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À La Une - Egypte

À Delga, la confiance entre coptes et musulmans brisée après des attaques

Human Rights Watch a dénombré 40 églises attaquées depuis le 14 août.

Samir Hanna, son fils, son frère et sa nièce de retour dans leur maison détruite lors d'une attaque perpétrée par des islamistes radicaux contre  Delga, une ville d'Egypte abritant de nombreux coptes. AFP/Khaled Desouki 

La maison de Samir Hanna, paysan copte de Delga, dans le centre de l’Égypte, a été pillée et incendiée par des islamistes. Pour lui désormais, même si l’armée a repris le contrôle de la ville, la confiance ancestrale entre musulmans et chrétiens est brisée. Le 14 août, « des centaines d’hommes ont attaqué nos foyers, la plupart étaient masqués », raconte cet homme de 43 ans, une semaine après son retour dans sa maison de Delga, dans la province de Minya, où la minorité chrétienne copte d’Égypte est très présente. Ce jour-là au Caire, soldats et policiers ont dispersé dans le sang les manifestants qui réclamaient le retour au pouvoir du président islamiste Mohammad Morsi, destitué et arrêté début juillet par l’armée. Ce 14 août a marqué le début d’une répression implacable et meurtrière visant notamment les Frères musulmans, la confrérie du chef de l’État déchu qui avait pourtant remporté les législatives fin 2011.

Certains musulmans radicaux, par vengeance, s’en sont immédiatement pris aux coptes, accusés d’avoir soutenu le coup de force de l’armée. Leur pape Tawadros II était apparu aux côtés du chef de l’armée et nouvel homme fort du pays, le général Abdel Fattah al-Sissi, le 3 juillet quand celui-ci annonçait publiquement l’arrestation de M. Morsi. Human Rights Watch a dénombré 40 églises attaquées depuis le 14 août, dont certaines, plusieurs fois centenaires, ont été incendiées. Les deux provinces les plus touchées ont été Minya et Assiout, dans le centre.

 

Le père copte de Delga, Youannas, montre les dégâts causés à l’église de la Vierge bénie par une attaque islamiste le 14 août dernier. AFP/Khaled Desouki

 

 


Lors de l’attaque du 14 août, « nous nous sommes cachés dans la maison d’un ami musulman », explique Samir Hanna. « Je lui fais confiance, à lui, mais nous ne nous sentons pas en sécurité maintenant dans la ville parce qu’on ne peut pas se fier à tout le monde », se lamente-t-il, en disant que certains des assaillants étaient des habitants de Delga, affirmant avoir peur que tout recommence une fois l’armée hors de la ville. Une centaine de familles coptes ont fui leur maison après l’attaque, certaines quittant carrément la ville. « Samir est mon ami, je suis un musulman et c’est mon devoir d’aider ceux qui sont victimes d’injustice, c’est ce que nous enseigne l’islam », commente de son côté Taoufic Zaki, le boucher, qui a offert son toit à Samir Hanna. « Qui va payer pour ça, comment vais-je reconstruire ? » s’emporte Samir devant sa petite maison aux murs noircis et aux fenêtres éventrées, en regardant ses trois enfants fouiller dans les débris.

 

 

Le monastère Anba Abraam, dans la ville de Delga. AFP/Khaled Desouki


Dans cette bourgade pauvre de quelque 120 000 d’habitants, les attaques à partir de cette date semblent avoir irrémédiablement creusé un fossé entre la minorité chrétienne (entre 6 à 10 % de la population égyptienne) et les musulmans. Tout comme dans l’ensemble du pays, où les modérés de chaque confession ne tarissent pas de souvenirs d’une cohabitation sinon heureuse du moins harmonieuse entre eux. « Nous avions nos différends, ils étaient réglés avant le coucher du soleil, mais avec ce qui s’est passé, il va falloir du temps pour que cela cicatrise », commente le père Youannas, prêtre copte de Delga. « Au premier jour, environ 2 000 personnes ont attaqué le monastère et les églises, ils les ont incendiés, ont volé des objets de culte et même creusé dans le sol en pensant y trouver un trésor », se lamente-t-il en montrant un trou béant au milieu de l’église de la Vierge bénie.

 

 

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