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À La Une - Portrait-L'Orient Littéraire

Rajaa Alem, la fille d'une autre Mecque

Saoudienne issue d’une famille de soufis et née à la Mecque, Rajaa Alem est une écrivaine au style complexe et hérmétique, dont le talent est largement reconnu et récompensé. Comme quoi la ville sainte de l'Islam ne parle pas toujours que d'une seule voix.

"Notre vie physique n’est qu’une tentative continue pour s’unir avec l’absolu."

Il est difficile de croire qu’il existe quelque part une autre Mecque, une autre Arabie saoudite que cette terre austère de l’islam rigoriste et de l’interdit que l’on croit connaître sans même avoir besoin d’y mettre les pieds. Et pourtant, malgré le règne des innombrables princes et leur atroce moutawa, malgré l’exubérance du pétrole et le fourmillement des pèlerins, malgré les voiles de la prohibition et le poids du silence imposé, une ville, une terre différente, inconnue, inexplorée, oubliée, continue de respirer. Une Mecque intime, secrète, mystérieuse, timide, farouche, insondable, que l’on ne rencontre que dans l’œuvre de Rajaa Alem, probablement nulle part ailleurs.

 

Cette Mecque-là, la romancière, dramaturge et conteuse saoudienne aspire à l’entretenir, à la faire vivre, à la retenir d’une chute dans l’oubli, établissant avec elle une relation quasi fusionnelle. « La Mecque est ma première ville, elle a façonné mon identité et me représente comme mon empreinte digitale », affirme-t-elle lors d’un entretien avec L’Orient Littéraire dans son domicile parisien. « Ma bonne fortune a voulu que je naisse dans la ville vers laquelle se dirige le cinquième de la population mondiale pour accomplir ses prières quotidiennes, dans ce centre d’une énergie universelle, ajoute-t-elle. C’est comme si nous autres Mecquiens nous trouvions au cœur d’un mouvement de marées haute et basse d’énergie chaque jour. Cela élargit nos perspectives. »

 

Du fait de son attachement à la ville qui persiste bien qu’elle ait décidé d’élire domicile à Paris, Rajaa Alem lui a consacré nombre de ses romans, notamment ses œuvres les plus célèbres auprès du public Khatêm et Tâwq el-Hamama, lauréat du prix international de la Fiction arabe en 2011. Dans le premier, la face cachée de La Mecque se révèle à travers les tribulations d’une androgyne, habillée en garçon par son père pour compenser l’absence d’héritier mâle dans la famille. Dans le second, la beauté du patrimoine de la ville et de son passé affronte un présent mercantiliste. Ce sont d’ailleurs ce passé et ce patrimoine qui unissent Rajaa Alem et La Mecque. Pour la romancière, la ville n’est en effet « pas seulement le centre de l’islam, mais aussi le berceau d’une religion païenne qui a précédé » le monothéisme mahométan. « L’histoire et les légendes de cette terre m’habitent comme les djinns prennent possession des hommes, confie-t-elle. Je ne les ai pas étudiées, mais elles ressortent spontanément sous ma plume. La Mecque apparaît soudain, je la vois quand j’écris, avec son patrimoine qui est si riche de l’échange avec l’autre et qui n’est pas un obstacle. La Mecque n’est pas une ville cloîtrée mais un lieu de rencontre. Je suis la seule héritière de son histoire que je veux écrire pour la protéger de la disparition. »

 

 

Retrouvez l'intégralité de cet article sur le site web de L'Orient Littéraire.

Il est difficile de croire qu’il existe quelque part une autre Mecque, une autre Arabie saoudite que cette terre austère de l’islam rigoriste et de l’interdit que l’on croit connaître sans même avoir besoin d’y mettre les pieds. Et pourtant, malgré le règne des innombrables princes et leur atroce moutawa, malgré l’exubérance du pétrole et le fourmillement des...

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