Lionel Bonaventure/AFP
Lui : Tu as vu ? Je l'ai acheté il y a 3 jours. J'ai vu. Je venais juste de m'allonger sur le lit, que j'avais vu. Sa main sur mon cou pendant que je regardais. Le tableau était carré. 80 x 80. Gigantesque. Un tigre qui portait un wife-beater Nike vert fluo, un très lourd appareillage de divers colliers en or de rappeur autour du cou, un walkman super 80's autour des oreilles, un Glock en diamant prêt à tirer dans la patte gauche, La Princesse de Clèves de Madame de Lafayette dans la droite. Vertigineux. Il souriait doucement, comme un gosse fier de lui. Nous nous sommes couchés en diagonale, cheveux contre cheveux. Lui : Je sais ce que tu vas dire, surprends-moi pour une fois. Moi : Je n'ai rien à dire, je pensais juste que les gens devraient savoir que tu as finalement beaucoup d'autodérision, je pense même l'instagramer, ce tableau. Lui : Je n'en ai rien à foutre des gens, tu veux boire quelque chose ? Moi : Un kir royal. Lui : Tu m'fatigues. Il ouvre un minibar encastré dans la tête du lit, je vois des douzaines de bouteilles de Perrier, nature, au citron, au citron vert, à l'orange, à la menthe, et des tas de mignonnettes. Lui : Je les vole dans les hôtels, ça fait rire Carlitta. Il me lance une mini-Moët. Dégueulasse. Moi : Tu n'est qu'un sale radin, oncle Picsou, François Fillon m'aurait ouvert un balthazar de Krug rosé, lui. Il éclate de rire en boxant gentiment mon visage de ses petites mains nerveuses. Je lui tire la langue. Lui : Je m'appelle Nicolas Sarkozy et je t'emmerde, donne-moi quelques semaines à peine et ton Fillon, ses Burlington rouges, je vais les lui faire bouffer, et vomir, et Juppé et Raffarin nettoieront, qu'est-ce que tu m'as apporté aujourd'hui ? Moi : Un Blue Ray et un livre. Lui : Lis-moi une phrase au hasard. Moi : Le hasard n'existe pas. Il caresse mes cheveux, je sens qu'il a envie de quelque chose, il est tellement prévisible, d'ailleurs il met gentiment et solidement ma main gauche sur son sexe ; effectivement, sous le short Adidas, il bande. Lui : Lis. Moi : OK. Il y a une étrange satisfaction à toucher le fond du désespoir ; l'excès du malheur procure une espèce de sécurité, havre de grâce pour l'âme naufragée qui n'ose plus croire.
Lui : Pas mal, je vais la faxer anonymement à Hollande, c'est de qui ? Ma main s'active sur son short, la sienne glisse sur les draps mauve Anne de Solène qu'on a choisis Carla et moi. Moi : C'est Julien Green. Lui : C'est un pédé, non, il se fait enculer, ha ha ha, t'as fait exprès ? Moi : Immortel, génie pur, édité dans la Pléiade de son vivant, et tu le résumes avec enculé, tu délires, il faut que tu arrêtes de penser à Fillon. Lui : Mais je plaisante, tu sais que je n'ai absolument rien contre les pédés, presque tous les amis de Carlitta sont pédés, c'est quoi le film ? Moi : La Sirène du Mississippi, de Truffaut. Il fait la moue, remonte, m'embrasse, même sa salive a un goût de Perrier, on devrait penser lui changer son aftershave, il enlève l'Adidas, ramène ma tête comme un torero vers son nombril, prend la télécommande. Moi : Si tu mets Barbelivien ou Cabrel, je me casse. Lui : Aime-moi, ta bouche est une route de la soie à elle toute seule. Je souris, je m'applique. Lui : Tu aimes mon sexe ? Moi : Oui. Lui : Tu aimes mes abdominaux ? Moi : Oui. Lui : Tu aimes mes biceps ? Moi : Oui. Lui : Tu aimes ma bouche ? Moi : Oui. Lui : Donc tu m'aimes ? Moi : Peut-être. Il éclate de rire. Lui : Un ancien président de la République de France fait sa Nabilla pour toi et tu dis peut-être ? ! Moi : C'est pas Nabilla, c'est Brigitte Bardot. Lui : On s'en fout, c'est pareil, aime-moi.
A lire en écoutant ça :
DE L'ABRUTISSEMENT PERVERS D'UN NIVEAU MALSAIN !
14 h 08, le 12 novembre 2014