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À La Une - Révolte

Syrie : Treimsa baigne désormais dans le sang

Indignation internationale ; les Russes poursuivent leur blocage ; au moins 63 morts hier.

Une vidéo mise en ligne par l’opposition montre les corps de quinze jeunes hommes, alignés dans des couvertures, victimes selon elle du massacre de Treimsa. AFP/YouTube

Une opération militaire était en cours hier dans les environs de Treimsa, un village syrien au nord de Hama où l’opposition impute au régime de Bachar el-Assad un nouveau massacre. Des opposants ont fait état du carnage jeudi d’environ 220 personnes dans cette localité, qui a été bombardée par des hélicoptères de combat et des chars puis livrée aux chabbiha, qui ont massacré des familles, selon eux. La plupart des victimes sont des civils, affirment-ils. Les autorités assurent quant à elles que ce sont des « terroristes qui ont péri ».

Nettoyage ethnique
Le bilan de 220 morts a été fourni par le conseil révolutionnaire de Hama, pour qui le massacre commis dans ce village majoritairement sunnite relève du « nettoyage ethnique ». « Les gens ont été tués par des tirs de chars, d’hélicoptères et d’artillerie, et exécutés sommairement », a affirmé ce groupe de l’opposition. Le village de Treimsa, situé dans une plaine en terrain agricole, est entouré de six villages alaouites perchés sur des collines et qui ont aidé les milices dans leur purge meurtrière, a accusé le mouvement. Des barrages de l’armée en bloquent par ailleurs l’accès depuis six mois.


Dans un rapport, le conseil révolutionnaire de Hama dit également que 200 bus, camions, chars et blindés de l’armée ont pris d’assaut la ville dans la matinée et que cinq hélicoptères ont été identifiés quand le bombardement a commencé. Des rebelles voisins se sont alors empressés de venir défendre le village, provoquant une bataille qui a duré sept heures. Au moins 150 corps ont été tirés par la suite des décombres et des champs voisins. Quarante personnes ont été exécutées sommairement, trente ont été brûlées, tandis que trois familles ont été tuées à coups de hache, selon les opposants.


Si ces informations sont exactes, ce qui est impossible à vérifier du fait des restrictions imposées à la presse, il s’agirait du plus important massacre en Syrie depuis le début du soulèvement. Une vidéo mise en ligne par l’opposition montre les corps de quinze jeunes hommes aux vêtements tachés de sang, alignés sur des couvertures, victimes selon les opposants de ce massacre. La télévision publique a signalé quant à elle la mort de trois membres des forces de l’ordre dans des affrontements à Treimsa et parle d’un massacre commis par des « terroristes armés », sans en fournir le bilan.

Mood au rapport
Dans un rapport, les observateurs de la Misnus, la mission de supervision des Nations unies en Syrie, qualifient « l’attaque de Treimsa de prolongement de l’opération des forces aériennes arabes syriennes (FAAS) » de Khan Cheikhoun jusqu’à Souran ces derniers jours. « La situation dans la province de Hama continue d’être très volatile et imprévisible. Les FAAS continuent de viser à grande échelle des zones peuplées au nord de la ville de Hama », écrivent les Bérets bleus. Ils n’ont pas pu se rendre à Treimsa et ne sont pas parvenus à entrer en contact avec le commandement militaire local. Toujours selon le rapport, une patrouille d’observateurs non armés s’est approchée à 6 km mais a été stoppée par les commandants de la FAAS, qui ont invoqué des « opérations militaires » en cours. Leur chef, le général Robert Mood a indiqué que son équipe était prête à se rendre dans la localité en cas de cessez-le-feu.

Cauchemar
Face à ces violences, dans une lettre adressée hier au Conseil de sécurité, l’émissaire international Kofi Annan écrit que ce nouveau massacre imputé au régime syrien rappelle une nouvelle fois « de manière tragique et macabre que les résolutions du Conseil continuent d’être bafouées » et qu’il est « impératif » de rappeler le pouvoir syrien à ses engagements. Pour Ban Ki-moon, le massacre « soulève de sérieux doutes » sur la volonté de Bachar el-Assad de respecter le plan Annan, le secrétaire général de l’ONU affirmant que l’inaction de l’ONU était un « permis de massacrer ». La secrétaire d’État américaine, Hillary Clinton, s’est dit quant à elle « scandalisée » par ces informations qui fournissent « la preuve indiscutable que le régime (syrien) a délibérément massacré des civils innocents ». Évoquant « un cauchemar » sur son compte Twitter, l’ambassadrice des États-Unis à l’ONU, Susan Rice, a quant à elle jugé que ces violences illustraient « de façon dramatique la nécessité de mesures contraignantes en Syrie ». Plus tôt, Josh Earnest, porte-parole de la Maison-Blanche, avait déclaré que Bachar el-Assad avait perdu toute légitimité en raison des « actes répétés de violence contre le peuple syrien ».

Examen à Pékin
En France, où le Quai d’Orsay a condamné une « fuite en avant meurtrière du régime Assad » et demandé au Conseil de sécurité de prendre ses responsabilités, François Hollande a exhorté la Russie et la Chine à changer leur approche. « Si nous avons chaque jour des morts, c’est parce qu’un régime a décidé d’utiliser la force pour écraser sa propre population », a-t-il ainsi déclaré, ajoutant : « Je dis aux Russes et aux Chinois, pour être clair, en ne faisant rien pour que nous puissions avancer plus directement vers des sanctions plus fortes, finalement c’est le chaos et la guerre qui vont s’installer en Syrie au détriment de leurs intérêts. » L’Union européenne a elle aussi condamné « dans les termes les plus forts » le massacre, dénonçant une « violation flagrante » du plan Annan. Le Canada a en outre vivement condamné cette tuerie. Le Conseil de coopération du Golfe (CCG) a lui dénoncé le « massacre horrible » et pressé le Conseil de sécurité de l’ONU d’agir sous le chapitre VII de la Charte des Nations unies pour mettre fin au bain de sang dans ce pays. L’Organisation de coopération islamique (OCI) a aussi vivement dénoncé le « massacre » et appelé le Conseil de sécurité de l’ONU à agir pour mettre fin au bain de sang dans ce pays.


Pékin a indiqué quant à elle qu’elle « examine sérieusement » un projet de résolution sur la Syrie, a fait savoir le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères Liu Weimin.


Le Conseil national syrien (CNS) a de son côté évoqué le plus « infâme des génocides commis par le régime syrien » et a pressé le Conseil de sécurité d’adopter une résolution contraignante « urgente » « . Les Frères musulmans de Syrie, membres influents du CNS, se sont eux déchaînés contre M. Annan, mais aussi contre l’Iran et la Russie, les accusant d’être « responsables » de la tuerie par leur inaction.

Gatilov
Avec l’appui de la France, la Grande-Bretagne avait fait circuler mercredi soir un projet de résolution invoquant le chapitre VII de la Charte des Nations unies, qui peut autoriser le recours à la force, pour faire appliquer le plan de paix élaboré par Kofi Annan et accepté par le pouvoir syrien comme par l’opposition. Mais l’hypothèse d’une telle résolution se heurte de nouveau à la position de la Russie, qui a réclamé une enquête sur Treimsa et a fait savoir qu’elle n’accepterait aucune résolution du Conseil de sécurité de l’ONU placée sous le chapitre VII. Malgré tout, les 15 membres du Conseil étaient réunis hier soir pour poursuivre leurs tractations.


La Russie souhaite par ailleurs que M. Annan travaille plus activement avec l’opposition syrienne, a rapporté l’agence de presse Interfax. » Pour être honnête, nous constatons que nos partenaires ne sont pas aussi prêts que la Russie à travailler avec l’opposition et Kofi Annan est le principal médiateur dans ce processus », a déclaré le vice-ministre russe des Affaires étrangères Guennadi Gatilov, cité par Interfax, ajoutant que « malheureusement, jusqu’à présent, nous n’avons vu aucun résultat concret de ses contacts et des contacts de son équipe avec l’opposition ». Selon une source proche du ministère des Affaires étrangères citée par RIA, Annan se rendra à Moscou lundi pour discuter avec le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov de la situation en Syrie.


Par ailleurs, sur le terrain, à travers le pays, les violences sont restées intenses, avec au moins 63 morts (24 soldats, 22 rebelles et 17 civils), selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). L’armée a ouvert le feu pour disperser les manifestations dans plusieurs quartiers de Damas, mais aussi à Alep. Dans la soirée, l’agence officielle SANA a indiqué qu’une voiture avait explosé sur l’autoroute de Mazzé, près de la capitale.

Une opération militaire était en cours hier dans les environs de Treimsa, un village syrien au nord de Hama où l’opposition impute au régime de Bachar el-Assad un nouveau massacre. Des opposants ont fait état du carnage jeudi d’environ 220 personnes dans cette localité, qui a été bombardée par des hélicoptères de combat et des chars puis livrée aux chabbiha, qui ont massacré des...
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