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Culture - Musiques actuelles

Marc Nammour chante, à Avignon, la colère des enfants immigrés

Le poète-rappeur-chanteur libano-français Marc Nammour est doublement présent pour la 70e édition du festival in.

Pour « 99 », Marc Nammour (au centre) est entouré d’excellents musiciens. Photo Nicolas Salet

Le festival in d'Avignon, il y vient presque en habitué depuis deux ans. Après y avoir participé une première fois en 2014, le poète-rappeur-chanteur libano-français Marc Nammour est doublement présent pour cette 70e édition : il porte une création, 99, qui s'inscrit dans le Focus Moyen-Orient ; et il participe, en tant que parolier, à une autre, Kit de survie, de Serge Teyssot-Gay (l'ancien guitariste du groupe Noir Désir). Présentés dans la cour du musée Calvet, les deux spectacles sont une production de la prestigieuse abbaye de Royaumont.
Marc Nammour a la poésie âpre, brute. Ses mots ont la dureté de la revendication. Sur scène, il balance le buste d'avant en arrière, comme pour apaiser sa colère. Ses textes, il les dit plus qu'il ne les chante, et ses chansons mêlent l'arabe au français, naturellement. Au-delà des mots, il instaure un échange puissant avec les excellents musiciens qui l'entourent : Rishab Prasanna, Lorenzo Bianchi-Hoesch, Jérôme Boivin et Amir el-Saffar.
Mais c'est avec son pays d'origine qu'il aimerait (re)nouer le dialogue... Sur une scène libanaise. Questions-réponses...

Qui est Marc Nammour ?
Je suis un Libanais exilé en France, qui a fui la guerre comme bon nombre de Libanais. Je suis arrivé dans une cité ouvrière de l'Est, dans un milieu très populaire et très modeste. J' y ai vécu de 8 à 18 ans. J'y ai formé ma conscience politique, éprouvant une colère saine et légitime quand je me suis rendu compte qu'immigrés et milieux populaires sont parqués au même endroit ; quand j'ai dû affronter le regard inquisiteur du centre-ville face aux gars de la cité... Je me suis servi de l'écriture pour sortir ce trop-plein de colère. J'ai quitté l'Est et ce Jura blanc, car je ne m'y sentais pas à ma place. C'est à Montreuil, où je vis depuis 15 ans, que j'ai trouvé la fenêtre sur le monde que je cherchais.

Vous parlez de vos origines pour la première fois il y a deux ans, lors de votre participation au projet Interzone Extended, présenté à Avignon. Pourquoi ?
Je voulais éviter l'écueil du communautarisme. Finalement, le ciment d'une société, c'est plus une origine et une revendication sociales que géographiques.
Serge Teyssot-Gay travaille beaucoup sur les ponts musicaux entre l'Orient et l'Occident. En écoutant sa musique, toute la mémoire émotionnelle liée à la musique orientale est remontée... Depuis, ça ne m'a plus quitté, comme quelque chose de tout à fait naturel. Cela d'autant plus que le débat aujourd'hui en France sur l'identité est tellement nauséabond et nous force à nous positionner.

« 99 » est une création présentée pour la première fois à Avignon. Qu'est-ce que le 99 ? Comment ce territoire d'exclusion devient un territoire d'ouverture ?
99 fait référence à un souvenir d'enfance : quand j'étais gamin, j'ai vu sur mes papiers que j'étais originaire du département 99, département que je n'ai trouvé nulle part. La France ne compte que 98 départements administratifs. Le 99 est ce département fourre-tout, qui regroupe tout ce qui n'est pas français. À l'époque, ce 99, je le ressentais comme une insulte. Avec cette création, le but du jeu a été, pour moi, de me réapproprier cette insulte pour lui redonner ses lettres de noblesse. À partir de là, il s'agissait d'être fier de ce 99, que je transforme de département d'exclusion en département d'ouverture aux autres, à tous les autres.

Il y a deux ans, Frédéric Deval, le directeur du programme de Musiques transculturelles à l'abbaye de Royaumont, haut lieu de la création musicale en France, vous offre une carte blanche de trois ans à Royaumont. Frédéric Deval est décédé brusquement en mars dernier. Qu'en est-il de votre résidence?
Royaumont a plus que jamais la volonté de continuer sur les traces de Frédéric Deval, pour rendre hommage à sa mémoire, à son travail. Frédéric Deval avait mis l'outil Royaumont au service des nouvelles voix de la création musicale. Il y a deux ans, suite à la présentation d'Interzone Extended à Avignon, Frédéric Deval me propose une résidence de travail de trois ans à l'abbaye.
Avec Deval, Royaumont est devenue une terre d'asile pour des musiciens des quatre coins du monde. C'est un cadre, des moyens financiers et techniques, et des résidences pendant lesquelles on se retrouve pour créer. Une chance incroyable et rare.

Comment s'est fait le choix des musiciens qui vous entourent ?
Initialement, le projet 99 devait se faire avec la participation de Abdullah Miniawy, chanteur soufi et jeune poète du Caire. Nous avons fait une première résidence de création de 5 jours en janvier dernier. Pour la seconde étape de travail en mai, Abdallah n'a pas pu nous accompagner jusqu'au bout, pour des raisons politiques.

Le festival in d'Avignon, il y vient presque en habitué depuis deux ans. Après y avoir participé une première fois en 2014, le poète-rappeur-chanteur libano-français Marc Nammour est doublement présent pour cette 70e édition : il porte une création, 99, qui s'inscrit dans le Focus Moyen-Orient ; et il participe, en tant que parolier, à une autre, Kit de survie, de Serge...

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