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Syrie: l'opposition veut s'implanter en territoire "libéré"

La prochaine création d'un gouvernement en zone rebelle en Syrie devrait permettre à l'opposition de rattraper son retard sur les groupes islamistes bien implantés sur le terrain et de pousser à l'action une communauté internationale récalcitrante, selon des experts.

La Coalition nationale de l'opposition, reconnue par plusieurs pays occidentaux comme le représentant légitime du peuple syrien, a annoncé vendredi qu'elle se réunirait le 2 mars à Istanbul pour décider de la composition de ce cabinet "provisoire" et choisir son chef.

Ce gouvernement aura comme principale fonction d'administrer les zones qui échappent au contrôle du régime de Bachar al-Assad, a précisé un porte-parole.

Cette annonce de l'opposition, souvent accusée d'être déconnectée du terrain, intervient alors que la Syrie se désintègre en tant qu'Etat et qu'aucune solution n'est en vue pour le conflit qui ensanglante le pays depuis près de deux ans.

"L'opposition veut établir une présence en Syrie qui lui donnerait plus de crédibilité", affirme Salman Shaikh, directeur du Brookings Doha Center.

"Ils veulent montrer qu'ils sont prêts à agir sur le terrain et veulent organiser la vie dans les zones +libérées+", explique Agnès Levallois, experte du Moyen-Orient basée en France.

Au niveau de la sécurité, "il y a un vide dramatique et l'opposition en est consciente, ce qui entraîne un chaos qui porte atteinte à son image", souligne-t-elle. Un gouvernement permettrait selon elle d'organiser l'aide humanitaire et de créer une "interface politique" entre les donateurs et les gens en besoin.

Le "danger" Al-Nosra

"C'est aussi important pour l'opposition d'être déjà sur place et de ne pas se faire déborder par le chaos et par les groupes armés" dans la période de l'après-Assad, rappelle Mme Levallois.

Différents groupes rebelles, dont des jihadistes comme l'influent Front al-Nosra, contrôlent de larges territoires dans le nord et l'est du pays, où l'appareil sécuritaire de l'Etat est en train de disparaître. Dans beaucoup de zones, les services de base manquent et la population civile peine à survivre.

Pour M. Shaikh, l'opposition est déjà prise de vitesse par les rebelles, en particulier les activistes d'Al-Nosra. A mesure que dure le conflit, "il y aura de plus en plus de vide et de dangereux éléments profiteront de la situation. C'est ce qui se passe actuellement".

Selon lui, le Front al-Nosra, qui a revendiqué les attentats les plus audacieux --et les plus meurtriers-- contre des symboles du régime à travers le pays, pourrait bien contrôler prochainement les trois provinces pétrolières de l'est du pays: Raqa, Hassaqa et Deir Ezzor.

"Ils font des pactes avec les dignitaires des villages et les tribus, organisent de l'aide et empochent de l'argent grâce aux champs de pétrole", dit M. Shaikh.

Si un gouvernement est nécessaire, les difficultés entourant sa formation ne manquent pas.

"C'est supposé être un gouvernement de technocrates, mais les différentes factions de l'opposition sont probablement déjà en train de faire du lobbying pour installer leurs partisans", selon M. Shaikh.

Dans le même temps, un gouvernement permettrait à l'opposition de contraindre la communauté internationale, incapable d'agir depuis le début du conflit, à s'engager, selon Mme Levallois. "Cela obligera les puissances à sortir de ce cynisme qui est de faire de belles déclarations, sans aider à une solution".

La communauté internationale est divisée entre pays occidentaux qui appellent au départ de M. Assad mais refusent d'armer les rebelles par crainte de voir des extrémistes s'emparer de l'arsenal, et la Russie qui soutient son allié syrien.

Samedi, la Coalition a annoncé qu'elle suspendait sa participation à plusieurs rencontres à l'étranger pour dénoncer le "silence international sur les crimes" du régime.

"L'opposition se rend compte qu'il n'y aura pas beaucoup de gens pour les aider. Ils doivent s'aider eux-mêmes", constate M. Shaikh.
La prochaine création d'un gouvernement en zone rebelle en Syrie devrait permettre à l'opposition de rattraper son retard sur les groupes islamistes bien implantés sur le terrain et de pousser à l'action une communauté internationale récalcitrante, selon des experts.La Coalition nationale de l'opposition, reconnue par plusieurs pays occidentaux comme le représentant légitime du peuple...