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Culture - Initiative

De l’art pour sauver la paix et la justice au Liban ?

À la fois exposition et plateforme de libre expression, SOS (Save Our Souls) Art Liban se tiendra au palais de l'Unesco du 19 au 25 février 2016. Une première édition à laquelle son initiateur, Saad Ghosn, invite tous les artistes résidant au pays du Cèdre.

Saad Ghosn: « SOS Art, en fait, c’est l’art à la rescousse, c’est l’art qui lui-même sauve en étant un catalyseur et un transmetteur d’idées et de convictions.»

Saad Ghosn, médecin libanais installé aux États-Unis, artiste et activiste, organise SOS Art dans son pays d'adoption depuis plus de dix ans. L'objectif est de regrouper des formes artistiques diverses autour de la paix et de la justice. Cette année, il propose de dupliquer l'initiative à Beyrouth et lance un appel à participation global. Entretien.

Comment a démarré l'aventure SOS Art ?
SOS (Save Our Souls) Art a démarré officiellement en 2003 à Cincinnati, dans l'État de l'Ohio, tout au début de l'invasion américaine de l'Irak. En fait, il se préparait déjà depuis 2001, après les attaques du 11-Septembre et leurs conséquences: la guerre contre le terrorisme et la mise en œuvre du Patriot Act par le gouvernement Bush. Les artistes locaux, dont je faisais partie, se sentaient alors fort isolés et étaient intimidés de relater, à travers l'art, leurs opinions et leurs croyances en ce qui concerne la guerre, la perte de leur liberté d'expression et de leurs droits, l'injustice à travers le monde, etc. De plus, la société américaine n'étant pas, en général, favorable à des expressions artistiques d'ordre sociopolitiques, les galeries n'exposaient pas de telles œuvres et rendaient, de fait, leur visibilité extrêmement réduite.

Pourquoi SOS Art ?
En mars 2003, j'ai donc lancé un appel aux artistes de Cincinnati proposant de créer une plateforme qui nous permettrait d'exprimer nos opinions sur les événements d'alors, mais également sur tout sujet ayant un rapport avec la paix et la justice, et qui nous interpellait. SOS Art est ainsi né avec deux composantes: une exposition d'art collectif et un festival des arts, qui regrouperaient toutes sortes d'expressions artistiques autour de la paix et de la justice, et en faveur d'un changement vers un monde meilleur.
Le but de SOS Art dès le départ était d'encourager et de promouvoir l'utilisation des arts comme véhicules pour la paix et la justice; d'offrir aux artistes une plateforme qui permettrait à leur voix sur de tels sujets d'être perçue, entendue, et de gagner en puissance et en croissance; de construire un réseau et une communauté d'artistes locaux concernés qui échangent, communiquent et collaborent sur les thèmes de paix et de justice; d'informer, de sensibiliser et d'éduquer les spectateurs sur les sujets de paix et de justice, et de forger un dialogue dans ce sens.
SOS Art est maintenant dans sa quatorzième année d'existence à Cincinnati ; une formule similaire aura lieu au Liban du 19 au 25 février 2016 au palais de l'Unesco à Beyrouth. Cette initiative sera en partenariat avec Wahdatouna Khalasouna, en commémoration du quarantième anniversaire du début de la guerre civile libanaise, ainsi qu'avec l'Agenda culturel.
SOS Art est par définition ouvert à tous, gratuitement et sans but lucratif.

Comment aura lieu la sélection d'artistes et selon quels critères ?
SOS Art Liban donnera la voix aux artistes visuels à travers une exposition d'art collectif centrée sur les thèmes de paix et de justice; et à travers un festival des arts qui explorera d'autres expressions artistiques (poétiques, musicales, théâtrales, cinématographiques, de danse, etc.) sur les mêmes thèmes.
Un appel ouvert est fait à tous les artistes visuels libanais ou résidant au Liban, les invitant à participer à l'exposition en soumettant une fiche de candidature (pour plus d'informations contacter:
sosartliban@gmail.com) avant le 15 janvier 2016. Cette fiche sera revue par un comité de sélection qui décidera des œuvres à inclure. Les artistes non visuels seront invités à participer à un programme d'activités qui aura lieu toute la journée du samedi 20 février.
L'exposition comprendra également des œuvres d'enfants et d'étudiants qui auraient produit sous la direction de leur professeur d'art des expressions artistiques individuelles ou collectives représentant leur perspective sur paix et justice.
Les critères principaux du comité de sélection sont: l'adhésion des œuvres aux thèmes de paix et de justice; que les œuvres soient respectueuses et non insultantes; que l'espace disponible d'exposition puisse les accueillir. La qualité artistique de l'œuvre sera prise en compte, l'essence de l'exposition restant cependant les expressions et partages de messages sur les sujets de paix et de justice. En ce sens, SOS Art Liban se veut démocratique, égalitaire et ouvert à tous.

Qu'espérez-vous de cette première édition libanaise ?
J'espère qu'elle réalisera les buts énumérés plus haut, surtout celui de créer une communauté d'artistes libanais engagés qui se connaissent, échangent et collaborent, et dont l'art, puisé à la réalité, servirait de voix et de catalyseur pour un changement local vers la paix et la justice, et vers un monde meilleur.
J'espère également que cette première édition deviendra annuelle et qu'elle installera un courant encourageant les artistes de tout âge, bord, background à utiliser leur art pour exprimer ce en quoi ils croient et ce qui les touche.

Vous êtes vous-même artiste...
Oui, je fais de l'art depuis les années 70. Au début, mon art (dessin, peinture, sculpture) était à valeur principalement plastique et esthétique. Depuis 2001 et la création de SOS Art, il est devenu plus engagé, et représente ma voix sur des sujets qui m'interpellent et qui ont affaire à des thèmes de paix et de justice dans notre monde. Depuis j'ai surtout fait des gravures sur bois, en blanc et noir. En 2008, j'ai été sélectionné par la ville de Cincinnati pour créer un portfolio, Scream (Cri), de 20 gravures sur bois, chacune de 75 x 55 cm, toutes en rapport avec des sujets de justice sociale et de mon expérience d'alors comme Libanais arabe aux États-Unis.

Alors, l'art a-t-il besoin d'être sauvé ?
SOS Art, en fait, c'est l'art à la rescousse, c'est l'art qui lui-même sauve en étant un catalyseur et un transmetteur d'idées et de convictions, un sensibilisateur à des sujets qui interpellent l'artiste et qui sont importants pour sa vie ainsi que pour celle de tout citoyen afin de réaliser ce monde meilleur, ce monde de paix et de justice auquel nous aspirons tous.
Cet art «qui sauve» est indirectement sauvé lui aussi, vu qu'il cesse d'être un art de consommation, un art tout juste utilitaire et à valeur principalement matérielle, ou bien un art élitiste qui touche seulement une minorité. Il devient un art au service de l'artiste, de ce que l'artiste est et de ce en quoi il croit ; il devient sa voix, sa communication, un art connecté à sa vie et indirectement à la vie en général.

*Pour plus d'information sur SOS Art Liban ou pour obtenir une fiche de candidature,
prière de contacter : sosartliban@gmail.com


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À son actif
Saad Ghosn a à son actif un ouvrage de 300 pages intitulé Greater Cincinnati Artists As Activists. Il y répertorie le travail de cinquante artistes-activistes et met en lumière l'engagement de chacun à travers un texte et des illustrations représentatives. Chaque artiste est également représenté par un portrait en noir et blanc pris par le photographe Michael Wilson.

Saad Ghosn, médecin libanais installé aux États-Unis, artiste et activiste, organise SOS Art dans son pays d'adoption depuis plus de dix ans. L'objectif est de regrouper des formes artistiques diverses autour de la paix et de la justice. Cette année, il propose de dupliquer l'initiative à Beyrouth et lance un appel à participation global. Entretien.
Comment a démarré l'aventure SOS Art...

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