Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - Reportage

À Homs, l’université n’est pas à l’abri de la guerre confessionnelle

Perquisitions, humiliations, enlèvements, viols...

Partisans du régime syrien en armes, amitiés défaites, tireurs embusqués sur les toits, l’université al-Baas est à l’image de la ville de Homs : déchirée par les haines communautaires. « Il y a de nombreuses perquisitions et arrestations, en particulier parmi les étudiants sunnites les plus brillants », dit une étudiante à la faculté d’ingénierie qui se fait appeler Amira. « De plus, nous nous sentons humiliés quand nous sommes fouillés par des étudiants alaouites », dit-elle en référence à la communauté à laquelle appartient le président Bachar el-Assad. Mounir, un ingénieur, raconte de son côté que quatre étudiantes de l’université qu’il connaît ont été enlevées en janvier « pour le simple fait qu’elles sont alaouites ».


Les tensions communautaires dans cette université, ouverte en 1979 et qui draine une grande partie des étudiants du centre du pays, sont à l’image de cette ville industrielle multiconfessionnelle de 800 000 habitants. Les sunnites, majoritaires dans le pays et dans la ville, s’y considèrent comme les authentiques habitants et n’ont jamais accepté l’afflux des alaouites de la campagne à partir des années 60 après l’arrivée au pouvoir du Baas, parti contrôlé par cette branche chiite de l’islam. Pour Abou Baha, 23 ans, également étudiant en génie, la zizanie confessionnelle a éclaté peu après le début de la révolte contre le régime en 2011. « Dès le début de la révolution, l’université s’est transformée en cinquième colonne des forces des sécurité. Les membres du syndicat estudiantin sont devenus des chabbiha (miliciens prorégime), chacun d’eux a reçu une arme et peut se permettre d’insulter et d’arrêter d’autres étudiants pour le simple fait qu’ils ont parlé de liberté », explique-t-il.

Menaces et enlèvements
Depuis le début du soulèvement, aucune ville de Syrie n’a connu une violence confessionnelle aussi sanglante qu’à Homs, où assassinats et représailles ont alimenté une haine déjà vivace. Les divisions sont « devenues plus profondes en raison des arrestations menées à la suite de dénonciations par des étudiants prorégime, notamment alaouites », assure Abou Mohammad, un autre étudiant. « Mes relations avec les étudiants alaouites ont été totalement rompues », assure également Amira. « Une étudiante de 24 ans de Jablé a été enlevée à la sortie de l’université Baas car elle était alaouite. Elle a été libérée lors d’un échange mais elle a sombré dans une dépression. Elle ne parle plus. On lui avait rasé la tête et on l’avait violée », assure un militant des droits de l’homme de cette ville côtière.


Les professeurs aussi ont peur. « La majorité d’entre eux n’osent pas parler, mais dans ma faculté il y a un professeur alaouite qui passe 70 % de ses cours à provoquer les étudiants favorables à l’opposition. Personne n’ose lui répondre car sinon nous pouvons dire adieu au diplôme », explique Abou Baha. Un enseignant réfugié au Liban confie avoir demandé sa mise à la retraite anticipée en raison de l’atmosphère extrêmement tendue dans l’établissement et de la peur d’être enlevé ou tué. Au début, naïvement, Abou Mohammad pensait que la sphère académique était une zone sûre pour parler du soulèvement. Mais après un débat houleux avec un étudiant alaouite prorégime, il dit avoir été chassé de l’université et emprisonné durant un mois sans aucune preuve.


Les étudiants paient le prix de leur confession même dans d’autres établissements de la ville. Ahmad, inscrit dans un institut de médecine et résidant dans un secteur alaouite, raconte de son côté avoir été menacé sur sa page Facebook et accusé de faire partie des chabbiha. « On m’a enlevé à la sortie de l’institut, bandé les yeux pendant 10 jours avant de me libérer à la suite d’un échange de kidnappés », raconte-t-il.

 

Lire aussi

Moscou met en garde contre une « destruction mutuelle » des Syriens

Partisans du régime syrien en armes, amitiés défaites, tireurs embusqués sur les toits, l’université al-Baas est à l’image de la ville de Homs : déchirée par les haines communautaires. « Il y a de nombreuses perquisitions et arrestations, en particulier parmi les étudiants sunnites les plus brillants », dit une étudiante à la faculté d’ingénierie qui se fait...

commentaires (2)

Je pensais au vu des articles passés que Homs était tombée aux mains des mercenaires, comme Hama , Alep, Idleb Deraa , Der Ezzor, Ain ... faut avoir la mémoire longue quand on veut mentir, pour se rappeler son mensonge..

Jaber Kamel

11 h 58, le 21 février 2013

Tous les commentaires

Commentaires (2)

  • Je pensais au vu des articles passés que Homs était tombée aux mains des mercenaires, comme Hama , Alep, Idleb Deraa , Der Ezzor, Ain ... faut avoir la mémoire longue quand on veut mentir, pour se rappeler son mensonge..

    Jaber Kamel

    11 h 58, le 21 février 2013

  • C'est stupéfiant ce que les stupidités et les tensions confessionnlles peuvent causer comme dégradation et décadence, même dans une université ! Une grande leçon pour nos universitaires. Un grand avertissement pour qu'ils ne se laissent pas entraîner par les passions et les mazelles politiques de leurs courants et leurs partis. Cela dit, ce reportage de l'AFP me mène à citer un fait relatif à son contenu. Un jour je prends un taxi au hasard dans la rue. Le chauffeur est un jeune homme syrien. J'entreprends une petite conversation, et il me raconte qu'il était en 3e année de jornalisme à l'université de Homs. "La situation n'était plus supportable à l'université", me dit-il. Il a tout abandonné. Sa famille aussi s'est réfugiée au Liban. Et le voilà comme chauffeur d'un taxi loué à Beyrouth. Comme c'est triste !

    Halim Abou Chacra

    23 h 21, le 20 février 2013

Retour en haut