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À La Une - France

Caricatures du prophète : Charlie Hebdo critiqué par la Maison Blanche

Plainte à Paris contre l'hebdomadaire satirique pour "provocation à la haine".

A Paris, la sécurité a été renforcée autour de l'immeuble abritant la rédaction de Charlie Hebdo, le 19 septembre 2012, jour de publication d'un nouveau numéro comprenant des caricatures du prophète. FRED DUFOUR/

Une plainte a été déposée mercredi à Paris contre Charlie Hebdo pour "provocation à la haine" et une autre à Meaux pour "diffamation" et "injure publique", après la publication mercredi par l'hebdomadaire satirique de caricatures du prophète Mahomet, dont une le représentant nu, a-t-on appris de sources concordantes.

 

La première plainte, que l'AFP a pu consulter, a été déposée au Parquet de Paris par l'Association syrienne pour la liberté. L'Association des Musulmans de Meaux et de sa région a indiqué avoir déposé la seconde au commissariat de Meaux dans l'après-midi.

 

Installée dans le XXème arrondissement de Paris, l'Association syrienne pour la liberté a été déclarée le 6 février 2012 en préfecture de police de Paris avec pour objet de "défendre les droits de l'Homme en Syrie" et d'apporter une "aide humanitaire au peuple syrien".

Elle estime que Charlie Hebdo "a décidé de jeter de l'huile sur le feu en diffusant une caricature contre le prophète Mohammed", selon le texte de sa plainte, et accuse l'hebdomadaire de "provocation publique à la discrimination, à la haine ou à la violence nationale, raciale ou religieuse" ou encore de "diffamation publique raciale, religieuse".


Contacté par l'AFP, l'avocat de Charlie Hebdo, Me Richard Malka, a jugé que cette plainte, qui a bien été reçue par le parquet de Paris selon une source judiciaire, semblait "plus fantaisiste" que les dessins de l'hebdomadaire satirique.

"On est dans le n'importe quoi. (...) A mon avis, il va y avoir un sérieux problème de recevabilité", a déclaré Me Malka à l'AFP. "Quelque chose me dit que je ne plaiderai jamais ce dossier", a-t-il poursuivi.

 

 

Site piraté

Le parquet, qui devra décider des suites judiciaires à donner à la plainte, a en revanche d'ores et déjà ouvert une enquête sur le piratage dont a été la cible, plus tôt dans la journée, le site internet de Charlie Hebdo, a-t-on précisé.

Cette enquête, confiée à la Brigade d'enquête sur les fraudes aux technologies de l'information (Befti), a été ouverte après une plainte de l'hebdomadaire pour intrusion dans un système automatisé de données.


"Apparemment, c'est une attaque encore plus massive qu'en 2011" quand Charlie Hebdo avait déjà publié des caricatures du prophète, avait déclaré le dessinateur Charb à des journalistes au siège parisien de l'hebdomadaire, en réaction au blocage du site.

 

Parallèlement, sur Facebook comme sur Twitter, opposants et soutiens de l’hebdomadaire satirique ont écrit des centaines de commentaires évoquant cette nouvelle Une, parfois avec des propos très violents. La page Facebook de l'hebdomadaire mise en ligne mardi soir avec la Une du journal comptait à 8h30 près de 1.400 messages.

 

Des message allant de "Laïcité, j'écris ton nom...", à "charlie les imbessiles (sic),il y'a d'autre (resic) moyens pour devenir populaire sans forcement devenir plus minable....pensez-y...", ou encore "la caricature de charlie hebdo représentant un dessin d'un homme nu , les fesses en l'air , qu'il appelle Mohamed est surement la position favorite du caricaturiste dans sa subconscience ..." en passant par : "Salut Charlie. Je ne remettrai jamais en cause votre "liberté d'expression" mais je trouve ça con. J’espère en avoir le droit? Je ne suis pas musulman, je pense être français, quoi que??? avant napo, je ne sais pas. Mais blesser des gens, à tord ou à raison, je trouve ca con. Des musulmans modérés blessés, je pense que vous venez de réussir à en faire beaucoup".

 

De nombreux commentaires soulignaient le contexte déjà très tendu actuellement.

 

La publication de ces caricature intervient en effet alors que plusieurs manifestations, parfois très violentes, ont eu lieu à travers le monde arabe pour dénoncer la diffusion sur internet d’un extrait du film islamophobe "Innocence of Muslims" ("L'Innocence des musulmans"). Produit aux Etats-Unis par un copte d'Egypte, ce film amateur décrit l'islam comme un "cancer". Depuis le début du mouvement de colère provoqué par ce film, 30 personnes ont été tuées.

 

Ce n’est pas la première fois que Charlie Hebdo diffuse des caricatures du prophète. En novembre 2011, après la publication d'un numéro spécial baptisé "Charia Hebdo" avec Mohammad comme "rédacteur en chef", les locaux du journal satirique avaient été incendiés et le site internet du journal piraté.

 

Charb, le directeur de Charlie Hebdo, répond aux questions des journalistes au siège de l’hebdomadaire satirique français, à Paris, le 19 septembre 2012, jour de publication d'un nouveau numéro comprenant des caricatures du prophète. AFP/FRED DUFOUR

 

 

Mesures de sécurité


Les autorités françaises ont immédiatement pris des mesures de sécurité alors qu'en 2005 la publication de caricatures de Mahomet dans un journal danois avait provoqué une longue vague de protestations dans le monde arabe.


Le Quai d'Orsay a ainsi annoncé la fermeture vendredi des ambassades, consulats et écoles françaises dans une vingtaine de pays musulmans, même s'il n'y a pas de "menace avérée sur un quelconque établissement". La France a également appelé ses ressortissants au Liban à la "vigilance". 

 

A Paris, la sécurité a été renforcée autour de l'immeuble abritant la rédaction de Charlie Hebdo.

 

(Lire : Après les Etats-Unis, la France appelle ses ressortissants au Liban à la "vigilance")

 

Dès mercredi les autorités yéménites ont de leur côté renforcé la sécurité autour de l'ambassade de France à Sanaa, tandis que la dizaine d'établissements scolaires français de Tunisie étaient fermés à la mi-journée.


Au Caire, une dizaine de fourgons de la police égyptienne et deux véhicules de pompiers équipés de canons à eau étaient stationnés autour de l'ambassade de France. Ecoles et centres culturels français dans le pays devaient fermer dès jeudi.

 

 

Réactions en série
La publication des dessins controversés a provoqué des réactions en série à l'étranger.
Al-Azhar, la plus haute autorité de l'islam sunnite, dont le siège est au Caire, a condamné ces caricatures "portant atteinte à l'islam et à son prophète", et les islamistes d'Ennahda au pouvoir en Tunisie ont estimé que les musulmans avaient "le droit de protester" après "cette nouvelle attaque contre la personne du Prophète".


La Maison Blanche a mis en doute le bien-fondé de la décision de Charlie Hebdo de publier ces caricatures.  "Nous nous posons des questions sur le jugement qui a conduit à publier de telles choses", a déclaré le porte-parole du président Barack Obama, Jay Carney, tout en jugeant que cela ne pouvait justifer "en aucun cas la violence".


A Rome, l'Osservatore romano, quotidien du Vatican, a dénoncé "de l'huile sur le feu" qui risque "d'ouvrir un nouveau front de protestation".

 

 

Liberté d'expression

Interrogé sur France Info, Laurent Fabius a défendu la liberté d'expression, mais a déploré l'initiative de l'hebdomadaire satirique dans le contexte actuel. "Est-ce que c'est pertinent et intelligent dans ce cadre là de mettre un peu d'huile sur le feu ? La réponse est non", a déclaré Laurent Fabius. "Il faut faire attention à tout ça, il faut être responsable", a-t-il encore dit.

 

Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a, pour sa part, estimé mercredi matin "comprendre que certaines personnes peuvent être heurtées dans leur sensibilité". "Mais nous sommes dans un Etat laïque, dans un Etat républicain (...) Nous sommes dans un pays où la liberté d'expression est garantie, la liberté de caricature aussi", a-t-il ajouté.

"Chacun doit exercer cette liberté", a observé le chef de gouvernement. Mais "si vraiment des personnes se sentent heurtées dans leurs convictions et pensent qu'il y a eu dépassement du droit, elles peuvent saisir les tribunaux. Ca s'est déjà produit concernant cet hebdomadaire", a relevé M. Ayrault.

 

François Fillon, candidat à la présidence de l'UMP et ancien Premier ministre, a, de son côté, déclaré, être "pour la liberté d'expression totale (...) Ce qui est en train de se passer avec cette espèce d'intolérance qui monte dans une grande partie du monde et qui est instrumentalisée par des extrémistes (...), c'est une sorte de régression par rapport à l'état de la civilisation".

 

Par ailleurs, alors que des réseaux sociaux relaient un appel à manifester samedi contre le film "Innocence of Muslims", le chef du gouvernement a indiqué à la radio RTL que ce rassemblement ferait l'objet d'une "interdiction". Il n'y a "pas de raison qu'on laisse dans notre pays venir des conflits qui ne concernent pas la France", a ajouté le Premier ministre.

 

"Nous sommes dans une république qui n'a pas du tout l'intention de se laisser intimider par qui que se soit autour de ses valeurs", a-t-il poursuivi, ajoutant : "Nous ne tolérerons pas de débordement". Il a également rendu hommage au "grand esprit de responsabilité et de modération" des responsables du culte musulman.

 

Les principaux responsables de la communauté musulmane, mais également un responsable de la communauté juive, ont déploré la publication de ces dessins, estimant que cela jetait de l'huile sur le feu.

 

Samedi, entre 200 et 250 personnes avaient pris part à une manifestation non autorisée près de l'ambassade des Etats-Unis, de l'Elysée et du ministère de l'Intérieur, un des quartiers les plus sécurisés de Paris. Y avaient participé quelques femmes intégralement voilées (tenue illégale dans les lieux publics en France, ndlr), des hommes affichant jusque dans leur apparence leurs convictions islamistes radicales, mais aussi des jeunes habillés de manière classique.

 

Selon des témoignages relevés par l'AFP, le numéro de Charlie Hebdo s'arrachait mercredi matin dans les kiosques. Dans un kiosque du IXe arrondissement de Paris, il n'y avait plus qu'un numéro à vendre à 8h30. "J'en reçois 10, et d'habitude je mets toute la semaine à les vendre, péniblement. Mais aujourd'hui, il ne m'en reste plus qu'un", a indiqué la kiosquière à un journaliste de l'AFP.

"C'est parti très fort", confirme Bernard-Yves, le kiosquier de la place Jules-Joffrin (XVIIIe). "Je l'ai vendu à des gens qui n'achètent pas Charlie d'habitude", ajoute-t-il, pronostiquant qu'il aurait tout vendu "d'ici midi".

 

 

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Une plainte a été déposée mercredi à Paris contre Charlie Hebdo pour "provocation à la haine" et une autre à Meaux pour "diffamation" et "injure publique", après la publication mercredi par l'hebdomadaire satirique de caricatures du prophète Mahomet, dont une le représentant nu, a-t-on appris de sources concordantes.
 
La première plainte, que l'AFP a pu consulter, a été...

commentaires (5)

Ils en sont "fiers" en sus, lez-ébaubis !

Antoine-Serge KARAMAOUN

09 h 38, le 19 septembre 2012

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Commentaires (5)

  • Ils en sont "fiers" en sus, lez-ébaubis !

    Antoine-Serge KARAMAOUN

    09 h 38, le 19 septembre 2012

  • Voilà d'autres provocateurs ! D'autres suivraient sans doute. L'Affaire est orchestrée. Par Qui ? Qui en profite en ces jours d'élections américaines et de prétendus printemps au M.O., et surtout avec et après la visite du pape au Liban ? La réponse vient toute seule... UN SEUL EN PROFITE !

    SAKR LEBNAN

    06 h 56, le 19 septembre 2012

  • DEGUEULASSE La liberté d'expression a ses limites Tous les journalistes au liban le savent et l'appliquent. Pourquoi en Europe seraient il différents??? Mais en Europe, ils ont perdu toute notion divine Les homos, les noirs même le Dalai Lama sont tous sacrés. Même la religion juive ( je ne parle pas de sémites) mais la religion est inattaquable car la critique est vite assimilée à de l'antisémitisme..Mais les chrétiens et musulmans ?....VAS Y que je te défonce...Au nom de la liberté d'expression et parce que tous (ou presque ) en europe sont presque athés et anti-religions. Pour les chrétiens, ils n'en parlent QUE pour aborder "la pédophilie de certains rares curés"...comme par hasard... Les musulmans pour parler de femmes voilées ou du prophète Mohammad....Oui DEGUEULASSE et PROVOCATION GRATUITE et PERVERSE ... Pousser les gens à l'extrémisme?? Qu'ils continuent de la sorte...oui DEGUELASSE...Et je pèse mes mots..

    Jean-Pierre EL KHOURY

    06 h 02, le 19 septembre 2012

  • Entre l'innocence des musulmans ...et l'innocence des journalistes de Charlie Hebdo ...nous avons le choix ,de choisir ...lol

    M.V.

    05 h 20, le 19 septembre 2012

  • Belle est la liberté d'expression mais il faudra oeuvrer mondialement à ne plus offenser les instances religieuses . Antoine Sabbagha

    Sabbagha Antoine

    05 h 03, le 19 septembre 2012

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