraites.

"Ce sera tout un défi d'un point de vue politique, mais je crois que le consensus qui s'est formé pour créer un mouvement politique pro-impeachment doit désormais faire ses preuves", estime Carlos Kawall, économiste en chef de la banque Safra et ex-secrétaire du Trésor. Face à un "niveau de dépense publique intenable", "la clé, aujourd'hui, c'est de faire un ajustement structurel. S'il n'y arrive pas, nous entrerons dans une crise plus profonde".

 

(Lire aussi : Pour les liftiers du Sénat, l'ascenseur Brésil ne fait que descendre)

 

Réveil social?
Longtemps perçu comme le mouvement du changement, le Parti des travailleurs (PT) de Dilma Rousseff a perdu cette image quand les scandales de corruption l'ont rattrapé.

Désormais, face à un Michel Temer représentant l'ordre établi, le PT mise sur un renouveau des mouvements sociaux qui ont largement profité pendant plus d'une décennie des faveurs du parti. "Le plan de rigueur fera perdre des fonds aux mouvements sociaux qui, pendant les gouvernements du PT, étaient très liés au pouvoir, et qui maintenant peuvent se réorganiser", prédit Luiz Alberto de Souza, sociologue de l'université Candido Mendes, à Rio. "Les syndicats se mettront en mouvement avec les réformes", observe aussi Carlos Kawall.

 

(Pour mémoire : Un Libanais à la tête du Brésil...)

 

Corruption endémique
Le gigantesque scandale de corruption autour du groupe pétrolier d'État Petrobras n'a pas épargné le gouvernement par intérim : dès son premier mois il a perdu trois ministres, éclaboussés par l'affaire.

Le nom de Michel Temer a même été cité par plusieurs accusés témoignant en échange d'une réduction de peine. L'intéressé nie en bloc et ne fait pas l'objet d'enquête. Mais le réseau de corruption, qui a détourné plusieurs milliards de dollars de l'entreprise publique, a été la cible principale des manifestants pro-impeachment, qui n'ont pas caché leur dégoût pour la politique traditionnelle, notamment celle du PMDB.

Michel Temer affronte par ailleurs une enquête du Tribunal supérieur électoral sur un possible financement illégal de sa campagne conjointe avec Dilma Rousseff, pour l'élection présidentielle de 2014.

 

 

Pour mémoire

Temer décrit comme "une guerre" son premier mois à la tête du Brésil

Seuls 11,3% des Brésiliens soutiennent le président Temer

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