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Culture - Festivals

Buika et Carminho, entre duende et saudade...

Ni duo. Ni duel. Mais un voyage au cœur des notes et des « cantes » de la péninsule Ibérique... C'est ce qu'ont offert, dans un double concert hier, Carminho, la « fadista nueva » portugaise, et Buika, la chanteuse de flamenco-jazz hispano-guinéenne, aux festivaliers de Beiteddine.

Ne voulant pas se plier à un horaire de concert qui lui paraît restreint, Buika a prolongé sa performance.

L'une est veloutée, souple et d'une amplitude chargée d'expression. L'autre est sombre, éraillée, puissamment animale. Deux voix qui se complètent, se répondent comme en écho, formant l'âme et le corps d'une musique ibérique commune. Toujours intense, parfois frémissante, d'autres fois poignante ou encore déchirante...
Sous le ciel étoilé de Beiteddine, ces deux voix, celles de Carminho, au fado rafraîchi d'une vigueur nouvelle, et de Buika, aux tonalités flamencas-jazz, ont transcendé les frontières des langues et des pays pour toucher directement à l'universalité des émotions...

Pour ce concert de clôture de la saison 2016, le Festival de Beiteddine avait soigné l'ambiance. Une partie du public était attablée autour du bassin fleuri de la petite cour intérieure dans une sorte de reconstitution, à ciel ouvert, des « casas de fado » ou des « tablas » de flamenco. Tandis que le public installé sur les gradins du fond profitait lui d'une agréable vue d'ensemble sur la scène et les tables parsemées de mille bougies.
Trois guitares (classique, basse et portugaise) en introduction et le timbre velouté de Carminho s'élève dans le ciel profond. Sobrement élégante en pantalon noir à bretelles sur un top clair satiné et talons aiguilles, les cheveux tirés en arrière, la chanteuse originaire de Lisbonne a interprété avec autant d'ardeur que de sensibilité aussi bien des morceaux du répertoire traditionnel du fado – dont un a cappella fort applaudi – que des chants populaires portugais revisités d'un zeste de sonorités plus contemporaines.

Enfant du sérail, Maria do Carmo Carvalho Rebelo de Andrade, plus connue sous son nom de scène Carminho, a grandi bercée par les chants fado de sa mère et la musique de son père, dans la taverne qu'ils tenaient et où elle a fait ses premières armes dès ses 11 ans, a-t-elle confié au public.
Une dernière chanson aux accents de cette indéfinissable Saudade, à la fois mélancolique et souriante, et la voilà qui tire sa révérence devant un public conquis par le charme simple de celle qui est aujourd'hui considérée comme l'une des plus talentueuses héritières d'Amalia Rodrigues...

 

(Lire aussi : Bassem Youssef, p(r)ince sans rire)

 

Brève entracte et voilà que Buika fait son entrée en deuxième partie. Accompagnée d'une formation agrandie (cordes, cuivres, clavier et percussions), la perle noire de Majorca (son île natale) glisse sur scène, pieds nus sous les godets de sa robe. Et là, dès les premiers instants, le ton est donné. Son chant est un métissage d'influences et d'énergies : intensité flamenca, souffle jazz et soul, et sens du rythme africain.
Il y a une quinzaine d'années, Buika jouait les imitatrices de Tina Turner dans les casinos de Las Vegas. Depuis, cette Andalouse aux racines guinéennes a suivi sa propre voie d' « interprète sans limites », comme l'a qualifiée Pedro Almodovar, son fan absolu, qui lui a confié un petit rôle ainsi que l'interprétation des deux chansons de son film La piel que habito.

Sa voix d'une tessiture très large peut être, tout à la fois, d'une douceur caressante et d'un rauque déchirant comme un cri. Elle l'a démontré dans une fantastique réinterprétation de Siboney, suivie de deux morceaux d'un flamenco nuevo tirés de son album La Noche mas larga (La nuit la plus longue) (nominé aux Grammy Awards Latino ). Mais pour cette artiste à l'incandescence d'une lave volcanique, toutes les nuits se doivent d'être longues. Ne voulant pas se plier à un horaire de concert qui lui paraît restreint, elle prolonge sa performance, le temps d'atteindre cet état de grâce, de transe mystérieuse, entre chair et esprit, qu'on appelle le « duende ». Et d'entraîner dans son sillage le public quasiment chaviré... Un public auquel elle promet de revenir. En gage de quoi, elle remet à l'une des spectatrices du premier rang (en l'occurrence Vasso Salam) son bracelet...

 

 

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