Rechercher
Rechercher

Liban - Pédagogie

De l’aide en vue pour les instituteurs du primaire

Un nouveau projet éducatif vient au secours des instituteurs francophones du secteur primaire public au Liban, souvent dépassé par les méthodes pédagogiques actuelles. Si tout marche comme prévu, un premier groupe de 500 instituteurs du Liban-Nord pourrait profiter dès 2016 d'un programme d'instruction pédagogique spécialisé.

L’équipe qui établit le nouveau projet éducatif. Photo Daniel Boehm

D'habitude, Safa Mawlaoui donne des cours. Mais ce week-end, dans les locaux du Centre de recherche et de développement pédagogiques CRDP à Sin el-Fil, les rôles sont inversés. La jeune formatrice du CRDP, ancienne prof d'école et pédagogue spécialisée dans l'évaluation et la formation des enseignants primaires, se retrouve elle-même à la place de l'élève.
En face d'elle, une collègue, également formatrice au sein du CRDP, fait semblant de donner un cours d'école mal structuré. Safa Mawlaoui, jouant bien son rôle d'élève, secoue la tête en signe de confusion pendant qu'une troisième coformatrice enregistre la scène avec son téléphone portable afin de la transformer en séquence vidéo qui sera téléchargée immédiatement.


À l'aide de cette vidéo et d'autres du même genre, imitant des situations suboptimales en classe, les jeunes femmes réunies dans un atelier de création tentent de donner un coup de main aux instructeurs des écoles primaires publiques francophones au Liban, souvent dépassés par les méthodes pédagogiques actuelles. Le court-métrage éducatif en question fait partie d'un projet issu d'une collaboration entre autres du ministère de l'Éducation, du CRDP et de l'Initiative francophone pour la formation à distance des maîtres (Ifadem), qui est une organisation intergouvernementale basée à Paris et vouée à l'éducation, suite à un accord signé en 2013. Le projet Ifadem a en outre été conçu et développé par l'Agence universitaire de la Francophonie (AUF) et l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF).

 

« Nous sommes toutes des anciennes institutrices », explique Safa Mawlaoui. « Nous connaissons donc les besoins de nos collègues et nous tentons de leur offrir une aide pratique et efficace », ajoute-t-elle.

À l'encontre des déficits de formation
À l'aide de quatre livrets d'instruction, d'une plate-forme numérique et de cours offerts par des experts, le projet vise à améliorer les conditions d'enseignement dans le secteur primaire du système scolaire public francophone au Liban, secteur souffrant d'un déclin permanent depuis le début des années 2000 à cause des déficits de formation. « Plusieurs instituteurs dans les établissements publics ne sont pas à la hauteur de leur tâche. Cela est dû au fait que la formation des enseignants du primaire s'est carrément arrêtée il y a quatorze ans. À cause de cela, nous faisons maintenant face à un corps d'instituteurs parfois en manque de qualifications pédagogiques ou professionnelles », explique Rima Malek, docteure assistante, professeure à l'Université libanaise et coordinatrice de la conception du projet.


Pour inverser cette tendance, Rima Malek envisage la création d'un véritable cursus de formation à distance, au profit des enseignants. Lancé en mai dernier avec un premier atelier de conception à Beyrouth, le projet en est maintenant à son troisième et dernier atelier, qui devrait voir la genèse de quatre livrets de formation devant venir en aide aux instituteurs de l'école primaire francophone, accompagnés de vidéos telles que celle qui a été produite par Safa et ses collaboratrices. « Ces livrets contiennent une méthodologie pour enseigner le français à l'école, mais aussi des explications sur la pédagogie en général », précise Rima Malek. Ils expliqueront aux instituteurs comment gérer des classes constituées d'élèves de niveaux et de capacités différents : « Parfois, les enseignants ne savent pas comment se comporter correctement face aux enfants. Ils manquent de distance, préfèrent quelques élèves aux autres et font usage de punitions collectives. Ces choses sont fortement contre-productives. Si nous parvenons à les changer, nous n'allons pas seulement aider les instituteurs à mieux réussir leur travail, mais aussi contribuer à offrir une meilleure éducation pour nos enfants. »

 

Une plate-forme interactive et numérique
Le contenu des livrets est né des vives discussions au sein d'une équipe de 13 conceptrices du CRDP. Sous la direction de Rima Malek et de son homologue auprès de l'Ifadem, Danièle Houpert, le groupe avait analysé la situation actuelle de l'enseignement primaire dans les écoles francophones publiques au Liban-Nord, région avec le taux le plus élevé d'écoles publiques. Composée d'anciens instituteurs, cette équipe est désormais responsable de la production des livrets ainsi que des vidéos et du contenu numérique qui accompagnera les versions imprimées afin de permettre à des instituteurs travaillant dans des régions lointaines de profiter du programme. « Souvent, il est impossible aux instituteurs de pouvoir participer à des ateliers de formation parce qu'ils sont limités dans leur mobilité. Avec notre contenu numérique, ils ont la possibilité de suivre notre programme de chez eux », explique Rima Malek. Grâce à son interactivité, la plateforme permettra aux instituteurs de partager leurs expériences. C'est une innovation considérable au sein des différents projets de l'Ifadem même.

 

Un projet développé par des locaux
Mais est-il vraiment nécessaire que le Liban s'appuie sur une telle organisation externe afin de mieux gérer la formation de ses instituteurs? « Nous sommes là pour accompagner la mise en œuvre des décisions prises par les institutions libanaises. Il n'y a pas de solution idéale à mettre en œuvre, bien au contraire », explique Philippe Timmermans, responsable pays à l'Ifadem Liban, dont l'organisation finance le programme avec 400 000 euros. « Le projet est entièrement développé par les experts locaux. Une fois établi, il sera appliqué par le ministère de l'Éducation, tandis que nous allons nous retirer. »
Reste encore un chemin considérable à parcourir jusque-là. Les livrets seront soumis au ministère au cours de ce mois. Celui-ci doit d'abord donner son feu vert avant que le programme puisse finalement être appliqué à un premier groupe de 500 instituteurs au Liban-Nord en 2016. Sur le plan national, le projet ne serait à disposition qu'en 2017 au plus tôt.

 

 

D'habitude, Safa Mawlaoui donne des cours. Mais ce week-end, dans les locaux du Centre de recherche et de développement pédagogiques CRDP à Sin el-Fil, les rôles sont inversés. La jeune formatrice du CRDP, ancienne prof d'école et pédagogue spécialisée dans l'évaluation et la formation des enseignants primaires, se retrouve elle-même à la place de l'élève.En face d'elle, une...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut