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À La Une - Discrimination

Ouganda : le président promulgue une loi anti-homosexualité controversée

Des ONG reconsidèrent leurs aides.

Le président ougandais Yoweri Museveni promulguant la loi controversée durcissant la répression de l'homosexualité. REUTERS/James Akena

Au risque d'irriter son allié américain, le président ougandais Yoweri Museveni a promulgué lundi une loi controversée durcissant la répression de l'homosexualité, disant rejeter les diktats de l'Occident.

"Le président vient de signer la loi anti-homosexualité (...) La loi entre de ce fait en vigueur", a déclaré à l'AFP une porte-parole de la présidence, Sarah Kagingo.

Les relations homosexuelles sont déjà passibles de la prison à vie en Ouganda mais cette législation, adoptée à une écrasante majorité le 20 décembre par le Parlement, interdit notamment toute "promotion" de l'homosexualité et rend obligatoire la dénonciation de quiconque s'affichant homosexuel(le). Elle a suscité des critiques virulentes de la part des défenseurs des droits de l'homme et des partenaires occidentaux de l'Ouganda, même si ses dispositions les plus controversées - peine de mort en cas de récidive ou de rapport avec un mineur ou en se sachant porteur du virus du sida - ont été abandonnées.

Washington, allié-clé de Kampala, a notamment averti - sans autre précision - que cette loi "compliquerait (ses) relations" avec l'Ouganda et Londres s'est interrogé sur "la conformité de la loi avec la Constitution et les obligations internationales de l'Ouganda, estimant qu'elle allait "endommager la réputation internationale" du pays.

La conseillère à la sécurité nationale de Barack Obama, Susan Rice, a estimé lundi sur son compte Twitter que cette promulgation constitue "un triste jour pour l'Ouganda et le monde". "Personne ne devrait subir des discriminations, ou être puni pour qui on est ou qui on aime", a t-elle déclaré.

De son côté, le porte-parole de M. Obama, Jay Carney, a dit "regretter" que M. Museveni ait "fait faire un pas en arrière à l'Ouganda" en promulguant cette loi "exécrable". "Comme l'a dit le président Obama, cette loi n'est pas seulement une insulte et un danger pour la communauté homosexuelle en Ouganda, elle donne une mauvaise image de l'engagement du pays envers les droits de l'homme, et portera préjudice à la santé publique, dont les mesures de lutte contre le VIH et le sida", a prévenu M. Carney.

"Nous allons continuer à presser le gouvernement ougandais d'abroger cette loi exécrable et à argumenter en faveur de la protection des droits de l'homme (...) en Ouganda et dans le monde", a ajouté le porte-parole dans un communiqué.

La chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton a rappelé ces derniers jours à l'Ouganda "ses obligations contraignantes en matières de droits de l'Homme". "Cette loi va officialiser la discrimination et vraisemblablement encourage le harcèlement et la violence contre les individus en raison de leur orientation sexuelle", a estimé la Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme Navi Pillay.

 

Les ONG reconsidèrent leurs aides à l'Ouganda
Premier pays au monde à légaliser le mariage homosexuel, en 2001, les Pays-Bas ont gelé le versement d'une aide annuelle de sept millions d'euros destinée au renforcement du système judiciaire ougandais, a précisé le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.

"Il est clair que si le système judiciaire doit appliquer ce genre de loi, nous ne souhaitons pas collaborer", a déclaré Liliane Ploumen, la ministre du Commerce international et de l'Aide au développement, au micro de la télévision publique néerlandaise NOS. L'aide néerlandaise aux projets sociaux en Ouganda, soit quelque 16 millions d'euros par an, n'est pas concernée par la suspension car les Pays-Bas ne souhaitent pas "pénaliser encore plus les citoyens et les homosexuels ougandais". Les Pays-Bas ont l'intention de proposer à leurs partenaires de l'Union européenne de prendre des sanctions contre l'Ouganda à l'échelle européenne, a précisé la ministre.

Des ONG internationales ont appelé les partenaires de l'Ouganda à reconsidérer leur aide et, lundi, le Danemark a annoncé qu'environ 6,3 millions d'euros d'aide à des agences gouvernementales ougandaises seraient redirigés vers des initiatives du secteur privé et des ONG et qu'il en serait ainsi à l'avenir.

Le président ougandais a estimé, depuis sa résidence officielle d'Entebbe, à 35 km de Kampala, que les bailleurs qui ne veulent plus aider son pays pouvaient "garder leur aide". "Les étrangers ne peuvent pas nous donner des ordres. C'est notre pays", a-t-il déclaré après avoir paraphé la loi, "je conseille aux amis occidentaux de ne pas faire (du sujet) un problème" car "ils ont beaucoup à perdre".

"Imposer des valeurs sociales d'un groupe à notre société, c'est de l'impérialisme social. Maintenant vous nous dites que nous devrions vivre comme vous. Pas du tout!", a poursuivi le président Museveni, accusant "des groupes occidentaux de recruter des (futurs) homosexuels dans les écoles".

 

Les homosexuels, des "malades"
Le président ougandais, au pouvoir depuis 1986 et chrétien évangélique à la piété affichée, avait initialement qualifié les homosexuels de "malades" et renoncé à promulguer cette loi car il est "mal de punir une personne parce qu'elle est anormale". Il avait finalement annoncé avoir changé d'avis, un groupe de "scientifiques" consulté lui ayant assuré que l'homosexualité était "comportementale, pas génétique".

Il a accusé une partie des homosexuels de l'être "pour des raisons financières", les autres l'étant devenus par un "mélange d'inné - des éléments génétiques - et d'acquis". "Aucune étude ne montre que vous pouvez être homosexuel par nature", a-t-il poursuivi. "Oui génétiquement, il y a (chez les homosexuels) quelques petites choses qui ne sont pas dans l'ordre, mais si ils ne sont pas élevés en ce sens ou encouragés (à être homosexuels) alors ils seront normaux", a-t-il expliqué: "L'éducation étant la principale source de l'homosexualité, alors la société peut faire quelque chose pour décourager les tendances. C'est pourquoi, j'ai accepté de promulguer la loi".

Lundi, il a également fustigé les autres pratiques "occidentales" particulièrement "le sexe oral". "La bouche sert à manger, elle n'est pas faite pour le sexe", a-t-il lancé, assurant que "poser sa bouche là" pouvait entraîner la transmission de vers dans l'estomac.

Les homosexuels sont l'objet de persécutions et de violences en Ouganda, pays où l'homophobie est largement propagée par les très influentes Églises évangéliques.

M. Museveni avait déjà début février promulgué une loi anti-pornographie, prohibant notamment les accoutrements "provocateurs", interdisant d'antenne les artistes légèrement vêtus et surveillant de près les sites consultés par les internautes.

Lundi, le député David Bahati, auteur de la loi anti-homosexualité, a estimé que sa promulgation "était le moment que le monde attendait" et a remercié M. Museveni pour "sa décision courageuse malgré les pressions de certaines organisations occidentales". En 2011, David Kato, figure de la cause homosexuelle en Ouganda, avait été battu à mort chez lui, après la parution dans un magazine de son nom et ceux d'autres homosexuels sous le titre "Pendez-les".

 

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commentaires (4)

Il lui faudrait des séances de traitement.... de toutes spécialités et de toutes sortes !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

13 h 34, le 25 février 2014

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Commentaires (4)

  • Il lui faudrait des séances de traitement.... de toutes spécialités et de toutes sortes !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    13 h 34, le 25 février 2014

  • Un véritable homophobe et donc Raciste, cet Ougandais !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    10 h 06, le 25 février 2014

  • CONTRE LES GORILLES ET LES CHIMPS AUSSI ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 00, le 25 février 2014

  • On voit ici les limites de la démocratie prise à son propre piège: elle peut devenir la dictature de la majorité.On a justifié l'adoption de la loi du "mariage" homosexuel en France par le fait qu'elle était voulue par la majorité des français (une courte majorité d'ailleurs, et qui s'était inversée le temps que la loi soit votée). Ici, on a une "majorité écrasante " en faveur de la répression. Où est donc la vérité si les urnes ou les sondages en sont la source? Ceci dit, je répète que l'Etat n'a aucun droit à s’immiscer dans la vie privée des gens. La relation entre un homme et une femme, entre deux hommes ou entre deux femmes est quelque chose de personnel et l'Etat n'a pas à légiférer là-dessus. Ni pour réprimer,ni pour célébrer. Seule une relation à caractère durable, susceptible de créer une famille (donc entre un homme et une femme) - et c'est la propriété principale du mariage ("jusqu'à ce que la mort nous sépare"!), le concerne, la famille étant la cellule de base de la société.

    Yves Prevost

    07 h 27, le 25 février 2014

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