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Liban - Associations

Un repas chaud pour fêter Noël dignement avec Rifaq el-Darb

Comme chaque année, l'association Rifaq el-Darb organise un déjeuner de Noël le 28 décembre pour apporter un peu de chaleur en cette période de fêtes à des personnes âgées et démunies.

Les têtes blanches réunies pour le repas.

Le pas lourd, un groupe de seniors avancent l'un après l'autre vers le grand portail de l'église Saint-Joseph. Leurs visages, sur lesquels le temps a creusé son passage, laisse transparaître des existences chargées d'émotions, de rires, de chagrins, de passions et de peines.


Souvent, ces gens n'ont besoin que d'un peu de compagnie, d'une âme généreuse qui serait prête à passer un peu de temps à leurs côtés. C'est essentiellement pour les aider à fuir leur solitude que l'association Rifaq el-Darb prend soin, depuis une vingtaine d'années, des personnes du troisième âge.


Comme chaque dernier samedi du mois, ils sont plus de soixante à se rassembler dans l'ancien bâtiment de l'Université Saint-Joseph. Après une petite prière, ils se réunissent autour d'un repas chaud et convivial, souvent leur seul vrai repas du mois. Certains viennent seuls, d'autres viennent entre amis, d'autres encore sont accompagnés de tous les membres de la famille.


Grâce à des amies, Jeannette a découvert l'association il y a quelques mois. Le regard triste, dans un arabe hésitant, elle explique: «Quand j'ai assez d'argent, je viens en voiture, sinon je dois venir à pied de Bourj Hammoud.» «C'est le prix à payer pour bien manger», lâche-t-elle.


Il y a quatre ans pourtant, Jeannette vivait bien. Elle travaillait dans un restaurant à quelques minutes de chez elle, mais celui-ci a changé d'emplacement et depuis, elle peine à retrouver un emploi. Elle a du mal à retenir les larmes qui lui perlent aux paupières lorsqu'elle parle de son fils. «Cela fait trente ans qu'il est malade, et moi je n'ai personne pour m'aider à subvenir à mes besoins! Je viens ici pour manger et parfois, quand il y a des restes, j'en apporte à mon fils», poursuit-elle d'une voix qui chavire.

 

Des causes identiques
Ce même discours est malheureusement récurrent chez les têtes blanches que Rifaq el-Darb aide. Le chômage, une retraite mal rémunérée et difficile, ou encore l'incapacité de leurs proches à les soutenir: l'histoire se répète et les principales causes de leur détresse sont identiques.


C'est pour compenser ces manques que les jeunes bénévoles de Rifaq el-Darb interviennent auprès des personnes âgées. Karen Kassis, 17 ans, est venue assister les têtes banches dans le cadre d'une activité des jeunes en marche du groupe Notre-Dame de Jamhour. «C'est la première fois que je participe à un repas de Rifaq el-Darb. C'est une expérience très bénéfique pour nous et pour les personnes âgées. Elle nous a appris à penser aux autres. C'est surprenant de voir qu'il y a des gens qui habitent si près de nous et qui vivent si différemment!», commente-t-elle. «On a tendance à oublier ces personnes sous prétexte qu'elles sont âgées», ajoute Sarah Saroufim, une des camarades de Karen. «On dit qu'en vieillissant, les gens redeviennent des enfants, et c'est vrai! On a l'impression qu'ils ont tout le temps besoin que quelqu'un reste à leurs cotés», ajoute-t-elle. Parce que, en vieillissant, la solitude pèse sans doute autant que l'absence de moyens, surtout en période de fêtes. Ces repas sont pour tout le groupe dont s'occupe Rifaq-el Darb l'occasion d'une évasion salutaire lors d'une journée, d'une récréation, de retrouvailles, et d'échange d'histoires et de souvenirs. Une occasion qu'ils sont nombreux à attendre avec impatience.


Le 28 décembre, d'autres jeunes seront présents toute la journée afin d'égayer la Noël de neuf cents personnes âgées. Un repas au restaurant Casino Assaf à Kattine, dans le Kesrouan, est prévu. Une prière, une distribution de cadeaux, qui est un must, et une animation assurée par le chanteur professionnel Doumit Khoury seront aussi au programme.
«Nous avons des sponsors et une chaîne d'amis qui financent une partie de nos activités, mais nos revenus principaux viennent des calendriers que nous vendons à 25000 LL», précise Joe Taoutel, président de l'association. «Cette année, notre objectif est de vendre au moins mille calendriers. Il y a quelques années, l'association avait les moyens d'organiser deux repas par mois, aujourd'hui, par manque de financement, on n'en offre plus qu'un seul», explique-t-il.

 

Les activités de l'association
Comme le précise le frère Aoun, «l'association ne nourrit pas uniquement les têtes blanches physiquement, mais elle s'occupe d'eux psychologiquement aussi et prend soin de nourrir également leurs âmes». Au moins une fois par mois, les bénévoles rendent visite aux personnes âgées pour éviter qu'elles se sentent seules et pour contribuer de la sorte à leur assurer un bien-être et un environnement sain.


Nohad est handicapé. Il sort rarement et ne participe donc pas aux repas que Rifaq el-Darb organise. Dès qu'elle le peut, Aziza passe le voir dans son appartement à Sodeco, un trois-pièces avec pour seuls meubles un lit, une commode, un petit écran, un frigo et quelques chaises en plastique. Elle lui apporte des plats qu'elle cuisine elle-même et lui tient compagnie pendant quelques heures. Il a le pied enflé posé sur la semelle d'un vieux soulier déchiré, les cheveux en bataille et la barbe mal entretenue. Depuis plusieurs années déjà, Nohad habite seul. «J'ai pourtant été riche et bien entouré autrefois, avant d'être licencié du ministère du Tourisme à cause de mon handicap», indique-t-il en sortant quatre chéquiers vides qu'il garde avec soin dans un tiroir. Ses proches avec qui il a vécu vingt-sept ans, finançant leurs études et leurs loisirs, l'ont délaissé. «J'ai perdu espoir. Je suis fatigué.», murmure-t-il, abattu.


Ils sont des milliers à vivre dans des situations semblables à celle de Nohad. Petit à petit, les bénévoles de Rifaq el- Darb comblent leur solitude et prennent la place de leurs familles. À part les retrouvailles mensuelles, les visites à domicile et les repas de gala, l'association organise entre autres des colonies de vacances, des excursions et des pèlerinages adressés aux personnes du troisième âge. De quoi leur permettre autant que possible de mener une vie normale et d'échapper brièvement à la solitude.

Le pas lourd, un groupe de seniors avancent l'un après l'autre vers le grand portail de l'église Saint-Joseph. Leurs visages, sur lesquels le temps a creusé son passage, laisse transparaître des existences chargées d'émotions, de rires, de chagrins, de passions et de peines.
Souvent, ces gens n'ont besoin que d'un peu de compagnie, d'une âme généreuse qui serait prête à passer un peu...

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