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Culture - Exposition

Fragments d’un discours cosmique

Vingt sculptures en divers matériaux d'Anachar Basbous, pour des intérieurs privilégiant les rondeurs, les pointes, le ballet et l'acrobatie du mouvement. Un brillant exercice de style d'une
voluptueuse et fantaisiste modernité à la galerie Agial*.

Corten Steel 50 x 90 x 55 cm.

Anachar, anagramme pour Rachana. Sur le flanc de ce bourg sur les hauteurs de Batroun, la famille Basbous, depuis presque un demi-siècle (déjà !), a jeté au vent ses sculptures défiant pluie, soleil et tempêtes. Ombres fantomatiques, blanches ou sombres, elles longent les rues et serpentent face à la mer, aux cimes des montagnes et aux creux des vallons.
Anachar Basbous, issu de cette terre et de ce clan – en un exercice de style rénovateur, échappant avec détermination au formel de tout un passé – perpétue cette écriture au burin, au compas, au maillet, à la râpe, aux rifloirs. Dans un angle optique différent. Avec une quête d'un esthétisme neuf. En décrochant lune et soleil de leur piédestal...
Pour des abstractions habilement orchestrées auxquelles il prête des vertus séductrices et qui ont pour noyau une variation autour du disque. Cercle, rondelles, boule aplatie, astre, orbite. Le dicible et l'indicible, le plein et le vide, l'uni et le fragmenté. Espace stellaire, espace circulaire tronqué, gonflé, sectionné, tronçonné, coupé, rassemblé, assemblé, agencé, soudé.

En équilibre sur un trépied
Dans une construction relevant d'un défi d'équilibre dont la base demeure toujours un trépied. Trois points pour une créativité ne s'embarrassant ni de sensualité ni de figuration, mais comme une épure spatiale mariant en toute agilité et toute souplesse légèreté, concision et précision. À travers un maniement adroit des formes. Comme des pastilles géantes, formes polies, brossées, lustrées, soudées pour une finition aux détails impeccables. Et d'une incroyable stabilité par-delà ce qui semble une gymnastique périlleuse et de haute voltige.
Tentative et exploration aussi de matériaux rebelles et difficiles. Et dont le rendu et la fusion sont ici d'une irréprochable et insoupçonnable beauté. Dont ces laqués dorés, cuivrés ou argentés. Des effets surprenants non seulement avec le laiton, mais même avec du béton comme passé sous compresseur abrasif !
Deux ans de recherche pour se lancer dans la maîtrise du basalte à ton de plomb, du marbre laiteux avec veinule grisâtre, du béton, presque méconnaissable (si ce n'est à la caresse du toucher) tant ses formes sont pliées à la volonté, l'inspiration et l'imagination de l'artiste.
Mais aussi travail intense pour donner toute son éloquence à l'acier inoxydable ou à l'acier « cortene » qui a des allures de rouille, ainsi qu'au laiton et au bronze qui acquièrent là un vocabulaire et une syntaxe inédits. À titre amusant, on serait tenté de dire parfois c'est un pain arabe, tout chaud et rond, droit sorti du four... Mais sans doute ce sont les points secrets d'un imaginaire débordant...

Dialogue entre corps et esprit
Dans ce fouillis d'astres, de courbes, de demi-courbes, de bout de soleil ou de lune en serpe ou faucilles, dans ces barquettes perdues sans le flot des eaux, il y a de toute évidence un subtil dialogue entre gravité et magnétisme, entre microcosme et macrocosme, entre corps et esprit, entre lumière et pénombre, entre l'être et le cosmos.
Dans ce ramage d'œuvres uniques (loin de toute idée de stéréotypes numérotés et démultipliés !), Anachar Basbous, à quarante-six ans et déjà à la tête d'un parcours de vingt-cinq ans de carrière (familier avec la minutie des mosaïques et des perspectives des fresques murales), atteste une farouche détermination à trouver son absolue indépendance. À trouver sa voix. La voie, elle, était déjà toute tracée de par son héritage entre père, mère et oncles, tous artistes, tailleurs dans la pierre, le bois, le bronze et les mots.
Et cette voix semble bien trouvée. Et calmement posée. Du moins jusqu'à nouvel ordre ou... inspiration ! Un prolongement naturel dans ce qui a fait les débuts vite remarqués d'un artiste qui a tenu les promesses de l'enfance.
Ce ne sont pas seulement les jardins et les terrasses des grandes demeures qui auront pour amies et vigies les sculptures d'Anachar Basbous, mais aussi, en toute élégance, chaleur, actualité et une singulière note entre futurisme et atome recomposé d'une « Nasa » furtivement revisitée, une entrée, un coin de salle de séjour, un guéridon, un centre de table...

* L'exposition des sculptures d'Anachar Basbous à la galerie Agial (rue Abdel Aziz, Hamra) se prolonge jusqu'au 2 janvier 2016.

 

Pour mémoire
Virtuosité et apesanteur à géométrie variable...

Anachar, anagramme pour Rachana. Sur le flanc de ce bourg sur les hauteurs de Batroun, la famille Basbous, depuis presque un demi-siècle (déjà !), a jeté au vent ses sculptures défiant pluie, soleil et tempêtes. Ombres fantomatiques, blanches ou sombres, elles longent les rues et serpentent face à la mer, aux cimes des montagnes et aux creux des vallons.Anachar Basbous, issu de...

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