Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - Le point

Quand un pays devient amok

Dans la cacophonie des nations (car il paraîtrait inconvenant de parler de concert des nations), la Libye détient le désolant privilège des « premières », la toute récente étant l'interdiction faite à ses avions de combat d'emprunter l'espace aérien – no fly zone en anglais. Décision mort-née, des chasseurs-bombardiers entreprenant, quelques heures plus tard, de pilonner le siège de la radio des Ansar ach-charia, à Benghazi.
Assaut contre le bâtiment du Conseil général national (Parlement), combats aux abords de l'aéroport, série d'accrochages entre des groupes de militaires rebelles et des islamistes : les événements des trois derniers jours semblent avoir eu pour effet de secouer le monde, jusqu'alors insensible au drame que vit la défunte Jamahiriya depuis la chute de Mouammar Kadhafi, en octobre 2011. La Tunisie a aussitôt déployé 5 000 soldats à sa frontière nord-est, un commando algérien a gagné Tripoli pour exfiltrer l'ambassadeur et, en Sicile, les marines sont sur pied de guerre, prêts à embarquer à bord d'appareils VTOL (vertical takeoff and landing) dont les moteurs tournent au ralenti. Échaudés par les expériences passées, on n'ira pas plus loin. Pour l'instant.
Mais qui donc est cet ex-général Khalifa Haftar, auteur de l'inattendu coup de pied qui affole la fourmilière libyenne? Un des tombeurs du défunt « guide », contre lequel il a fait le coup de feu à l'instigation, prétend-il, des Américains, par ailleurs virulent critique des nouveaux maîtres du pays, qui le qualifient de « hors-la-loi », ennemi juré des islamistes – des terroristes, dit-il – et allié des tribus de Zenten, région dont il est lui-même originaire. En février dernier, il était apparu à la télévision, la poitrine bardée de décorations, pour dénoncer la mainmise des extrémistes religieux sur l'appareil étatique, qu'il jure de libérer de cette emprise maléfique.
Sur la chaîne locale al-Ahrar, un certain Moukhtar Farnana, présenté comme le porte-parole des rebelles, a annoncé la dissolution du CGN, remplacé par une assemblée de 60 membres ; quant au présent gouvernement, dirigé depuis le début du mois par l'homme d'affaires Ahmad Maitig, il devra se contenter d'expédier les affaires courantes en attendant la désignation d'un nouveau Premier ministre. Le coup de force du week-end dernier ? Une opération « décidée par le peuple » parce que « notre patrie ne peut servir d'incubateur au terrorisme », a affirmé l'officier.
Le drame de la Libye porte un nom : les milices. Elles ont essaimé dans toutes les directions, saisi et géré un temps des terminaux pétroliers, kidnappé un chef de gouvernement en exercice, occupé des ministères, assassiné un ambassadeur des États-Unis et consolidé leur contrôle de plusieurs régions. En deux ans, ces groupes se sont formés sur base de l'appartenance ethnique ou géographique, ou même de la religion. Le problème s'est aggravé quand l'État, ou ce qu'il en reste, a décidé de les incorporer dans les forces de l'ordre. C'est ainsi qu'aujourd'hui, la Libye se trouve confrontée à une situation proprement ubuesque, avec une police composée d'agitateurs professionnels et un embryon de rescapés de l'ancien régime qui prétendent réformer l'irréformable. De quoi réveiller chez les Libanais certains souvenirs.
Les puissances qui, de longues années durant, ont soufflé sur les braises de la révolution commencent seulement à sentir les effets des brûlures. Sous la plume d'Owen Jones, le très respectable Guardian rappelait fort à propos, il y a deux mois, la mise en garde formulée à la veille de l'invasion de l'Irak par Colin Powell, alors secrétaire d'État, à l'adresse de George W. Bush : « Vous allez être l'heureux propriétaire de 25 millions d'hommes, de leurs espoirs, de leurs aspirations, de leurs problèmes. » Bagdad, c'est loin. Et Kaboul. Et Tripoli. Toutes trois abandonnées à leur triste sort, sans aucune chance de voir l'Oncle Sam y envoyer ses vaillants redresseurs de torts. Quant à Damas...
Le Parlement est illégitime, accuse le colonel Fernana. À juste raison : élue en juillet 2012 pour un mandat provisoire de dix-huit mois, l'Assemblée a autoprorogé son mandat jusqu'à décembre de l'année en cours (cela vous rappelle-t-il un précédent ?), braquant contre elle de larges franges de la population. Il faut espérer sans trop y croire que l'heure a sonné de rendre compte d'une gestion de la chose publique pour le moins désastreuse. Car en ces temps maudits des dieux, il existe 15 millions d'armes à feu qui transitent à partir de là vers non moins de quatorze contrées d'Afrique et même jusqu'en Syrie, selon un rapport établi par une commission d'experts onusiens.
Frère Mouammar, reviens ! Ils sont devenus plus fous que toi.

Dans la cacophonie des nations (car il paraîtrait inconvenant de parler de concert des nations), la Libye détient le désolant privilège des « premières », la toute récente étant l'interdiction faite à ses avions de combat d'emprunter l'espace aérien – no fly zone en anglais. Décision mort-née, des chasseurs-bombardiers entreprenant, quelques heures plus tard, de pilonner le...
commentaires (3)

QUAND IL DEVIENT AMOK... C'EST QU'IL EST DANS LE "KOMA"... ( COMA ) !

LA LIBRE EXPRESSION

12 h 51, le 21 mai 2014

Tous les commentaires

Commentaires (3)

  • QUAND IL DEVIENT AMOK... C'EST QU'IL EST DANS LE "KOMA"... ( COMA ) !

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 51, le 21 mai 2014

  • "Frère Mouammar, reviens ! Ils sont devenus plus fous que toi." ! Pourquoi donc ? Et pourquoi pas Hitler et Goebbels alors : "La lumière sèche, crée l’âme la meilleure. Alors - qu'on - veut revenir au temps des âmes humides." !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    11 h 19, le 20 mai 2014

  • Marvelous Merville ! Haftar etait le general que Kaddafi avait envoye au Tchad lors de l'invasion de ce pays par lui , et comme l'operation Tchad avait echoue , khaddafi l'a abandonne , haftar s'est fait recupere avec 800 de ses hommes par les us , qui l'ont forme et loge aux us . Il a toujours sa residence aux us . On ne reviendra pas sur le fiasco de bhl et sarko , par pudeur de pas trop les charger , les pauvres idiots utiles d'une politique desastreuse , mais on dira comme vous le faites sous entendre que ce genre de scenario devrait nous donner a reflechir pour que notre region du M/O ne sombre pas dans dans le meme chaos . En Lybie , pas de chiites ni de chretiens , que des tribus ethniques du meme "bord" , et pourtant .......

    FRIK-A-FRAK

    10 h 46, le 20 mai 2014

Retour en haut