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À La Une - Gaza

Souriant ou menaçant, le Hamas offre deux visages

Israa el-Moudallal dans son bureau de presse du Hamas à Gaza. Mohammad Abed/AFP

Dans le bureau de presse du gouvernement, une fraîche et candide jeune porte-parole s’apitoie en anglais sur le sort de la population. Dehors, des hiérarques barbus, mine renfrognée, haranguent forces de sécurité et combattants cagoulés : à Gaza, le Hamas présente deux visages.


Portant un voile de couleur vive, Israa el-Moudallal, 23 ans, tout sourire, confie avec une ingénuité désarmante avoir encore beaucoup à apprendre sur sa fonction de porte-parole dédiée aux médias occidentaux, inaugurée au début du mois. « Ils veulent que je leur donne la position du gouvernement palestinien (du Hamas à Gaza). En fait, je ne sais pas », avoue-t-elle, dans un accent à couper au couteau de Bradford, dans le nord de l’Angleterre, où elle a vécu plusieurs années avec sa famille lorsque son père, Walid al-Moudallal, politologue à l’Université islamique de Gaza réputé proche du Hamas, y achevait son doctorat. « Je voulais demander aux gens du gouvernement : “Quelle est votre position sur ceci ou cela”, parce que je n’appartiens pas au Hamas », assure cette ancienne présentatrice d’une télévision locale et militante sur les réseaux sociaux, qui se dit « fière d’être divorcée ».


Derrière son bureau où trônent, parmi des ouvrages en arabe, une réplique d’un oud, le luth oriental, et un roman de Dickens, Great expectations, avec en arrière-plan une photo de l’Esplanade des mosquées à Jérusalem-Est, Israa el-Moudallal exprime dans un langage moderne et avec un débit impressionnant les revendications traditionnelles palestiniennes. « Les problèmes humains sont les plus importants, en particulier la crise humanitaire », affirme cette descendante de réfugiés d’Ashdod et d’al-Batani al-Gharbi, dans le sud de l’actuel territoire israélien, accusant Israël de « vouloir tuer tout le monde » à Gaza. « Je vis avec ma grand-mère, qui souffre d’alzheimer, elle se rappelle uniquement son village, ses souvenirs avec son père, les arbres, les mariages, la mer, là-bas et les odeurs de citron », raconte la jeune femme.
Le porte-parole du gouvernement du Hamas, Ihab al-Ghussein, assume pleinement ce choix. « La nomination d’Israa est un des moyens que nous allons utiliser pour essayer de parler directement à l’Occident », précise-t-il. « Prendre comme porte-parole une femme qui a été une activiste de la cause palestinienne est une manière pratique de dire que nous croyons en cette jeunesse », explique-t-il.

 


« Bulles de savon »
Mais le Hamas montre beaucoup moins de mansuétude et d’ouverture envers les militants qui contestent son autorité. Dernier exemple en date, le mouvement Tamarrod (rébellion), dont l’appel sur les réseaux sociaux à manifester le 11 novembre à Gaza n’a pas été suivi. « Ce Tamarrod n’était que des bulles, plus faibles que des bulles de savon, plus faibles que l’écume de la mer, plus faibles que des toiles d’araignée », s’est enflammé le ministre de l’Intérieur du gouvernement du Hamas, Fathi Hammad, pendant un rassemblement des forces de sécurité mercredi. Le Hamas s’est félicité de « l’échec de ce soi-disant “Tamarrod Gaza” à provoquer le chaos dans la bande de Gaza, où la vie a suivi son cours normal ».


Le Centre palestinien pour les droits de l’homme (PCHR), basé à Gaza, a en outre dénoncé une campagne d’arrestations préventives de dizaines de personnes « à l’approche de l’appel de Tamarrod pour le 11 novembre », faisant état de témoignages de « torture et de traitement dégradant ». Après une parade jeudi de milliers de combattants masqués de sa branche armée, les Brigades Ezzeddine al-Qassam, équipés de batteries antiaériennes, de RPG, mais aussi de roquettes M75, le Hamas a affirmé que ce défilé « était un message à l’ennemi israélien et à tous ceux qui misent sur l’affaiblissement du Hamas qu’il est plus fort que jamais ».


Très critique de l’administration du mouvement, Omar Chaabane, directeur du groupe de réflexion Palthink, à Gaza, met ainsi en garde contre une réaction violente du Hamas s’il se retrouve « acculé ». « Ils feront tout pour garder Gaza, ils n’ont nulle part ailleurs où aller », prévient-il, « ils se battront jusqu’au bout ».

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