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Liban - La psychanalyse, ni ange ni démon

L’histoire de l’analyse -1- Franz Anton Messmer

En tant qu'il est le premier, en 1775, à opérer le tournant décisif qui permit le passage de l'exorcisme, dont la figure de proue était Johann Joseph Gassner (1727-1779), à la première psychothérapie expérimentale, Franz Anton Messmer (1734-1815) peut être considéré comme le premier précurseur de la psychiatrie dynamique. Mettant en évidence l'importance du fameux « rapport » entre magnétiseur et magnétisé, il sera le précurseur de ce que Freud mettra en évidence sous le nom de « transfert ».
Né en mai 1734, Messmer fit des études de théologie à l'âge de 18 ans, des études de droit ensuite pour faire enfin des études de médecine à Vienne qu'il termina en 1766 pour s'y installer l'année suivante comme médecin. Pour guérir une de ses patientes qui faisait des crises de « vapeurs », de convulsions répétitives et périodiques et qui présentait un grand nombre de symptômes, il commença d'abord par prédire la survenue des crises. Il utilisa ensuite l'aimantation pratiquée en Angleterre et observa d'étranges courants qui, comme un fluide, traversèrent son corps. Il constata ensuite l'amélioration rapide de l'état de sa malade. Par la suite, il comprit que ce premier magnétisme n'était pas dû à la seule action des aimants qu'il avait appliqué sur le corps de la malade mais surtout à l'action d'une force (magnétisme), qui émanait de son propre corps (animal), puisqu'il pouvait obtenir les mêmes effets en appliquant ses mains à la place des aimants.
C'était le 28 juillet 1774, date historique pour Messmer et pour la science médicale. La théorie du « magnétisme animal » venait de naître. Pour la première fois, une explication scientifique issue du siècle des Lumières allait se substituer au pouvoir religieux dont faisait état Gassner dans les exorcismes qu'il opérait avec succès. De ce point de vue-là, nous pouvons reconnaître avec Ellenberger que la victoire de Messmer sur Gassner est une victoire de la science sur la théologie. C'était à une époque où le contexte culturel et historique voyait le déclin du Baroque, caractérisé par le plus grand nombre de procès de sorcellerie (le XVIe siècle a brûlé plus de sorcières que tous les âges précédents réunis) et le triomphe des Lumières. Ellenberger résume le système de Messmer de la façon suivante. Un fluide physique remplit l'univers et circule entre les hommes, la terre et les planètes. Une mauvaise répartition de ce fluide provoque la maladie, et la guérison consiste à retrouver l'équilibre perdu de ce fluide. Certaines techniques permettent de canaliser, d'emmagasiner et de transmettre ce fluide aux autres. On peut ainsi provoquer des crises chez les malades et les guérir.
Messmer était convaincu de porter lui-même ce fameux fluide et reconnaît que l'exorciste Gassner en était pourvu aussi. Mais comme il rejetait toute explication mystique, les découvertes de son époque sur l'électricité et l'aimantation allaient lui donner la possibilité d'expliquer son fluide par « des courants, des décharges, des conducteurs, des isolateurs et des accumulateurs ». Enfin, si Gassner voyait dans la crise la preuve de la possession démoniaque, Messmer y reconnaît la preuve de la maladie et le moyen de la guérir.
Messmer connut une très grande réussite qui finit par s'assombrir vers la fin de sa vie. Après un échec important à Vienne, il se dirigea vers Paris où, non seulement il allait retrouver le succès personnel mais surtout se faire des élèves qui devaient contribuer à la diffusion de son enseignement quoique remanié et non reconnu par Messmer lui-même. Sa renommée fut telle qu'il recevait beaucoup plus de patients qu'il ne pouvait en traiter individuellement et il dût à nouveau utiliser la technique qu'il avait laissée à Vienne mais en l'améliorant dans l'invention du fameux baquet. Si le « baquet » de Messmer peut nous faire sourire aujourd'hui, dans le contexte où il se trouvait alors Messmer était considéré comme un savant authentique. Beaucoup d'autres chercheurs étaient fascinés aussi par la découverte de Newton et se tournaient vers une force universelle comme l'électricité, le feu ou le phlogistique. Quant aux effets physiologiques de ce fluide ressenti par les patients de Messmer, il est fort probable qu'il y ait eu là un effet placebo, et l'on ne voit pas pourquoi les médicaments auraient ce pouvoir et pas un appareil comme le baquet.
À la fin de sa vie, il répétait : « Il n'y a qu'une maladie, qu'un remède, qu'une guérison. » Mieux encore, il considérait que nul remède ou procédé thérapeutique ne pouvait guérir un malade par ses vertus propres. Si la guérison était due surtout au magnétisme du médecin, il n'hésitait pas à dire que « le magnétisme animal doit en premier lieu se transmettre par le sentiment ».
La prochaine fois, nous verrons le nouveau magnétisme avec Puységur.

Chawki AZOURI

En tant qu'il est le premier, en 1775, à opérer le tournant décisif qui permit le passage de l'exorcisme, dont la figure de proue était Johann Joseph Gassner (1727-1779), à la première psychothérapie expérimentale, Franz Anton Messmer (1734-1815) peut être considéré comme le premier précurseur de la psychiatrie dynamique. Mettant en évidence l'importance du fameux...

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