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Culture - Rencontre

Malikah, reine populaire du hip-hop arabe

Après une tournée mondiale avec le leader de Gorillaz et Blur, Damon Albarn, après avoir joué devant des centaines de milliers de spectateurs, la Libanaise retourne à la maison et prend son temps pour sortir un premier album attendu. Il couronnera 14 ans d'une carrière unique, très riche en rencontres et en succès, et pourtant soutenue par aucun disque jusque-là.

En dehors du milieu hip-hop, Malikah n’a pas encore la reconnaissance médiatique que ses succès méritent. Photo Fares Sokhon

«On a fait Glastonbury et Roskilde, à chaque fois devant plusieurs centaines de milliers de personnes, et puis après je suis allée à Paris et j'ai chanté dans un squat, c'est presque plus difficile.» Le tout dit avec le plus grand naturel du monde, comme si jouer devant un dixième de la population libanaise était facile et le quotidien de tout un chacun.

C'est pourtant l'impression que donne Malikah quand elle raconte la tournée qu'elle vient de réaliser dans le cadre d'Africa Express, un festival organisé par Damon Albarn. Damon Albarn est un artiste pop/rock anglais majeur qui a créé et dirigé deux des groupes les plus importants de ces vingt dernières années, Blur et Gorillaz. Gorillaz, son dernier projet, un mélange de rock et d'influences diverses, dont la musique arabe, et notamment l'Orchestre national de Syrie, avait fait un concert mémorable en 2010 au Festival de Byblos avec, excusez du peu, la présence de De La Soul, de Bobby Womack et de l'ultracharismatique bassiste des Clash, Paul Simonon. Ce concert a été également joué à Damas la même année, pour ce qui a été sans doute le dernier événement culturel que les Damascènes ont pu apprécier avant de tomber dans le chaos. Malikah a rencontré Damon Albarn à cette période, mais c'est en 2014, lors du premier Africa Express organisé à Marseille, que leur collaboration se renforcera.

Vu du Liban, il subsiste un doute, car en dehors du milieu hip-hop, Malikah n'a pas la reconnaissance médiatique que ses succès méritent. Il faut dire qu'elle réside à Dubaï, n'a pas de page soundcloud et n'a sorti aucun album depuis ses débuts à 14 ans à Beyrouth, en l'an 2000. D'abord en cachette, contre l'avis de son père, puis avec son assentiment, elle fait bouger les lignes et n'arrête pas de jouer, enregistrer, chanter, poussée par l'émulation qui existe alors dans le milieu hip-hop. Alors qu'elle a à peine 15 ans, elle est invitée à l'émission de Zaven Kouyoumdjian sur la Future et, sous le pseudonyme LIX, signe avec EMI Arabia. En 2004, son bac en poche, elle part à Montréal pour suivre des études de biologie. Grâce à sa page Myspace, ancêtre de tous les réseaux sociaux actuels, un producteur US, The Mighty THOR, la remarque et la signe. Malika/LIX chante et rappe alors en anglais, et c'est suite à la guerre de 2006 qu'elle décide de revenir à sa langue maternelle et de ne se produire qu'en arabe, avec un premier hit, Ya Loubnan, écrit sur les bombes encore fumantes de la guerre de l'été 2006, et de s'autoproclamer «Malikah, reine du hip-hop arabe».

 

En Colombie, devant 50 000 personnes
Cette décision artistique est un tournant, car elle donne encore plus de confiance en elle à l'artiste et lui permet de s'affirmer dans un milieu dominé par les hommes, mais où son talent est unanimement reconnu.

Faisant alors des allers-retours entre le Canada et le Liban, elle décide de s'installer définitivement à Beyrouth en 2007 suite à sa participation à une émission de MTV Arabia et une tournée Red Bull en tant qu'opinion leader. C'est à cette époque qu'elle rencontre Fredwreck, un producteur palestino-américain qui a travaillé avec les superstars Dr Dre, Snoop Dog ou encore Eminem. Ils produiront ensemble sept morceaux. Dans les années qui suivront, Malikah continuera sa folle aventure artistique (et personnelle) avec trois saisons d'une émission qu'elle anime sur Rotana TV; une autre émission sur NBC; des études à la AUST; l'ouverture du concert de Snoop Dogg à Abu Dhabi, à la demande expresse de la star US elle-même; une tournée mondiale avec le Goethe Institut, dont le point d'orgue sera un concert en Colombie devant cinquante mille personnes; le titre de brand ambassador d'Adidas (un peu comme Messi, mais sans les dollars), ou encore l'écriture et l'enregistrement du dernier morceau posthume de Nate Dogg (jamais publié).

C'est son énergie, son flow, son attitude et ses textes qui font d'elle cette artiste recherchée par les meilleurs et appréciée par les spectateurs, car elle s'engage, aussi bien physiquement que politiquement, en se battant pour l'émancipation des femmes, pour la Palestine et pour la jeunesse. Ce who's who du rap et cette liste sans fin de concerts, tournées et collaborations trouveront leur conclusion, mais pas leur fin, avec la sortie en septembre/octobre de Archeev, premier album sous forme de best of de Malikah, précédé de sma3, son premier extrait single/vidéoclip. Ah, et sinon, le jour, Malikah a un vrai travail, celui dont la moitié de la planète rêve: account director pour des marques de friandises, notamment chocolatées, très, très connues...

 

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