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Liban

« Être à la fois clown, psychologue, maman, devin, encyclopédie, policier... »

Dans la fiction « To Sir, With Love », Sidney Poitier est un jeune instituteur noir désireux de se rendre utile et d’aider les plus démunis. Il décide de se consacrer aux jeunes du quartier afin que ceux-ci ne deviennent pas des délinquants.

Tout enseignant est confronté, au moins à ses débuts, à la foule des élèves avec laquelle il doit apprendre à interagir et composer en permanence, à se réinventer chaque jour pour pouvoir exercer son autorité de chef sorcier en vue de diffuser son savoir.

« Le métier d'enseignant n'est pas un travail classique, c'est une mission et une vocation, on l'a dans la peau ou bien on ne l'a pas, » martèle Mireille, dont les parents sont d'anciens professeurs de lycée.
Ce domaine a beaucoup changé ces derniers temps. De plus en plus d'enseignants décrochent ou démissionnent carrément face à un groupe d'élèves de plus en plus hétérogène, dont les droits sont de moins en moins définis et dont les obligations se réduisent de plus en plus comme peau de chagrin au fur et à mesure qu'ils grandissent.

Chaque jour, une partie des éducateurs arrive bon gré mal gré à l'école et avoue ne plus aimer ce travail, qui était pourtant une passion pour eux à l'origine. Les problèmes se multiplient : la concurrence se fait de plus en plus étroite dans le domaine, les élèves sont de plus en plus difficiles à gérer et à satisfaire, les parents et des partenaires nouveaux (psychologues, orthophonistes, médiateurs, tuteurs...) entrent en jeu, rendant la marge de manœuvre de l'instituteur encore plus limitée dans sa classe, pourtant censée être son arène personnelle, relevant de sa seule autorité... Les pressions ont augmenté, les préparations grignotent sur le temps de repos de l'enseignant, qui emporte son travail à la maison et même durant les vacances. Le seul moment de répit est le mois d'août, qui n'en est plus un lorsque l'administration propose à l'enseignant un changement de niveau ou de cycle... Le mois de vacances se transforme aussitôt en temps de préparation des nouveaux cours...

Ingratitude et stress
« C'est un travail ingrat », se désole Karim, professeur de mathématiques. « Il nous est parfois demandé de faire des miracles et d'obtenir des résultats bien précis pour échapper aux critiques, comme si l'élève n'y était pour rien ! Notre part de travail intellectuel est dénigrée ». « Il est vrai que les parents se plaignent du fait qu'ils doivent avoir recours à des leçons particulières, parfois très onéreuses, mais le groupe de classe, pouvant atteindre 40 élèves, ne permet pas de remédier aux faiblesses de plusieurs élèves. Nous ne pouvons pas ralentir le rythme et nous attarder sur chaque notion. Sinon nous retardons la classe entière ! » souligne-t-il.

Pour Violette, qui enseigne la langue arabe, c'est la galère. Dans son école francophone, sa matière est haïe par les petits, souvent secondés par leurs parents quand il s'agit de rejeter la responsabilité de leur échec et de leur manque de motivation sur le « pauvre enseignant ». « L'échec dans la langue arabe est devenu chose ordinaire pour les enfants, habitués dès leur plus jeune âge à manier exclusivement les langues de Voltaire et de Shakespeare », confie-t-elle, résignée.

Noha, professeur d'histoire, célibataire, trouve qu'il est désormais demandé à l'enseignant d'être à la fois un clown, un animateur de spectacle, un psychologue, un devin, une maman, une encyclopédie ambulante, un correcteur électronique et un policier durant la surveillance des examens... le tout avec des salaires de misère, que seules des leçons particulières peuvent rendre relativement décents. « Mais encore faut-il enseigner une des matières de base dans les petites classes et dans une école privée fréquentée par les enfants de familles aisées, ce qui est loin d'être mon cas », ajoute-t-elle, d'un air désabusé.

Une passion
Ce métier dur pour certains ne l'est heureusement pas pour tous ! Une bonne partie des enseignants trouvent encore ce travail agréable et affirment qu'il constitue pour eux une passion.

Au bout de trois ans de métier dans une modeste école de banlieue, Nadine est devenue prof de SVT (sciences de la vie et de la Terre) dans un prestigieux collège catholique. Pour elle, enseigner requiert bon sens, attention et patience. « Bien sûr, les difficultés existent, mais les avantages de travailler dans l'enseignement aussi... », précise-t-elle. « Il est impératif d'aimer le contact avec les élèves et de vouloir accompagner les adolescents, d'être habité par cette passion de transmettre le savoir », ajoute-t-elle. « Un enseignant est censé aussi disposer naturellement d'une autorité et d'un certain charisme, sans pour autant être sévère en permanence et interdire tout dialogue ou discussion en classe ou terroriser les élèves afin d'avoir la paix », s'indigne-t-elle.

Nadine est reconnaissante envers son employeur qui l'a inscrite à la Sécurité sociale contrairement à son ancien patron, qui ne lui avait octroyé aucun de ses droits. Pour la jeune femme, très épanouie dans son travail, il est hors de question de changer de métier. Elle assure même bien gagner sa vie grâce aux heures supplémentaires assurées au collège et aux leçons particulières dispensées dans l'après-midi. Mais parfois le temps lui manque pour la préparation, les corrections des évaluations et aussi pour effectuer ses recherches incontournables pour garder ses cours à jour. Sa grande satisfaction, elle l'exprime fièrement, ce sont les élèves présentant des lacunes et qu'elle a réussi à intéresser. « Le sentiment de réussite avec un élève qui remonte la pente est inqualifiable, c'est un bonheur intense », lance-t-elle, les yeux brillants.
La difficulté principale reste donc, pour l'ensemble des enseignants, la gestion de la classe. Ils rêvent de reconnaissance et d'un soutien de l'administration et des parents.

Le métier d'enseignant reste l'une des pierres angulaires dans l'édifice de la société. C'est pourquoi l'amélioration des conditions de travail et l'épanouissement des éducateurs sont des passages obligés pour atteindre ce qui devrait être l'objectif ultime de toutes les institutions scolaires, sinon de chaque famille, de chaque individu et de chaque responsable : l'excellence dans l'éducation.

 

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