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Économie - Liban - Enquête

La rentrée scolaire pèse lourd dans un Liban en crise économique

La rentrée des classes est synonyme de calvaire pour beaucoup de parents qui se retrouvent parfois asphyxiés par les dépenses engagées pour scolariser leurs enfants. En dehors des frais d'inscription et des fournitures spécifiques à chaque établissement scolaire, quelle enveloppe faut-il prévoir cette année pour équiper les écoliers ?

La rentrée des classes est synonyme de calvaire pour beaucoup de parents qui se retrouvent parfois asphyxiés par les dépenses engagées pour scolariser leurs enfants. En dehors des frais d’inscription et des fournitures spécifiques à chaque établissement scolaire, quelle enveloppe faut-il prévoir cette année pour équiper les écoliers ? Enquête...

« La rentrée scolaire, c'est : tu payes, tu paies, tu paies et tu paies », s'exclame Rania interrogée sur son sentiment général par rapport à cette période de l'année. Cette jeune maman semble plutôt bien placée pour aborder le sujet : ses deux filles sont en effet inscrites dans « une école de qualité ». Son petit dernier intègre, pour sa part, le grand jardin cette année. Les frais pour équiper tout ce beau monde dépassent la somme de 1 000 dollars, en dehors des diverses cotisations encaissées par l'établissement scolaire. Sur cette somme, 650 dollars sont uniquement destinés à payer les livres de ses deux aînées. À ce prix, l'exaspération de Rania peut effectivement se comprendre, même si cette dernière avoue que cette somme couvre l'intégralité des fournitures scolaires de ses enfants pour l'ensemble de l'année.


Il n'y a pourtant aucun phénomène inflationniste qui se cache derrière une telle note de frais. Selon les acteurs du secteur sollicités par L'Orient-Le Jour, le marché des fournitures scolaires augmente « légèrement d'une année sur l'autre, avec la régularité d'une horloge ». La crise économique que traverse le pays a d'ailleurs moins d'impact sur ce secteur que les fluctuations de la parité euro/dollar sur les livres scolaires libellés dans la monnaie de l'Union européenne, confirment-ils. Toujours est-il que la majorité des parents interrogés affirment être chaque année un peu plus scandalisés par les sommes qu'ils doivent débourser avant la rentrée.


Émile Tyan occupe le poste de directeur commercial à la librairie Antoine, un établissement qui dispose aussi d'un département dédié à la papeterie. Contacté par L'Orient-Le Jour, il concède que la période de la rentrée scolaire est pour son entreprise « de 30 % environ plus importante que celle de Noël » en termes d'activité et de chiffre d'affaires. Concernant le montant d'un panier moyen de la rentrée, il affirme que « tout dépend de trois facteurs qui peuvent faire passer les sommes engagées du simple au double ».
« L'homologation de l'établissement scolaire », dans un premier temps, implique que tout ou partie des manuels requis seront importés. Dans une moindre mesure, ce facteur peut également signifier que l'écolier aura plus tendance à s'équiper avec des fournitures de marque. Ensuite, le « nombre de programmes assurés par le programme scolaire », qui pourra éventuellement doubler le nombre de livres nécessaires, et, in fine, le total des frais déboursés. Enfin, l'avancement du niveau scolaire de l'enfant fera aussi proportionnellement grimper la facture. En tenant compte de tous ces paramètres, M. Tyan estime donc que le panier moyen de la rentrée est compris dans une fourchette qui va de 100 à 300 dollars pour les manuels scolaires, et environ 70 à 250 dollars pour les fournitures de classe. « La proportion est de 60 contre 40 % en faveur des livres », conclut-il, avant de rappeler que « les comportements changent d'un ménage à l'autre ».


Une observation qui se vérifie globalement sur l'ensemble des acteurs du secteur. Hala Mouawad est copropriétaire de la librairie Mouawad, située à Jal el-Dib.
Elle divise les paniers moyens des consommateurs en fonction de la qualité de leur établissement et donc du montant des frais de scolarité. Mme Mouawad encadre ainsi les dépenses allouées aux fournitures scolaires, manuels compris, entre 150 000 et 500 000 livres par enfant en fonction du type d'établissement scolaire. Pour le service marketing de Malik's Bookshop, une enseigne qui ne prend pas en charge les livres scolaires, l'enveloppe des dépenses liées aux autres fournitures est incluse dans une fourchette allant de 50 à 200 dollars par enfant.


Parmi les accessoires les plus onéreux, le livre et le cartable se disputent la première place, loin devant les cahiers et le stylo à plume. « Le prix moyen d'un cartable est de 70 000 livres », selon Élie Maksoud, propriétaire et gérant de la librairie Bookmark, à Adonis. Un prix qui peut toutefois facilement dépasser les 100 000 livres si le client veut opter pour un cartable à roulettes pour épargner le dos de son enfant. Pour les livres scolaires, il est difficile, là aussi, d'établir une moyenne. Ceci dit, il existe des ouvrages pédagogiques imposés par certains établissements aux élèves de 6e qui peuvent dépasser la barre des 70 dollars l'unité.
En parallèle, les gommes, les critériums, les taille-crayons et les stylos à bille comptent parmi les éléments les moins chers à acquérir pour compléter le contenu d'une trousse d'écolier (entre 500 et 2 500 livres en moyenne). Enfin, les fourchettes recueillies pour définir le prix moyen du panier de la rentrée sont les mêmes, à 50 000 livres près, aux quatre coins du pays.


Face à ces dépenses, les parents s'exécutent en serrant les dents. Ils sont cependant de plus en plus nombreux à s'inscrire sur les listes d'attente des fournisseurs de manuels scolaires d'occasion. D'un autre côté, les librairies s'organisent, elles aussi, pour répondre à cette nouvelle demande, pressentant un « changement de comportement des parents, y compris parmi les classes les plus aisées, qui ne veulent plus payer aussi cher », conclut Mme Mouawad. Mais selon les intéressés, l'offre n'arrive pas encore à suffisamment combler un marché en pleine expansion.


Une chose est sûre : les établissements scolaires sont pris en grippe par un nombre croissant de parents qui leur reprochent de surcharger les listes de la rentrée. À Tripoli, la gérante de la succursale locale de la librairie Antoine, Suzanne Sarkis, avoue par ailleurs que ses clients « ne complètent pas les listes et essaient de plus en plus de s'entraider pour limiter les dépenses ». Enfin pour Norma, une jeune grand-mère qui appréhende déjà les difficultés que rencontrera sa propre fille pour scolariser son enfant dans les prochaines années, « les parents doivent arrêter de râler dans leur coin et s'unir pour faire pression sur les écoles ». Une initiative dont l'évidence contraste durement avec la complexité de sa mise en œuvre en l'état actuel des choses.

 

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« La rentrée scolaire, c'est : tu payes, tu paies, tu paies et tu paies », s'exclame Rania interrogée sur son sentiment général par rapport à cette période de l'année. Cette jeune maman semble plutôt bien placée pour aborder le sujet : ses deux filles sont en effet inscrites dans « une école de qualité ». Son petit dernier intègre, pour sa part, le grand jardin cette année....

commentaires (1)

En bref ,la rentrée scolaire devient un luxe avec des fournitures inabordables , et des scolarités surprise .

Sabbagha Antoine

07 h 22, le 13 septembre 2014

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Commentaires (1)

  • En bref ,la rentrée scolaire devient un luxe avec des fournitures inabordables , et des scolarités surprise .

    Sabbagha Antoine

    07 h 22, le 13 septembre 2014

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