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Moyen Orient et Monde - Reportage

Le quotidien des Syriens se trouve bouleversé par la révolte

A Damas, les Syriens font des réserves d'essence. Louai Beshara/AFP

« Je hèle un taxi qui s’arrête. Mais dès que j’indique ma destination, le chauffeur s’excuse et redémarre. » Hicham, un responsable de chantiers dans la région de Damas, n’en finit plus de pester contre le déploiement des forces de l’ordre autour de la capitale. Les chauffeurs de taxi disent « craindre les points de contrôle » à l’entrée et à la sortie des agglomérations, explique ainsi Hicham, 48 ans, qui habite la banlieue de Damas.


Comme de nombreux Syriens, il se déplace en taxi : avoir une voiture est trop cher. D’autant plus que le prix de l’essence a beaucoup augmenté depuis le début de la révolte contre le régime de Bachar el-Assad il y a un an. « Les 20 litres d’essence valent aujourd’hui 14,3 USD alors qu’avant la crise, ils valaient 11,4 USD », confie Nidal, un chauffeur de taxi.


À Damas même, les mesures de sécurité mises en place autour des édifices publics depuis des attentats contre des bâtiments des forces de l’ordre ayant fait des dizaines de victimes ont créé un sentiment d’insécurité chez les habitants.

 

Un mur en béton armé a été érigé autour du ministère de l’Intérieur et des barrages ont été établis près des sites militaires, alors que la circulation a été interdite sur des routes conduisant à des commissariats. Autant d’images qui tranchent radicalement avec celles de l’avant-printemps arabe, quand Damas était réputée pour être une ville sûre.


La révolte, et sa répression féroce, ont donc bouleversé la vie des Damascènes qui avaient l’habitude le week-end d’aller en famille dans les vergers des villages avoisinants, notamment à Zabadani et Ghouta, récent théâtre de violents affrontements. Ceux qui osent encore s’y aventurer risquent de voir leur promenade tourner court.

 

Se rendant avec sa famille à Zabadani pour voir la neige sur les hauteurs du village, un homme a été stoppé net à un barrage de l’armée, où il lui a été demandé de faire demi-tour. « Il semble que tu ne regardes que la chaîne de télévision Dounia (proche du pouvoir). Rentre chez toi et regarde la chaîne al-Jazira » du Qatar, lui a conseillé, sur le ton de l’ironie, un soldat en faction au point de contrôle, selon des habitants. Al-Jazira, comme al-Arabiya (à capitaux saoudiens), assurent une large couverture de la répression et sont accusées par Damas de faire la propagande « des bandes terroristes armées » auxquelles les autorités imputent les violences.


Elham, qui habite la ville côtière de Lattaquié, dans l’ouest du pays, déplore également ne plus pouvoir voir sa fille qui habite Damas. « Elle avait l’habitude de nous rendre visite chaque week-end. Elle me manque beaucoup. Mais j’ai peur que des hommes armés attaquent le bus qu’elle prend », explique cette mère de famille, qui n’a pas vu sa fille depuis quatre mois. Cette femme de 52 ans admet cependant que son « sacrifice » n’est rien comparé aux souffrances d’autres familles, endeuillées par les violences qui ont fait des milliers de morts en un an.


Autre conséquence des violences : les fréquentes coupures du courant électrique, désormais rationné entre 6 et 12 heures par jour. Le ministre de l’Électricité Imad Mohammad Dib Khamis a justifié ce rationnement par « une hausse de la demande (...) et la perturbation de l’approvisionnement des centrales électriques en carburant après des attentats contre des oléoducs par des groupes terroristes ». Des militants de l’opposition affirment eux que les autorités réservent leurs stocks de produits pétroliers aux véhicules et engins militaires, dépêchés dans les différentes régions du pays pour mater la révolte.

« Je hèle un taxi qui s’arrête. Mais dès que j’indique ma destination, le chauffeur s’excuse et redémarre. » Hicham, un responsable de chantiers dans la région de Damas, n’en finit plus de pester contre le déploiement des forces de l’ordre autour de la capitale. Les chauffeurs de taxi disent « craindre les points de contrôle » à l’entrée et à la sortie des...
commentaires (2)

Le chauffeur de taxi peut remercier "Dounia" car il a eu la vie sauve! En d'autre circonstance il aura eu droit a une balle dans la tête. Le Soldat devait probablement être de ... Homs!

Pierre Hadjigeorgiou

06 h 36, le 14 mars 2012

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Commentaires (2)

  • Le chauffeur de taxi peut remercier "Dounia" car il a eu la vie sauve! En d'autre circonstance il aura eu droit a une balle dans la tête. Le Soldat devait probablement être de ... Homs!

    Pierre Hadjigeorgiou

    06 h 36, le 14 mars 2012

  • "Il semble que tu ne regardes que la chaîne de télévision Dounia (du milliardaire Rami Makhlouf, cousin germain du président syrien). Rentre chez toi et regarde al-Jazira", lance "ironiquement" le soldat au point de contrôle au citoyen qui va à Zabadani. Pour lui signifier en fait : N'es-tu pas au courant de ce qui se passe, de la réalité, de la vérité ? Une preuve flagrante que même les soldats syriens savent bien que la chaîne Dounia, le journal al-Watan (de Rami Makhlouf aussi) et tous les médias syriens (officiels) ne disent que des mensonges, lorsqu'il affirment que tout va bien dans le meilleur des mondes.

    Halim Abou Chacra

    00 h 38, le 14 mars 2012

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