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Culture - Concert

Notes aux couleurs grenat...

On emprunte volontiers au titre du film « Couleur grenat » de Parajanoff pour parler de cette présence arménienne remarquée, autant au milieu des musiciens que parmi l’audience, au dernier concert donné par l’Orchestre philharmonique libanais. À la baguette, Vahan Mardirossian, et en solo, pour un coup d’archet ensorcelant, le talentueux jeune Mikhaïl Simonyan.

Le violoniste Mikhail Simonyan et le maestro Vahan Mardirossian, un duo de choc. Photo Marwan Assaf

À l’église Saint-Joseph (USJ) dont l’autel est garni de grandes gerbes de fleurs multicolores, pour une soirée organisée avec le concours de Garbis et Seta Demirdjian, l’Orchestre philharmonique libanais, sous la houlette de Vahan Mardirossian, erevanien de souche, pianiste formé par Jacques Rouvier, a offert au public un menu d’une haute volée musicale. Ont résonné, entre voûtes et rosaces, des partitions de Mendelssohn, Bruch et Brahms.
Sanglé dans un costume noir à veste longue avec gilet gris, la silhouette et la barbe «pavarotiennes», maestro Mardirossian, yeux souriants et gestes précis, a conquis d’emblée la salle. Car dès les premières mesures ont émergé, avec éclat, ces bords de l’Écosse d’un Mendelssohn raffiné, avide de culture, de voyage et de paysages romantiques.
Non pas un poème symphonique descriptif pour l’ouverture des «Hébrides» du compositeur du Songe d’une nuit d’été, mais une narration impressionniste avant l’heure, d’une sensibilité vive et
frémissante.
La beauté, la solitude et l’humidité de la «Grotte de Fingal» sont perçues à travers la limpide fluidité d’une mélodie aux harmonies douces et aux cadences subtiles. Subtiles conciliations aussi de notes légères et fougueuses, nerveuses et transparentes, scintillantes et élégantes.
Termes qu’on retrouve en force avec le Concerto n°1 pour violon et orchestre en sol mineur op 26 de Max Bruch qui suit cette randonnée sonore sur l’«Île de la solitude». Avec l’époustouflante présence du violoniste Mikhaïl Simonyan, au sang mêlé arméno-russe.
Les cheveux châtain clair coupés courts, la chemise noire à col Mao, le violon niché au creux de l’épaule, ami complice et indéfectible, l’œil brillant, la silhouette juvénile pour ses 27 printemps, Simonyan, dès les premiers effleurements des cordes, entre, pour l’auditoire, au panthéon des musiciens qui ne passent pas inaperçus...
Pour cette œuvre plusieurs fois remaniée, écrite pour le légendaire Josef Joachim (et qui a été, pour sa périlleuse interprétation, la révélation autant pour Perlman que Heifez, Stern et Menuhin), toute la fougue de la jeunesse et le brio d’un talent virtuose.
Un violon qui rugit, explose, chuinte, roucoule, gémit, chante, prend feu sous les doigts d’un musicien en transe. Un musicien ivre de notes. Un musicien pour qui la musique est un grand livre ouvert. Un livre qui lui appartient. Et dont il tourne les pages avec une étourdissante dextérité. Mais aussi en une lumineuse symbiose.
Effets multiples et efficaces pour un violon qui tient tête à l’orchestre dans un élan combinant caresses des anges et embardées rhapsodiques. Tessiture explosive et lyrisme vertigineux pour une finale se terminant en apothéose. Cadences précipitées d’un «presto-stretta» où géhenne et paradis conjuguent de troublants accents de damnation et de salvation, de perdition et d’élévation, de sensualité et de pur esprit...
Sourire d’enfant merveilleux et émerveillé que celui de Mikhaïl Simonyan qui tire sa révérence, après avoir déboutonné le haut du col de sa chemise (ouf! il a fait trop chaud!) sous une pluie diluvienne d’applaudissements.

Du « Violon rouge » à Brahms
Remettant la gerbe de fleurs qui lui est offerte à Seta Demirdjian, le violoniste reprend l’archet et interprète, en solo, cet ébouriffant Red Violin Caprice du compositeur new-yorkais John Corigliano (oscar de la meilleure musique de film en 1999. Ceux qui ont vu la pellicule du cinéaste canadien François Girard pour le Violon rouge se souviennent sans nul doute de sa bande-son aux envolées envoûtantes). Bravoure extrême qui laisse pantois et médusés aussi bien les musiciens présents que le public délirant de joie.
Pour redescendre à nouveau sur terre, du Brahms qui a d’ailleurs nourri le sens de la mélodie chez Bruch. Non pas sa meilleure symphonie, mais sa dernière, avec un somptueux final qui fait date dans les annales des points d’orgue dans les symphonies. Et l’on nomme la Symphonie n°4 en mi mineur op 98, longue de plus de quarante minutes.
On oublie les versions Carlos Kleiber et Furtwangler, et l’on retrouve celle de Vahan Mardirossian, marquée d’une âme nouvelle, revêtue d’oripeaux différents, empreinte de toutes les tonalités et les nuances de l’automne...Teintes crépusculaires, éminemment romantiques, entre héroïsme et intériorité à tendance
mélancolique.
Quatre mouvements (allegro non troppo, andante moderato, allegro giocoso et allegro energico e passionato) pour traduire la solitude, les passions contrariées et certaines influences «dvorjakiennes». Entre chaconne et passacaille, pour le final, incluant une multitude de variations, la musique de Brahms rentre au cœur comme un torrent se fraye un chemin à travers les interstices des rochers. En une éclaboussure, une finesse et une vigueur qui ne tolèrent aucune résistance.
Dans le prolongement de cette magie de la musique, un autre concert, le dimanche soir, a été donné au Centre Demirdjian, sur l’autoroute d’Antélias. Pour l’occasion, on retrouve le talent de Mikhaïl Simonyan mais l’autre face de Vahan Mardirossian: un pianiste haut de gamme.
Pour les mélomanes, un programme fastueux a été concocté. Œuvres connues du grand public certes, mais néanmoins virtuoses. En panaché, des pages de Brahms, Kreisler, Chopin (Nocturne), Khatchadourian (extraits de Gayané), Astor Piazzolla et Tzigane de Ravel.
À l’église Saint-Joseph (USJ) dont l’autel est garni de grandes gerbes de fleurs multicolores, pour une soirée organisée avec le concours de Garbis et Seta Demirdjian, l’Orchestre philharmonique libanais, sous la houlette de Vahan Mardirossian, erevanien de souche, pianiste formé par Jacques Rouvier, a offert au public un menu d’une haute volée musicale. Ont résonné, entre voûtes...
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