La plus haute autorité chiite d'Irak, l'ayatollah Ali Sistani, a condamné vendredi le déploiement de troupes turques dans le nord du pays sans l'accord de Bagdad, un dossier qui empoisonne depuis une semaine les relations entre les deux Etats.
Aucun pays ne doit "envoyer ses soldats sur le territoire d'un autre Etat sous prétexte de l'aider à lutter contre le terrorisme sans la conclusion d'un accord (...) entre les gouvernements des deux pays", a déclaré, au nom de l'ayatollah Sistani, un de ses représentants lors de la prière du vendredi.
La Turquie a déployé il y a une semaine plusieurs centaines de soldats et des chars dans un camp à Bachiqa, non loin de Mossoul, ville contrôlée depuis juin 2014 par le groupe jihadiste Etat islamique (EI).
Des militaires turcs y entraînent depuis déjà plusieurs mois des troupes du gouvernement régional du Kurdistan irakien (peshmergas) et des volontaires irakiens désireux de combattre l'EI.
Bagdad a exigé le retrait de ces nouvelles troupes et cherche maintenant à obtenir une condamnation de la part du Conseil de sécurité des Nations unies.
Le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu a de son côté défendu le récent déploiement comme "un acte de solidarité", ajoutant: "Quand les menaces (sur le camp d'entraînement) augmentent, nous envoyons des troupes pour protéger le camp".
Le président turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré vendredi que ses troupes devraient rester selon "un accord" trouvé avec les autorités irakiennes, précisant qu'une délégation envoyée à Bagdad "était revenue avec cet accord", sans préciser ni sa teneur ni ses signataires.
Le bureau de M. Davutoglu a confirmé que les deux parties s'étaient entendues sur la "réorganisation" des troupes turques. Une information qui n'a pas encore été confirmée par les autorités irakiennes qui, vendredi, exigeaient toujours le retrait des troupes.
Dans la journée, plusieurs messages d'apaisement ont été envoyés d'Ankara. Le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Cavusoglu a notamment promis de "tenir compte des inquiétudes du gouvernement de Bagdad" sur ce dossier, tout en précisant vouloir le faire en obtenant l'approbation de l'Irak sur ce déploiement. Il a précisé que la Turquie avait stoppé tout déploiement supplémentaire de troupes dans la région par "respect pour l'Irak et le gouvernement de Bagdad".
Il est toutefois revenu lors d'un entretien télévisé sur les raisons sécuritaires qui ont motivé l'arrivée de nouvelles troupes. "Il (ce camp) est situé dans une région très proche de la zone contrôlée par Daech (l'acronyme arabe de l'EI)", a-t-il plaidé. "Particulièrement depuis que nous avons engagé le combat contre Daech, la menace contre la Turquie et nos forces sur le terrain s'est accrue. C'est le devoir de la République de Turquie d'assurer la sécurité de nos troupes", a-t-il poursuivi.
M. Erdogan a indiqué que le sujet ferait l'objet d'une réunion le 21 décembre entre la Turquie, les Etats-Unis et la région autonome du Kurdistan irakien.
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commentaires (2)
Il vit encore ? Lämâhhh !
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN
03 h 08, le 12 décembre 2015