S’exprimant à Beiteddine devant une délégation de diplômés de la faculté d’information et de documentation à l’Université libanaise, emmenée par Amer Machmouchi, le président Sleiman a souhaité que la proposition russe de placer l’arsenal chimique syrien sous contrôle international pave la voie à un dénouement de la crise syrienne. Il a rappelé dans ce cadre que les constantes nationales favorisent une solution pacifique au conflit syrien. Le chef de l’État a également débattu de la situation locale et régionale avec le président du mouvement de l’Indépendance, Michel Moawad.
En revanche, l’ambassadeur de Syrie Ali Abdel Karim Ali s’est montré sceptique quant à l’aboutissement de l’initiative russe. « Nous laissons pour l’instant la proposition russe faire son effet, d’autant que la Syrie a déjà exprimé son appui au rôle de la Russie », a-t-il veillé à signaler, souhaitant toutefois que « les calculs de l’administration américaine et des gouvernements européens soient dénués de tout aventurisme et de toute volonté d’asseoir un pouvoir unilatéral ». Il a affirmé « ne pas s’attendre, de toute évidence, à une lecture sage de la proposition russe, ni de la part de Bandar ben Sultan (chef des services de renseignements saoudiens) ni de la part de Recep Tayyip Erdogan (le Premier ministre turc), mais peut-être des États-Unis et d’Israël, qui pourraient prendre conscience du sérieux et de la détermination de l’axe (des alliés de la Syrie) à répondre à toute éventuelle frappe ou agression contre la Syrie ». « C’est l’embarras américain qui a freiné le scénario des attaques », a-t-il ajouté, à l’issue de sa visite hier chez l’ancien Premier ministre Sélim Hoss. L’ambassadeur syrien n’a pas manqué de répéter son discours sur « le danger de parier sur Front al-Nosra et el-Qaëda », et de « l’inaptitude de l’Arabie saoudite à donner des leçons en matière d’égalité sociale ».
Divergences
Les données régionales continuent d’ailleurs de diviser les parties libanaises. Pour le chef du Parti national libéral, le député Dory Chamoun, « la frappe militaire en Syrie est désormais une réalité et ne saurait être réduite à une simple menace ». Il a écarté par la même occasion les chances d’une « solution diplomatique à la crise syrienne ».
Pour sa part, le député Kataëb Élie Marouni a semblé dubitatif. Estimant que « l’entente russo-américaine est désormais claire par rapport à la Syrie », le parlementaire a veillé à préciser que son parti « n’a jamais parié sur les frappes occidentales et n’a pas souhaité cette option ».
Dans ce même cadre, le secrétaire du Renouveau démocratique Antoine Haddad a appelé à « accélérer la formation du gouvernement, indépendamment des possibilités de frappes en Syrie ». Faisant remarquer que « le Hezbollah s’abstient de toute déclaration officielle sur ses intentions de réagir éventuellement à ces frappes », il a réaffirmé la « crainte d’une stratégie iranienne aux dépens des intérêts nationaux ». Il a en tout cas estimé que « les dernières avancées diplomatiques présageaient d’une solution politique en Syrie ». Évoquant les combats de Maaloula, il a appelé à faire la distinction entre « le souci honorable pour les chrétiens et l’humanité, et l’utilisation hypocrite des intérêts des chrétiens et des minorités ».
Située à l’opposé de cet appel, la crainte de la montée des fondamentalismes est revenue hier dans les déclarations de parties libanaises proches de Damas. Ainsi, le chef du parti de l’Entente nationale, Bilal Takieddine, s’est dit « étonné du silence arabe et international sur les violations à Maaloula commises par des terroristes takfiris ». « La liberté s’accomplit-elle par la destruction des mosquées et des églises, et par le meurtre des innocents ? » s’est-il demandé.
En outre, le parti Baas arabe a organisé, avec la participation de Syriens, un sit-in de solidarité à Tyr contre les frappes occidentales. « La mobilisation de flottes sur fond d’incitations contre Damas sert les intérêts d’Israël », a déclaré le député Abdel Majid Saleh, qui a tenu à remercier le pape pour son appel à la prière et au jeûne pour la paix. Le refus de toute intervention étrangère en Syrie a été formulé également par le secrétaire du mouvement Fateh et de l’Organisation de libération de la Palestine à Tyr, Toufic Abdallah.