Rechercher
Rechercher

À La Une - Beyrouth

Siffler là-haut, sur la colline d’Achrafieh

Des centaines de Libanais ont participé à l’évènement « Discover Achrafieh » hier, faisant de cette journée sans voiture une véritable réussite.

La « petite colline » d’Achrafieh a viré au vert hier, avec des centaines de Libanais qui ont participé à l’évènement « Discover Achrafieh », faisant de cette journée sans voitures une véritable réussite. Photo Ibrahim Tawil

Pour l’habitant d’Achrafieh qui se promène dimanche dans son quartier, la journée est surprenante. Les voitures sont absentes et aucun klaxon ne retentit. C’est donc dans un environnement agréable et sans nuisance sonore que se déroule l’événement « Discover Achrafieh », organisé par le collectif Achrafieh 2020.


C’est une première, tant par le nombre d’associations qui y participent que par la réussite évidente du projet. Les habitants de Beyrouth sont venus en grand nombre afin de participer à cette journée sans voiture dans le but de promouvoir un renouveau urbain à Beyrouth. Le collectif Achrafieh 2020 entend effectuer une prise de conscience générale de la part de la population concernant la nécessité de réinventer le quartier. L’objectif semble réussi, grâce aux diverses associations et aux divers thèmes de la journée, répartis dans les différents secteurs d’Achrafieh.
Dès le matin, les vélos remplacent les voitures entre Sodeco et la place Sassine : de nombreux cyclistes viennent pour participer à la course ou bien simplement pour profiter de la seule journée où ils peuvent se déplacer en bicyclette sans risquer d’accident. Tandis qu’un couple de personnes âgées descend la route sur deux roues, Alexandre, cycliste amateur, va même plus loin : « Rien ne me ferait plus plaisir que de faire du vélo à Beyrouth tous les jours, comme en Europe. » Alexandre descend ensuite à Sodeco, où de nombreuses peintures d’artistes indépendants attirent son regard. Continuant son chemin, il croise une femme qui lui propose de faire son portrait en quelques minutes. Il tente l’expérience, et repart fièrement avec, sous le bras, un dessin de son visage.

 


Promenade près de l'ABC.

 


Boulos et le thym
Sur la place Sassine, la musique et les sportifs sont eux aussi au rendez-vous. Les vélos et quelques rollers, les coureurs à pied, ainsi qu’une foule de piétons donnent à la place une dynamique humaine, que les jeunes apprécient. Élias et ses amis sont survoltés : « On vient de se lever tôt, de boire beaucoup de café au Starbucks et on a couru toute la matinée. Personne ne voulait se lever ce matin, mais en arrivant à Sassine, avec du bon hip-hop en fond sonore et le monde qu’il y a, on comprend que ça valait le coup car l’ambiance est inouïe ! »


D’autres jeunes étudiants préfèrent descendre à Furn el-Hayek, où l’appétit est au rendez-vous. De nombreux cuisiniers et artisans viennent partager leurs plats et recettes au milieu de quelques brocanteurs, vendant bibelots et antiquités. Un couple de touristes français découvre les manakiche, tandis que Boulos, qui s’est improvisé cuisinier pour la journée, essaie de leur apprendre la prononciation en arabe de la fameuse galette de thym. Les habitants d’Achrafieh sortent en famille, et nombreux sont ceux qui déjeunent dehors, dans la rue, en se promenant entre les divers stands proposant de nombreux mets typiquement libanais.


Amale, arrière-grand-mère, demande à un organisateur de la journée où sont les activités pour les plus jeunes : à l’école Zahret el-Ihsan, où l’ONG YASA propose des jeux éducatifs. Faisant vrombir son moteur, Abdallah semble s’amuser en conduisant pour la première fois une petite voiture fournie par l’association, devant les yeux ébahis de ses deux frères qui réclament leur tour. Ce jeu a pour but de les sensibiliser à la sécurité routière et à la manière de bien conduire. Présente depuis près de 20 ans au Liban, YASA mène également de nombreuses activités dans les écoles, avec des cours théoriques et pratiques, dans le but de faire évoluer la mentalité libanaise dans son rapport à la conduite automobile et à la sécurité.

 

Basket place Sassine.


Bonbons
Cap sur Ibrine, où les photographies envahissent les murs, les jardins et les enceintes d’église. Des différents portraits jusqu’aux instantanés présentant Beyrouth en 2012, en passant par des photographies du quartier d’Achrafieh et de ses résidents dans le passé, Ibrine est rempli d’images qui ont beaucoup ému Timothée, un étudiant français en vacances à Beyrouth : « Je suis arrivé à Beyrouth hier soir, mais avec les images que je vois ici, j’ai l’impression d’être plongé dans l’atmosphère de la ville. On sent que Beyrouth porte un véritable héritage, que ces photos transmettent. J’ai hâte de découvrir ce dont il s’agit de mes propres yeux. » En effet, beaucoup de photos témoignant de l’architecture d’Achrafieh avant, pendant et après la guerre rappellent à beaucoup d’habitants des souvenirs du passé. Mikhaël apprécie les quelques photos de famille, dont les visages transmettent réellement l’esprit humain du quartier. « Apparemment, ça s’est fait sur le volontariat. Achrafieh 2020 a demandé aux gens d’envoyer des photos et ils l’ont fait ; le résultat est formidable. »


Dans les différentes rues d’Achrafieh, de nombreuses associations présentent leurs projets et interpellent les passants, le sourire aux lèvres, pour discuter et demander des soutiens. L’ambiance chaleureuse et agréable permet à de nombreux bénévoles de se faire connaître. Pour les jeunes de l’association Myschoolpulse, par exemple, il s’agit de sensibiliser les habitants d’Achrafieh sur la nécessité d’apporter des services d’éducation aux enfants hospitalisés, distribuant bracelets et bonbons pour attirer la foule.

 

A bicyclette.


Roger superstar
La visée écologique n’est pas oubliée : de nombreuses associations de protection de l’environnement, comme l’ONG « G » (Green for Good) ou le musée écologique, sont présentes à la rue Ghandour el-Saad afin de promouvoir l’écologie et le développement durable. Marie, mère de famille, passe son début d’après-midi à regarder les bouquets de fleurs : « Je ne sais pas vraiment pourquoi je suis venue là, je suis sortie de chez moi et je suis allée dans cette rue parce que ça sentait bon. L’atmosphère est sympathique et je vois tous mes voisins. On m’a dit que des familles faisaient un vide-grenier et qu’il y avait plein de vieux livres, j’espère avoir le temps de tout voir avant la fin de la journée. »
La journée est un grand succès. Sur la page Facebook de Discover Achrafieh, de nombreux internautes félicitent le collectif Achrafieh 2020, demandant la continuation du projet et de nouveaux évènements de ce genre. Roger Bejjani, organisateur de la journée, est très souvent arrêté par des personnes dans la rue, lui proposant également d’organiser des week-ends similaires.


Mais il n’y a pas besoin d’attendre la fin de l’évènement pour sentir les réactions que Discover Achrafieh a suscitées. Le bonheur de se promener dans un quartier agréable se lit même sur les visages des passants. Beaucoup de jeunes Libanais présents, comme Gilles, parlent d’une véritable « révolution verte », car cette initiative est la première en son genre : il ne s’agit pas simplement d’interdire les voitures, mais de rendre le quartier viable et vivant en faisant l’apologie de l’espace « vert » et sportif. Grâce au dynamisme des associations et au projet à long terme du collectif Achrafieh 2020, l’est de Beyrouth a pu retrouver, l’espace d’une journée, à la fois de l’énergie et du calme, une alliance pourtant bien difficile à trouver. Achrafieh espère donc beaucoup de dimanches similaires.

 

Lire aussi

La municipalité de Beyrouth se lance dans un plan de réhabilitation des espaces verts

Pour l’habitant d’Achrafieh qui se promène dimanche dans son quartier, la journée est surprenante. Les voitures sont absentes et aucun klaxon ne retentit. C’est donc dans un environnement agréable et sans nuisance sonore que se déroule l’événement « Discover Achrafieh », organisé par le collectif Achrafieh 2020.
C’est une première, tant par le nombre d’associations qui y...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut