Dans un tel contexte, la nouvelle des rencontres de Bahreïn n’a pu que surprendre aussi bien les milieux diplomatiques arabes qu’occidentaux qui ont à leur tour entrepris leurs propres contacts pour tenter d’en savoir plus sur le sujet. D’autant qu’en marge de ces rencontres, l’administration américaine donnait des signaux allant dans le sens contraire, en retirant l’organisation iranienne opposante Moujahidi Khalq de la liste des organisations terroristes, tout en cherchant à aider l’opposition iranienne dans la province du Khuzistan (dont la capitale est Ahwaz) au sud du pays, via les pays du Golfe qui font face à cette zone. En même temps, l’administration américaine refuse tout projet d’alléger les sanctions économiques contre la République islamique. Des diplomates en poste au Liban ont même sondé les forces proches de Téhéran à ce sujet, pour tenter de connaître l’objectif réel derrière cette initiative inattendue de la part de Washington.
Les forces alliées de Téhéran au Liban ont aussitôt cherché à minimiser l’impact de ces contacts discrets, en assurant qu’ils ont peu de chances d’aboutir à des résultats concrets parce que les intentions de l’administration américaine ne seraient pas sincères. Selon ces forces, Washington souhaiterait, par le biais de ces rencontres, faire d’une pierre deux coups : il s’agirait d’abord de marginaliser ses alliés occidentaux, ainsi que les autres membres permanents du Conseil de sécurité, et ensuite de mettre l’Iran en difficulté vis-à-vis de ces pays qui continuent à avoir des canaux de contact avec la République islamique (c’est le cas notamment de l’Allemagne, mais aussi de la Chine et de la Russie qui se considèrent embarquées sur le même bateau avec l’Iran en ce qui concerne le dossier syrien). Si ces contacts échouent, ce sont les Iraniens qui seront coincés vis-à-vis des Russes et des Chinois. Et s’ils aboutissent à un accord, il sera toujours possible de mettre tout le monde devant le fait accompli. Les alliés de Téhéran estiment donc que ces contacts sont une pure manœuvre de la part de l’administration américaine qui chercherait d’abord à semer la discorde entre l’Iran, la Chine et la Russie et ensuite à tisser un réseau de liens avec des forces iraniennes sous couvert de travailler avec les représentants de la société civile. Les alliés de Téhéran craignent surtout que les États-Unis soient en train de préparer une sorte de « printemps iranien » à la faveur de l’élection présidentielle iranienne. Il s’agirait d’une réédition des événements qui ont eu lieu lors de la précédente élection présidentielle au printemps 2009, avec cette fois une dimension régionale en raison des troubles dans les pays arabes. Par contre, des milieux diplomatiques arabes estiment que cette initiative de Washington s’inscrit plutôt dans la volonté de l’administration américaine de conclure des compromis dans la région plutôt que de se lancer dans de nouvelles guerres. De plus, ce type de contacts permet de tâter le terrain sans se compromettre, puisqu’ils ne s’effectuent pas avec des interlocuteurs officiels iraniens. Ce qui est sûr, c’est que l’affaire est désormais suivie avec intérêt, même si nul ne peut aujourd’hui en prédire les effets et en deviner les dessous.
commentaires (7)
Les printemps semblent fleurir partout même en Iran dans quelques mois . Belle contagion . Antoine Sabbagha
Sabbagha Antoine
12 h 36, le 05 janvier 2013