Les efforts internationaux s'intensifient pour contenir la crise irano-saoudienne, provoquée par l'exécution, en Arabie, du dignitaire chiite, Nimr el-Nimr, farouche opposant au régime wahhabite.
Au Liban, ces nouvelles tensions sunnito-chiites ont déteint sur le discours du secrétaire général, Hassan Nasrallah, dimanche dernier. Il s'est attaqué nommément à la famille Saoud, « que le sang du cheikh Nimr poursuivra dans le monde et dans l'au-delà », et appelant au départ de la famille régnante dans la péninsule Arabique. Dans des milieux du 14 Mars, l'on s'interroge sur « ce qui habilite Hassan Nasrallah à critiquer des mesures intérieures décidées par l'Arabie, qui ne le concernent pas ». Pour ces milieux, le leader du parti chiite a une nouvelle fois outrepassé la position officielle de l'État libanais, qui considère l'Arabie comme un pays ami. Il a également violé la politique de distanciation convenue par les parties libanaises, sans compter qu'il a fait fi des intérêts de milliers de Libanais résidant dans le royaume d'Arabie.
Devant l'improbabilité, révélée par les chefs respectifs des diplomaties iranienne et saoudienne, que la crise diplomatique irano-saoudienne ne dégénère en escalade, quel est l'impact de ces tensions sur le Liban ? La première question est liée à la portée du discours de Hassan Nasrallah : bien qu'ayant tempéré la virulence de son propos en soulignant « la responsabilité qu'a le Hezbollah d'éviter un conflit sunnito-chiite », Hassan Nasrallah incarne, aux yeux des diplomates, la position de l'aile radicale iranienne des Gardiens de la révolution. C'est ce que confirment des sources diplomatiques citées par l'agence d'information al-Markaziya.
La question qui découle de cette lecture est celle de savoir s'il existe une position iranienne unifiée sur la question de l'entente autour de la présidentielle libanaise, sachant que ce compromis avait bénéficié, dans un premier temps, d'un appui non officiel du Hezbollah.
Or, pour l'heure, le discours du Hezbollah ne renvoie aucun signe d'appui à l'option Frangié. Tirant hier à boulets rouges sur la famille Saoud, dans le prolongement du discours de Hassan Nasrallah, le chef du bloc du Hezbollah, le député Mohammad Raad, n'a pas manqué de critiquer subsidiairement, sans le nommer, le chef du courant du Futur, Saad Hariri, et l'initiative qu'il parraine pour débloquer la présidentielle.
« D'aucuns au Liban veulent spolier l'État et ses institutions, dans l'intérêt du mandataire de la famille qui règne sur le Golfe, ou dans l'intérêt politique de Washington ou de l'Occident », a souligné hier M. Raad. « Nous en avons ras-le-bol de la corruption : celui qui est en état de faillite là où il a élu domicile ne trouvera pas d'abri chez nous. Le Liban ne sera pas livré aux pillages une nouvelle fois. Toutes les tentatives de conclure des marchés et d'obtenir des compromis, sous prétexte de renforcer la stabilité du Liban, ont pour seul objectif de mettre en œuvre un plan visant à soumettre le pays aux desiderata politiques du royaume d'Arabie ou des autres grandes puissances », a déclaré le député hezbollahi. Et de préciser, en référence claire au compromis : « Il ne s'agissait pas, pour nous, de confier à un homme la présidence de la République, celle-ci étant dépouillée de prérogatives. Il s'agissait plutôt, pour eux, de concentrer toutes les prérogatives constitutionnelles entre les mains du dépositaire de la politique de l'Arabie ou des grandes puissances. »
En dépit des arguments invoqués contre le compromis et endossés en partie hier par une figure parlementaire du Hezbollah, son échec n'a toujours pas été annoncé. Quoique controversée, cette entente demeure la seule initiative qui existe actuellement pour débloquer la présidentielle, ne cessent de répéter les milieux haririens. Ce compromis devrait être évoqué en marge de visites officielles successives, à Paris, du président iranien, Hassan Rohani, le 21 janvier, et du prince héritier d'Arabie, Mohammad ben Nayef. Il serait possible en outre que chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, se rende prochainement à Téhéran pour examiner notamment une issue à la présidentielle libanaise.
Alors que les analyses les plus optimistes prévoient l'élection d'un président en mars prochain – c'est-à-dire pas avant trois mois –, le Conseil des ministres est encore une fois mis au (curieux) défi de se réunir. À cet égard, le député Ahmad Fatfat, membre du bloc du Futur, a révélé hier à l'agence al-Markaziya que « le Hezbollah œuvre actuellement pour une relance de l'exécutif ». M. Fatfat s'est dit néanmoins sceptique quant à une relance effective sur ce plan, tant qu'elle « ne se fonde pas sur un changement des règles du jeu (liées au mécanisme de prise de décision) et un retour aux procédés constitutionnels. Une démarche que le Courant patriotique libre refuse obstinément ».
S. N.
Liban
Le Hezbollah accuse indirectement Hariri d’être « le mandataire de l’Arabie et des États-Unis »
OLJ / Par S. N., le 05 janvier 2016 à 00h00
commentaires (7)
743 Executions capitales (au moins) en 2014 en Iran et 90 (au moins) en Arabie Saoudite.... La paille et la poutre... Chiffres Amnesty International. Ce message ne consitute pas une justification dans un sens ou dans l'autre, mais devant l'avalanche de réactions anti Saoudienne présentant l'Iran comme un paragon de la liberté d'expression, il fallait réagir.
Bachir Karim
13 h 21, le 05 janvier 2016