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À La Une - Crise

De la Syrie au Liban, le deuxième exil des réfugiés palestiniens

Des milliers de Palestiniens ont fui le camp de Yarmouk en Syrie pour se réfugier au Liban.

Des enfants palestiniens du camp de Yarmouk dans leur maison provisoire à Chatila. Anwar Amro/AFP

« Les enfants ne comprennent pas que je ne puisse pas leur apporter du lait ou changer leurs couches », confie à l’AFP Oum Khalil, une réfugiée palestinienne qui a pris une nouvelle fois le chemin de l’exil pour fuir les violences en Syrie.
Sa famille, chassée du nord de la Palestine en 1948 lors de la création de l’État d’Israël, s’était réfugiée en Syrie. Ces derniers jours, elle a quitté sa maison dans le camp palestinien de Yarmouk, à Damas, pris dans les combats entre des combattants pro et antirégime, vingt et un mois après le début du soulèvement contre le président syrien Bachar el-Assad. Oum Khalil et sa famille ont loué une maison dans le camp de Chatila à Beyrouth. Comme elle, près de 3 000 Palestiniens sont arrivés ces derniers jours au Liban.
« Nous, les Palestiniens, on bouge tout le temps. Émigrer, nous y sommes habitués », constate Ahmad, 60 ans, dans la pénombre de la pièce délabrée qu’il loue dans le même camp, où sa famille, qui « vivait bien à Damas », doit désormais économiser l’électricité.
Alors que la pluie imbibe les quelques matelas posés à même le sol, ce réfugié palestinien de Syrie s’inquiète pour l’hiver, d’autant que sa famille n’a pu récupérer que quatre couvertures pour sept personnes.
Des couvertures, Amira en vendait dans le camp palestinien de Deraa, dans le sud de la Syrie, qu’elle a quitté il y a un mois, donnant toute sa marchandise aux familles restées dans ce camp, le plus ravagé par les violences qui ensanglantent le pays depuis mi-mars 2011.
« Quand deux roquettes sont tombées à côté de la maison, je me suis décidée à partir. Je l’ai fait pour les enfants, je n’avais plus de lait pour ma benjamine depuis 15 jours », explique-t-elle, en berçant sa fille de trois mois.
« L’exil ? Depuis 1948, c’est ça notre vie », lâche son mari, Salem, dans le petit deux-pièces insalubre qu’ils louent pour 300 dollars avec leurs quatre enfants à Chatila. Salem a du mal à joindre les deux bouts en travaillant quelques jours par mois dans le bâtiment.
Selon l’agence de l’ONU pour l’aide aux réfugiés de Palestine (Unrwa), plus de 13 000 Palestiniens de Syrie ont trouvé refuge au Liban, mais le mouvement s’est accéléré avec le début, il y a une semaine, des combats à Yarmouk, principal camp palestinien en Syrie, dont les deux tiers des 150 000 habitants ont fui.

 

(Lire aussi:Réfugiés : la sonnette d’alarme de Charbel)


Mais comme Salem, beaucoup se sentent abandonnés. « Il y a des associations d’aide pour les réfugiés syriens au Liban, il y a de l’aide pour les Palestiniens du Liban, mais pour les Palestiniens de Syrie au Liban, il n’y a rien », tempête-t-il.
L’un de ses amis, Oussama, un Palestinien du Liban, renchérit : « Pour les Palestiniens de Syrie, le deuxième exil est encore plus dur : son grand-père a quitté la Palestine pour aller en Syrie (...), aujourd’hui il revit ce que ses ancêtres ont vécu. »
Au bout de ce deuxième exil, ces nouveaux réfugiés découvrent la dure condition des Palestiniens au Liban : la vie chère, le manque de travail et les conditions de vie sordides dans les camps.
À la différence de leurs compatriotes au pays du Cèdre, « les Palestiniens en Syrie ont toujours bénéficié des mêmes acquis sociaux que les nationaux », rappelle l’intellectuel palestinien Salameh Kaileh, expulsé de Syrie après avoir été torturé par les services de renseignements. Alors qu’au Liban il leur est interdit d’exercer une profession libérale, « en Syrie, un Palestinien a même été adjoint au ministre de la Défense », souligne-t-il.

 

(Lire aussi: Mikati : Pas question de fermer les frontières avec la Syrie)


C’est en raison de cette forte intégration que les Palestiniens ont été emportés dans le tourbillon du conflit syrien. « Les Palestiniens vivent tout ce qui se passe en Syrie (...). Les jeunes se sentent palestiniens mais aussi pleinement syriens », estime M. Kaileh, depuis le Salon du livre de Beyrouth où il dédicace ses ouvrages.
De fait, Mohammad, 23 ans, également installé à Chatila avec sa femme enceinte et leur fille de neuf mois, regrette sa vie en Syrie, où « nous étions traités exactement comme les Syriens ». Pour ce fervent soutien du président Assad, les rebelles « ont détruit le pays de la sécurité, de la vie pas chère ».
Mais malgré la guerre et les destructions, les réfugiés sont unanimes : tous veulent retourner en Syrie, « avant, bien sûr, de revenir en Palestine ».

 


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