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Moyen Orient et Monde - Éclairage

La bataille de la dernière chance pour les rebelles d’Alep

Les groupes insurgés des quartiers est, aidés de combattants venus de tout le pays, lancent toutes leurs forces dans l'offensive destinée à briser le siège imposé par le régime.

Les habitants d’Alep brûlaient des pneus hier, dont l’épaisse fumée noire était destinée à brouiller la visibilité des avions de combat du régime syrien et de son allié russe. Abdel-Rahman Ismail/Reuters

Encerclés depuis le 17 juillet par les troupes du régime syrien, une coalition de groupes rebelles armés ont lancé dimanche une offensive destinée à briser le siège des quartiers est d'Alep. Coupée en deux depuis juillet 2012, l'est de la ville, tenu par les insurgés et où se trouveraient encore plus de 250 000 personnes, n'a plus de route d'approvisionnement, la dernière, dite du Castello, étant aujourd'hui sous contrôle du régime.

Plusieurs groupes ont mobilisé leurs forces pour cette bataille. Entre autres, Fateh el-Cham (ancien Front al-Nosra), Ahrar al-Cham, Jaïch al-Sunna, Faïlak al-Cham et le Parti islamique du Turkestan (PIT), indique Fabrice Balanche, géographe spécialiste de la Syrie et chercheur invité au Washington Institute. Ce dernier groupe est « d'origine ouïghoure de Chine et il joue un rôle très important parce qu'ils sont pires que tous, que Nosra, que Daech (acronyme arabe de l'EI) ; ils recourent à l'attentat-suicide régulièrement », précise l'expert. Ce fut d'ailleurs le cas dimanche, dans le quartier de Madrasset al-Hikmé (École de la Sagesse) au sud de la ville. Deux voitures piégées placées par le PIT, aidé de Fateh el-Cham, ont permis aux rebelles d'y pénétrer et de prendre certains points stratégiques de la zone.

Comme beaucoup d'autres factions, le PIT a laissé plus d'un front, comme celui de Lattaquié, de Hama, pour contribuer à l'offensive contre le régime à Alep, les rendant vulnérables. Plusieurs milliers d'hommes – au moins 5 000 selon certaines sources – participent aux combats qui font rage. Partant du sud-ouest d'un côté, et du sud de l'autre, ils tentent d'encercler les troupes loyalistes et d'inverser les rôles. Toutefois, ils ont peu de chances d'y parvenir, ne serait-ce que par manque de moyens. « Il leur faudrait des missiles antiaériens, ce qui n'est pas le cas », explique M. Balanche. Pour contrer les hélicoptères et les avions de l'armée de Damas et de Moscou, les habitants sont même en train de brûler des pneus pour créer une épaisse fumée noire et rendre quasi impossible toute aide aux troupes au sol. Celles-ci sont néanmoins aidées par des combattants iraniens, le Hezbollah et même le l'YPG* (Unités de protection du peuple, branche armée du PYD, pendant syrien du PKK kurde), et ont par conséquent un avantage certain sur les insurgés.

 

(Lire aussi : Le cri d'alarme des médecins d'Alep)

 

Long siège en perspective
Il est certain que l'enjeu est de taille. Outre l'évidence même selon laquelle la reprise totale d'Alep serait une immense victoire pour Bachar el-Assad, les rebelles seraient par contre poussés dans leurs derniers retranchements, à tous les niveaux. S'ils échouent dans leur offensive, ce qui est probable vu leur désavantage en termes de moyens, les quartiers est seront assiégés, et ce pour longtemps. Le régime peut, lui, se permettre d'attendre que de longues négociations suivent leur cours, contrairement aux rebelles qui pourraient être tentés de se rendre. Comme le rappelle Fabrice Balanche, à Homs, les négociations autour d'un kilomètre carré ont duré plus d'un an...

Après Alep, quelle pourrait être alors la prochaine étape pour le pouvoir ? Sur le plan tactique, le régime devrait plutôt continuer à reprendre le contrôle de zones autour de Damas, où les rebelles, notamment dans la Ghouta orientale, sont totalement encerclés ; il devrait aussi « essayer de réduire la poche de Rastan entre Homs et Hama », juge l'expert.
Parallèlement, sur le plan diplomatique, certaines avancées sont prévues. Les négociations entre le régime et l'opposition sont par exemple censées reprendre à la fin du mois d'août à Genève. En outre, le président russe Vladimir Poutine est supposé rencontrer son homologue turc Recep Tayyip Erdogan le 9 août à Saint-Pétersbourg, et certaines concessions pourraient être faites. « Erdogan a besoin de se rapprocher des Russes et n'est plus vraiment en état de soutenir les rebelles comme avant », avance Fabrice Balanche.

* Fabrice Balanche, « Kurdish Forces Bolster Assad in Aleppo », Washington Institute, 29 juillet 2016.

 

 

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