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À La Une - Scandale

Corruption : des têtes tombent au gouvernement turc

Les ministres de l'Intérieur, de l'Economie et de l'Environnement contraints de démissionner.

Photo combo montrant les ministres de l'Intérieur Muammer Güler et de l'Economie Zafer Caglayan. Photos AFP

Trois ministres clé du gouvernement de Recep Tayyip Erdogan ont été contraints à la démission mercredi, touchés par le vaste scandale de corruption qui fait vaciller l'élite islamo-conservatrice turque au pouvoir depuis 2002.

Les ministres de l'Intérieur Muammer Güler et de l'Economie Zafer Caglayan, deux personnalités proches de M. Erdogan, ont annoncé l'un après l'autre avoir quitté leur poste dans des termes à peu près similaires, dénonçant un "complot" visant à déstabiliser le régime islamo-conservateur.

"Je quitte mon poste de ministre de l'Economie pour que toute la lumière puisse être faite sur cette ignoble opération qui vise notre gouvernement", a souligné M. Caglayan dans un communiqué.
M. Güler a lui expliqué avoir démissionné pour "déjouer un hideux complot".

Ces deux hommes sont au coeur du scandale financier qui agite la Turquie, leurs fils faisant partie des 24 suspects inculpés et placés en détention au cours du weekend à Istanbul. Ils avaient été arrêtés par la police le 17 décembre, lors d'opérations spectaculaires, dans le cadre d'une vaste enquête anticorruption qui fait trembler l'élite au pouvoir.

Quelques heures plus tard, c'est le ministre de l'Environnement Erdogan Bayraktar qui a à son tour annoncé son départ du gouvernement.
Le fils de ce ministre a également été inculpé, mais laissé en liberté, dans le cadre d'un autre volet de l'enquête judiciaire en cours, lié cette fois à des marchés publics immobiliers.

Un autre ministre, celui des Affaires européennes, Egemen Bagis, est lui aussi la cible d'une procédure judiciaire pour son implication présumée dans le scandale.

Ces quatre ministres ont pour l'instant nié toutes les accusations.

M. Erdogan est rentré à Ankara mardi soir après une visite de deux jours au Pakistan et a rapidement procédé à un remaniement ministériel déjà prévu dans la perspective des élections municipales le 30 mars.
Accueilli par des milliers de partisans à l'aéroport de la capitale sous le froid, M. Erdogan a répété la thèse du "complot" qu'il ne cesse d'évoquer depuis la vague d'arrestations de la semaine dernière.
"Qu'ils continuent à nous tendre des pièges (...) Nous ne nous ferons pas prendre. Nous continuerons dans la voie que nous estimons être la bonne", a-t-il martelé dans une allocution à la foule qui scandait : "La Turquie est fière de toi !".

Erdogan contesté dans son camp
Il a aussi dénoncé les attaques de la confrérie musulmane de Fethullah Gülen, qu'il accuse implicitement d'avoir ourdi ce complot, visant selon lui, à détruire les avancées politiques et économiques réalisées par son gouvernement ces dix dernières années.

Mis en cause en juin par une vague de contestation sans précédent à travers la Turquie pour ses dérives autoritaires et islamistes, M. Erdogan est cette fois contesté dans son propre camp, par la confrérie Gülen sur laquelle il s'était jusque-là appuyé pour conquérir et fortifier son autorité et se débarrasser de l'influence politique de la puissante armée, gardienne des principes laïques.

Longtemps larvée, cette guerre fratricide se joue désormais sur la place publique et pourrait modifier la donne politique nationale, à l'orée des élections municipales et présidentielle prévues en 2014.
L'enjeu est d'autant plus important pour le Premier ministre que ce scrutin local, où son parti faisait figure de grand favori, doit lui servir de tremplin pour l'élection présidentielle de l'été 2014.
M. Erdogan n'a pas encore déclaré ses intentions mais, contraint par les règles en vigueur au sein du Parti de la justice et du développement (AKP) à quitter la tête du gouvernement aux législatives de 2015, il ne fait plus guère mystère de vouloir briguer le poste de chef de l'Etat, qui sera élu pour la première fois au suffrage universel direct.

Signe du divorce avec la confrérie Gülen, M. Erdogan a lancé une purge sans précédent dans les rangs de la haute hiérarchie policière, où les Gülenistes sont très présents.
Une centaine de haut gradés ont ainsi été limogés en une semaine à travers le pays.
Le scandale a aussi eu des répercussions sur l'économie turque, en perte de vitesse après plusieurs années de forte croissance.

La banque centrale turque a décidé mardi d'injecter jusqu'à 6 milliards de dollars de liquidités sur les marchés d'ici à février pour défendre la livre turque, fragilisée par la situation en Turquie et la conjoncture mondiale.


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