Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - Reportage

Les rebelles étrangers pour un État islamique en Syrie

Regroupés autour d’un feu dans un bâtiment en ruine d’Alep, des combattants jihadistes étrangers clament haut et fort leur détermination à créer un État islamique en Syrie, que cela plaise ou non aux autres rebelles cherchant à renverser Bachar el-Assad. Parmi les autres révolutionnaires et la population civile, ces étrangers inspirent à la fois le respect pour leur discipline de fer et la crainte de les voir retourner leurs armes contre leurs anciens alliés si le régime syrien tombe.

 

À Karm el-Jabal, un quartier dévasté d’Alep, un combattant turc manifeste ainsi sa volonté d’imposer la loi islamique, la charia, qui inquiète de nombreux Syriens mais aussi l’Occident et même certaines puissances régionales appuyant la rébellion. « La Syrie (...) sera un État islamique où règnera la charia et nous n’accepterons rien d’autre. La démocratie et la laïcité sont totalement rejetées », prévient ce combattant disant s’appeler Khattab. Barbe hirsute et mitraillette sur l’épaule, il met en garde quiconque oserait s’élever contre ces projets. « Nous les combattrons, même si ce sont des révolutionnaires ou n’importe qui d’autre », dit cet homme qui a quitté son métier de chauffeur pour combattre pendant deux ans en Afghanistan avant de rejoindre la Syrie au cours de l’été 2012. Membre de l’unité rebelle Jundallah, Khattab parle à peine arabe – ses propos ont été traduits par un interprète syrien – et il refuse d’être filmé ou photographié afin de ne pas être identifié en Turquie.


Pendant des mois, le soulèvement contre Bachar el-Assad, né en mars 2011, est resté en grande partie pacifique avec des manifestations à travers le pays. Puis certains ont pris les armes et les combattants étrangers ont afflué. Pour beaucoup de rebelles et d’habitants d’Alep, la crainte occidentale des jihadistes est exagérée. À leurs yeux, les pays occidentaux se servent de la présence de ces islamistes radicaux comme d’un prétexte pour ne pas fournir aux rebelles les armes dont ils ont besoin, ce qui prolonge de fait le pouvoir de Bachar el-Assad. À Alep, la plus grande ville de Syrie dans le nord du pays, l’influence de ces jihadistes est évidente. Nombre de rebelles y circulent à bord de voitures ornées de drapeaux noirs portant des inscriptions religieuses. Il est difficile d’établir le degré de coordination entre ces combattants islamistes et les unités de l’Armée syrienne libre (ASL), cette force locale hétéroclite composée de civils et de soldats dissidents. Beaucoup de rebelles saluent l’excellence au combat et le courage de la plupart de ces jihadistes, souvent passés par l’Afghanistan et l’Irak, qui ne se mêlent guère aux autres combattants.

 

(Pour mémoire : Appliquer ou non la charia, l’autre combat en Syrie)


D’autres, en revanche, sont des novices dans la « guerre sainte » qu’ils livrent à el-Cham, le terme par lequel ils désignent la « Grande Syrie » des débuts de l’islam au VIIe siècle. Parmi ces derniers, Abou el-Harith est un jeune homme trapu de 27 ans à la peau claire. Originaire d’Azerbaïdjan, il porte un badge noir orné de slogans islamiques sur sa tenue verte de combat. « C’est la première fois que je participe à un jihad car (...) personne n’est pire que Bachar. Même Staline était quelqu’un de miséricordieux comparé à lui », affirme-t-il dans la base rebelle de Karm el-Jabal, un quartier tellement dévasté qu’il semble avoir été frappé par un tremblement de terre. Les effectifs de ces jihadistes sont difficiles à évaluer. Beaucoup d’entre eux ne cachent pas leur méfiance à l’égard de l’ASL et des puissances occidentales et régionales qui la soutiennent. « Tous ces discours au sujet de la liberté, de la démocratie et d’un État laïque et d’un État de libertés générales à l’image de l’Amérique ou du système européen, les islamistes n’ont rien à faire de tout cela », dit Abou Mouaouiyah, un combattant de 25 ans, qui dit venir des environs d’Alep et sert d’interprète pour les étrangers. « Il y a des factions combattantes telles que l’Armée syrienne libre qui sont liées à d’autres pays tels que la Turquie, l’Arabie saoudite et le Qatar, et ces pays sont eux-mêmes liés au centre névralgique que sont les États-Unis, ajoute-t-il. L’Amérique est hostile à tout ce qui est islamique. C’est une évidence pour tout le monde. »

 

(Pour mémoire : De la difficulté de distinguer un jihadiste d’un rebelle en Syrie)


En décembre, les États-Unis ont certes reconnu la Coalition nationale formée par les rebelles comme le seul représentant légitime de la Syrie mais ils ont aussi qualifié le Front el-Nousra, affilié à el-Qaëda, d’organisation terroriste après des attentats à Damas et à Alep. Cette décision n’a pas été comprise par de nombreux rebelles. Les combattants du Front el-Nousra ont la réputation d’être extrêmement disciplinés et il est difficile de trouver des Syriens critiques à leur égard. Abou Abdo dit avoir tenté d’intégrer ce groupe mais avoir été rejeté parce qu’il fume. Chef du conseil militaire révolutionnaire de la province d’Alep, le colonel Abdou el-Jabbar Okaïdi défend lui le Front el-Nousra. « Nous ne partageons peut-être pas leur philosophie, a-t-il récemment déclaré. Mais ce sont des combattants acharnés et loyaux (...) et au bout du compte, ils combattent le régime à nos côtés. Et nous n’avons pas vu leur extrémisme, ils n’ont rien fait qui prouve que ce sont des terroristes. Quiconque se bat contre le régime est un moujahid et un révolutionnaire, et nous l’embrassons sur le front. » Selon lui, le Front el-Nousra ne dispose pas de plus de 500 combattants à Alep. Par contraste, la popularité de l’ASL s’est érodée en raison de certains cas de pillage. « L’unité la plus propre sur le terrain, sans la moindre corruption dans ses rangs, c’est le Front el-Nousra. Le groupe jouit désormais d’un soutien populaire », dit Abou Ahmad, chef d’une unité des brigades el-Tawhid à Alep.


Certains rebelles ne cachent cependant pas leur pessimisme. « Nous craignons qu’après la chute du régime, ils essaient d’imposer leurs vues au peuple syrien. Leur objectif est que la Syrie devienne un État islamique et l’Armée syrienne libre est à l’opposé de cela », déclare Sakr Idlib, combattant rebelle de 24 ans en survêtement et baskets.

 

Pour mémoire

La rivalité entre le Front al-Nosra et l’ASL s’accroît

 

Regroupés autour d’un feu dans un bâtiment en ruine d’Alep, des combattants jihadistes étrangers clament haut et fort leur détermination à créer un État islamique en Syrie, que cela plaise ou non aux autres rebelles cherchant à renverser Bachar el-Assad. Parmi les autres révolutionnaires et la population civile, ces étrangers inspirent à la fois le respect pour leur discipline de...

commentaires (4)

Ben oui... mais ce n'est à nous qu'il faut dire cela, il faut le dire à ceux qui les soutiennent.. Kéén baddoun'l i5wén tolo3loun en-nousra! souvent les petits joueurs ignorent qu'aux dessus d'eux il y a des grands joueurs qui tirent les ficelles comme avec les marionnettes!! C'était les cas pour le 11 septembre: des vrais terroristes bien canalisés par un joueur interne au eua. Ils ont cru que c'était un jeu mais c'est tout le monde qui pourrait payer le prix, eux compris... un peu comme un enfant ouvre la bombonne de gaz dans maison pour jouer!! Espérons que les forces laïques, dont le régime en place en Syrie réussiront à endiguer ce mal rampant... Je crois que les sionistes réussiront seulement à repousser la date fatidique de leur retour d'où ils viennent, pas plus!!

Ali Farhat

12 h 09, le 15 janvier 2013

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • Ben oui... mais ce n'est à nous qu'il faut dire cela, il faut le dire à ceux qui les soutiennent.. Kéén baddoun'l i5wén tolo3loun en-nousra! souvent les petits joueurs ignorent qu'aux dessus d'eux il y a des grands joueurs qui tirent les ficelles comme avec les marionnettes!! C'était les cas pour le 11 septembre: des vrais terroristes bien canalisés par un joueur interne au eua. Ils ont cru que c'était un jeu mais c'est tout le monde qui pourrait payer le prix, eux compris... un peu comme un enfant ouvre la bombonne de gaz dans maison pour jouer!! Espérons que les forces laïques, dont le régime en place en Syrie réussiront à endiguer ce mal rampant... Je crois que les sionistes réussiront seulement à repousser la date fatidique de leur retour d'où ils viennent, pas plus!!

    Ali Farhat

    12 h 09, le 15 janvier 2013

  • Et les Chïïtes.... ÉTRANGERS !, tant IRANIENS que LIBANAIS sont pour un État Älaouïte en SŒUR-SYRIE..... ? !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    07 h 31, le 15 janvier 2013

  • Et puisqu'il y a des étrangers qui se battent en Syrie, que ce soit avec celui-ci ou celui-là, la présence des uns justifiant aux yeux d'autres la présence des autres, c'est la PAGAILLE... et ce sont des INVASIONS multiples auxquelles le pays est la victime. Il faut prendre très au sérieux ces extrémistes qui risquent bien d'émigrer... Où... ? LE DIALOGUE URGEMMENT !

    SAKR LEBNAN

    06 h 05, le 15 janvier 2013

  • Article hypocrite s'il en est ! Alors comme çà ils sont FOR-MI-DABLES,ces combattants islamistes?pas corrompus,courageux au feu,d'une discipline de fer et patin couffin... y a quand même juste un détail ennuyeux dans ce beau tableau...ils ne sont pas syriens,ils se battent au nom de "convictions" paléolithiques,ils ont causé la destruction d'Alep sans vraiment de justification stratégique...faudrait quand même arrêter de parler de ces gens là comme si leur radicalisme était somme toute un défaut mineur,non?

    GEDEON Christian

    05 h 27, le 15 janvier 2013

Retour en haut