Rechercher
Rechercher

Culture - Mémoire de l’art

Le fameux salon de Gertrude Stein reconstitué chez Ashkal Alwan

Ce n'est pas à proprement parler une exposition ni vraiment une installation que propose Ashkal Alwan, mais plutôt une reconstitution – édifiante ! – du célèbre salon de Gertrude Stein, rue de Fleurus, à Paris.

Retour sur l’avant-garde de l’art moderne dans le salon du 27, rue de Fleurus, reconstitué chez Ashkal Alwan.

C'est à une immersion au tout début du siècle dernier que vous convient Jalal Toufic et Anton Vidokle, les deux artistes commissaires qui pilotent la programmation du chapitre 2 du Home Workspace d'Ashkal Alwan pour la saison 2013-14. Et, plus précisément, à la visite de l'un des salons les plus avant-gardistes de Paris qu'ils vous entraînent. Celui de la collectionneuse américaine Gertrude Stein.
Poétesse, écrivaine, dramaturge, étudiante en médecine de la première génération et féministe, elle fut pionnière dans plus d'un domaine. Ayant abandonné ses études avant d'obtenir son diplôme, pour rejoindre en 1904 l'un de ses frères, Leo, installé dans la capitale française, elle y jouera un rôle de catalyseur de la littérature et de l'art moderne. Ensemble, ils fréquentent l'avant-garde artistique et littéraire alors en pleine effervescence et collectionnent les valeurs montantes de l'école de Paris. Mais alors que Leo reste plus traditionaliste dans ses choix, Gertrude Stein défriche, elle, les talents les plus audacieux, ceux qui marqueront de leur empreinte l'art du XXe siècle. Elle sera ainsi l'une des premières à défendre le cubisme et à pressentir le génie de Picasso. Ce dernier fera d'ailleurs d'elle, en 1906, un portrait devenu célèbre qui se trouve aujourd'hui au Metropolitan Museum de New York. Ce même portrait dont on retrouve une reproduction, parmi d'autres de la période dite bleue de Picasso, dans la reconstitution beyrouthine du fameux salon du 27, rue de Fleurus de Miss Stein.

Une collection fondatrice de l'art moderne
Recomposé, au sein d'un énorme cube installé dans le vaste espace d'Ashkal Alwan* – « avec des meubles et objets exclusivement dénichés à Beyrouth », signalent les organisateurs – ce salon (à la reconstitution aussi fidèle que possible à l'original avec sa cheminée, son ameublement d'époque et les peintures recouvrant l'ensemble de ses murs, le tout sur fond de chansons grésillantes des années folles...) rassemble des copies (évidement !) de quelques-unes des toiles majeures de l'art moderne.
Des peintures fauves et cubistes qui marquèrent un tournant décisif dans la perception artistique des générations à venir. À l'instar de La femme au chapeau de Matisse (acquise en 1905 lors du Salon des Indépendants où elle avait été vilipendée par la critique), du Nu bleu du même peintre, du Portrait de Madame Cézanne ou encore et surtout des œuvres cubiques de Picasso et Braque...
Le premier intérêt de cette reconstitution (duplicata d'une autre installée de manière permanente à New York), c'est qu'elle fait ressentir le choc qu'a dû produire cet art moderne au tout début d'un XXe siècle dominé par une atmosphère bourgeoise et compassée. Son autre intérêt est qu'elle donne à voir, côte à côte, des reproductions d'œuvres aujourd'hui dispatchées entre les différents grands musées du monde (MoMA ; Metropolitan ; Centre Pompidou, Musée des beaux-arts de Boston...).
Enfin et surtout, elle éclaire l'importance du soutien de Gertrude et Leo Stein aux artistes de leur temps et montre comment ce duo a largement contribué à lancer les courants artistiques novateurs. Miss Stein, en particulier, qui ouvrait son salon tous les samedis soir dans le but de partager sa collection avec toute personne intéressée. Faisant ainsi de son domicile quasiment le précurseur des galeries d'art !
Car c'est de cette sélection d'art européen constituée par les Stein que vont d'abord s'inspirer leurs amis collectionneurs américains. Qui, à leur tour, feront connaître et apprécier, outre-Atlantique, les Cézanne, Picasso, Matisse et autres modernistes... À travers des expositions d'abord, comme celle de l'Armory Show organisée en 1913 à New York, puis grâce à Alfred Barr, directeur et fondateur au début des années 30, du MoMA de New York. Lequel constituera les fonds de ce premier musée d'art moderne au monde avec les chefs-d'œuvre de cette avant-garde née en Europe. De laquelle émergera, plus tard, l'expressionnisme abstrait des américains.
C'est donc, d'une certaine façon, un récit visuel de l'élaboration de l'histoire de l'art moderne, dont la collection Stein fut en quelque sorte la pierre angulaire que narre cette exposition intitulée « Portraits And Prayers du salon de Fleurus ».
À découvrir jusqu'au 8 février.

*Jisr el-Wati, rue 90, imm. 110, 1er étage. Tél. 01-423879.

 

C'est à une immersion au tout début du siècle dernier que vous convient Jalal Toufic et Anton Vidokle, les deux artistes commissaires qui pilotent la programmation du chapitre 2 du Home Workspace d'Ashkal Alwan pour la saison 2013-14. Et, plus précisément, à la visite de l'un des salons les plus avant-gardistes de Paris qu'ils vous entraînent. Celui de la collectionneuse américaine...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut