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Culture - Théâtre

Pâle reflet de « L’Amant » de Marguerite Duras

Un livre qui s’est vendu à plus de trois millions d’exemplaires, qui a été couronné du prix Goncourt en 1984 et porté à l’écran, avec un succès controversé, par Jean-Jacques Annaud. Il s’agit de « L’Amant » de Marguerite Duras, autofiction sur les relations sexuelles d’une adolescente française en Indochine, en 1930.

Une torride passion mise en scène dans une épure que n’aurait pas reniée Cocteau.

On le retrouve à Masrah al-Madina, en un monodrame anglais teinté d’un fort accent lituanien. Avec une actrice qui a certes du talent, mais qui n’a plus les quinze de l’héroïne... Minimalisme de décor de scène avec quelques grenades et des coquillages sur un luisant rectangle en plastique. Pour fond d’horizon de ce huis clos avec soi et l’ombre des autres, un tissu blanc mobile en guise de « louvres » baissées d’une fenêtre toujours fermée.
Émerge Beirutè Mar (du Théâtre de Lituanie), une comédienne au visage doux, à la voix chuchotante et à l’anglais marqué des intonations des gens des pays de l’Est.
Petite robe blanche, souliers et capeline rouge pour un flot de paroles, en soliloque, dévoilant une torride passion doublée des premières expériences sexuelles. Confidences solitaires qui vont déborder les feux de la rampe et submerger les quelques spectateurs venus revivre ou découvrir les lignes de l’un des romans les plus lus de l’auteure d’India Song et de celle qui a signé le script de Hiroshima mon amour d’Alain Resnais.
Une petite fille de quinze ans et demi, gamine à la maturité de femme, confronte la violence de l’amour avec un trentenaire hors de son cercle de colonialistes français. Voilà une étrangère et un autochtone asiatique en prise avec la société et les conventions. Le corps exulte, mais les drames éclatent. Refus d’une mère de voir sa fille « dévoyée », père sommant son fils de prendre épouse locale, lutte d’Occidentaux et de colonisés
puissants.
Tout finit bien entendu par une rupture et longtemps, bien longtemps plus tard, l’amant, dûment marié ailleurs, prendra des nouvelles de la « petite » installée à Paris. Pour lui dire que ses sentiments sont pour toujours...
Non, ce n’est certainement pas une bluette, un peu à la Lolita, que veut raconter Duras. Ce n’est guère là une simple volonté de traduire la réalité. Car sous-jacents, il y a les clivages et les rapports de force de l’argent, du colonialisme, des différences de culture et de civilisation. Par-delà l’éblouissement des corps, il y a l’incertitude de la quête de soi et le désir de maîtriser une vie.
Avec cette transposition théâtrale d’un roman complexe et voué à la gloire charnelle, l’adaptation et performance de Berutè Mar a réduit l’ouvrage à une simple épure, à de chagrins aveux d’une femme que n’aurait pas reniés Cocteau, avec un pâle reflet d’un amant désespérément absent, car jamais visible.
Un amant qu’on voit seulement à travers les propos d’une narratrice se vautrant dans une désolante solitude. Pour tout dire, manque à cette « love story » corsée, très contemporaine et à réflexion, toute la dimension épidermique qui nourrit l’œuvre initiale. Sans parler de la beauté de la langue « durassienne », totalement gommée par cette version anglophone généreusement écorchée dans sa diction un peu en salade russe.
On le retrouve à Masrah al-Madina, en un monodrame anglais teinté d’un fort accent lituanien. Avec une actrice qui a certes du talent, mais qui n’a plus les quinze de l’héroïne... Minimalisme de décor de scène avec quelques grenades et des coquillages sur un luisant rectangle en plastique. Pour fond d’horizon de ce huis clos avec soi et l’ombre des autres, un tissu...

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