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Lifestyle - Liban pop

Wissam et Issam Breidy : une (courte) vie à deux

« Nous avons toujours des opinions très divergentes à propos de tout, mais nous n'avons été et ne serons jamais des ennemis. Nous sommes prêts à affronter demain ensemble. »

Wissam et Issam, un tandem qui sera difficilement oublié.

Les tandems indissociables ont toujours existé dans le monde des arts et du showbiz. À Hollywood comme chez nous, ces compères ont souvent tracé leur chemin ensemble pour former des duos, parfois de choc, inséparables. Souvent, des frères ou des sœurs ont connu la gloire ensemble, vivant le succès comme une affaire de famille, l'un ne pouvant carrément être cité sans l'autre. Il y a eu, pour n'en citer que quelques-uns, les frères Rahbani à Beyrouth, les jumelles Olsen aux États-Unis, les frères Sabbagh en Égypte ou encore les frères Hemsworth en Australie. Wissam et Issam Breidy faisaient partie de ces tandems-là. Liés par une amitié solide que de nombreux frères ne connaissent parfois pas, on les voyait souvent attelés à la réalisation de nouveaux projets dans lesquels ils se lançaient ensemble, toujours. Dans le domaine médiatique, on répétait aussi que Wissam Breidy n'avait d'autre ambition que de mettre en avant les succès de Issam, et que Issam Breidy ne pensait qu'aux moyens d'amplifier la réputation de son aîné. Jamais l'un d'eux n'a été interviewé sans que l'autre ne soit évoqué.


Avec la mort de Issam Breidy, c'est un binôme longtemps imaginé comme éternel qui a été désuni. Et c'est son compagnon de toujours que Wissam Breidy a perdu dans l'accident de voiture tragique sur le pont de Dora samedi soir. Mardi, c'est vers sa dernière demeure qu'il a porté son cercueil, refusant de confier cette mission à quelqu'un d'autre. Comment aurait-il pu, lui qui a été aux côtés de son frère à chaque instant de sa vie, à chaque étape de son parcours, à chaque échec, à chaque succès?

 

(Pour mémoire : Les tristes noces de Issam Breidy)

 

« Breidy Brothers »
Quand les deux frères Breidy naissent en pleine guerre, quatre ans de différence séparant leur venue au monde, leurs parents leur choisissent, pour les protéger, deux noms qui ne portent pas de connotation confessionnelle. À l'école et à Feytroun, leur village natal, ils sont connus pour leur calme et leur attachement à la famille. Leur maman Georgette dit souvent qu'elle souhaite à tout le monde d'avoir des enfants «aussi tendres avec leurs parents et aussi sobres». Elle sait pourtant que Issam, «le petit», est le «gros affectueux». Issam qui passe des heures seul à dessiner ou à écrire... En grandissant, c'est un homme sociable qui se dévoile, mais qui sait que c'est sur Wissam qu'il peut essentiellement compter. Quand on l'interroge à propos de ses amitiés, il répond sans trop penser: «J'ai un ou deux amis intimes, pas plus, et mon frère bien entendu.»


Lorsque Issam décide de poursuivre des études en théâtre à l'Université libanaise, à sa sortie du collège, son père s'oppose d'abord au projet, craignant pour le futur de son fils et critiquant «un métier peu sûr». Mais Wissam et sa mère sont là pour le soutenir. Et lorsqu'il décide de vivre une année en France, pour suivre une formation de théâtre, c'est toute la famille qui le soutient dans son projet. Cette année-là, Wissam est séparé de son frère pour la première fois. Il tente de se concentrer sur sa carrière et connaît ses premiers succès. Issam, de son côté, ne démérite pas. En 2001, il participe au télécrochet Studio el-Fan où le public l'écoute pour la première fois chanter du tarab, même s'il décide ensuite de se retirer de l'émission, dénonçant «une magouille dans les votes». Il se concentre alors sur sa carrière d'acteur et décroche un premier rôle dans un film de Youssef Chahine. Il devient populaire ensuite en tournant aux côtés de Patricia Nammour dans la version libanaise du sitcom Un gars, une fille, rebaptisé Adam et Ève, et apparaît dans de nombreux feuilletons comme Bayna Beyrouth wa Dubaï et Men Ahla Byout Ras Beyrouth.


Son frère, Wissam, devenu présentateur télé de renom, sait pourtant qu'une carrière de chanteur sied bien à Issam et qu'il en rêve. Il l'encourage à produire un premier titre, Hob Jnoun, en 2008. Ensemble, ils créent une boîte de production, Breidy Brothers, pour financer le projet qui bénéficie d'un clip. Wissam tient à soutenir son frère à fond dans cette première démarche et il va même jusqu'à apparaître à ses côtés dans le clip, qui connaît un succès relatif.

 

« Deux âmes en un corps »
Fort des excellentes relations qu'ils entretiennent dans le domaine du showbiz, le duo en profite pour se lancer dans les affaires et la restauration. Un premier club, Table 7, voit alors le jour en 2012 à Antélias, et un second resto-café, Kronfol, en 2014 à Dbayé. Issam se produit chaque vendredi et samedi au club qu'ils possèdent. Les deux frères sont ensemble au quotidien et ils s'entendent bien. «Nous avons toujours des opinions très divergentes à propos de tout, confie lors d'une interview Issam Breidy, mais c'est ce qui enrichit notre relation. Nous n'avons été et ne serons jamais ennemis.» Wissam, lui, de son côté, répète: «Nous avons été élevés sur des bases fraternelles solides et il n'y a pas de jalousie entre nous puisque nous appartenons à la même maison. L'argent ne prend jamais le contrôle dans notre relation. Nous n'avons pas peur des surprises car nous sommes prêts à y faire face ensemble. Prêts aussi à faire des sacrifices l'un pour l'autre.»


Fin 2014, Wissam Breidy ira même jusqu'à encourager son frère à s'essayer à la présentation d'émissions-télé. Il lui produit un programme et se charge de le proposer à diverses télévisions début 2015. Cette émission ne verra malheureusement jamais le jour.


Samedi soir, c'est de nombreuses promesses de projets ambitieux qui s'écroulent sous le pont de Dora. Issam, le passionné, le souriant, l'ambitieux, le talentueux, est parti. Et c'est un Wissam dévasté qui accourt à l'aube auprès de sa moitié, gisant inanimé sur un lit d'hôpital, un semblant de sourire aux lèvres. Il sait que rien ne sera plus comme avant. Ni la musique, ni la télé, ni les projets d'affaires, ni même les instants de fête et de joie qui continueront d'exister. Car Wissam Breidy a assuré mardi, lors des funérailles de son frérot parti trop tôt, qu'il compte bien célébrer la vie et vivre encore malgré sa peine immense et sa douleur sans nom. Vivre pour deux. Rêver pour deux. Deux âmes en un corps, deux frères pour une vie.

 

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