Rechercher
Rechercher

Lifestyle - Société

En Allemagne, l’art s’empare de la culture discount

« I love Aldi », une exposition qui retrace à sa manière le phénomène de la consommation de masse.

Un caddie géant trône dans un coin de l’exposition. Célèbre-t-il le triomphe du pouvoir d’achat ou menace-t-il d’écraser le consommateur ?

Un caddie noyé sous une montagne de sucre, une installation de saucisses sous vide : un musée allemand dédie une exposition d’art contemporain à la culture du « hard discount », dont les magasins Aldi en Allemagne ont été les pionniers.
À Ludwigshafen, ville industrielle au bord du Rhin où le géant mondial de la chimie BASF a ses quartiers, les supermarchés à bas prix occupent jusqu’au centre-ville, et même les grands magasins Karstadt, ailleurs une enseigne haut de gamme, existent ici sous la forme d’un « centre des bonnes affaires ». À quelques centaines de mètres de là, cerné par des agences pour l’emploi, le musée Wilhelm-Hack semble lui aussi s’être reconverti dans le discount, avec sa grande affiche « I love Aldi ». « Ludwigshafen est une ville représentative de la distribution à bas prix (...) mais “l’aldisation”, c’est-à-dire la recherche du moindre coût, est devenue depuis longtemps un phénomène de société qui a envahi toutes les classes sociales et les entreprises », explique Reinhard Spieler, le directeur du musée. « C’est un phénomène très allemand, surtout pour l’alimentaire. Les Allemands comptent parmi les Européens qui dépensent le moins pour l’alimentation et la concurrence est très rude sur ce marché », ajoute-t-il.
Fidèle à sa discrétion légendaire, Aldi n’a pas commenté l’exposition. Un projet de coopération avec le musée a été exclu d’emblée. Et aucun représentant du secteur du discount n’a accepté son invitation à participer à ses conférences sur le sujet. Cette « stratégie du silence qui caractérise les magasins à bas prix est une perte culturelle, car l’alimentation devient culture à partir du moment où l’on en parle, tout comme l’art », regrette M. Spieler.
L’exposition, qui dure jusqu’au 4 mars, a des réminiscences du pop art et du mouvement Fluxus, qui dans les années 1960 s’interrogeaient déjà sur l’art et l’industrie de masse et brouillaient les frontières entre deux mondes a priori inconciliables. L’ambiance oscille entre les sirènes du « luxe pour tous » – un slogan de Lidl, compatriote d’Aldi – et les inquiétudes concernant l’envers du décor. Plus de 2 000 saucisses sous vide jonchent le sol et semblent toujours comestibles, bien qu’elles aient été achetées depuis plusieurs mois et exposées à la température ambiante. Ailleurs, des milliers de toasts forment un carré de maisonnettes uniformes, un spectacle à la fois touchant et triste. Un caddie géant trône dans un coin. Célèbre-t-il le triomphe du pouvoir d’achat ou menace-t-il d’écraser le consommateur ? Plus loin, un autre caddie est enseveli sous 7 tonnes de sucre blanc : pureté ou gloutonnerie ? Le sentiment d’écœurement est total avec une vidéo qui transporte le spectateur dans une usine d’équarrissage où les employés, bercés par le son enjoué de la radio, dépouillent et dépècent des charognes de bovins.
Ailleurs dans la galerie, un tableau abstrait de l’artiste allemand Günter Fruhtrunk (1923-1982) côtoie le sachet en plastique d’Aldi Nord, dont il a conçu le motif aux lignes bleues et blanches en 1970 et qui est toujours en circulation. L’artiste avait eu honte plus tard de son œuvre la plus célèbre et avait déclaré avoir « péché ». Dans un rare moment d’audace, Aldi avait franchi lui-même le Rubicond en vendant à prix cassés en 2003 et 2004 dans ses magasins en Allemagne des reproductions de tableaux signées par des artistes reconnus. Les œuvres s’étaient vendues comme des petits pains.
                   (Source : AFP)
Un caddie noyé sous une montagne de sucre, une installation de saucisses sous vide : un musée allemand dédie une exposition d’art contemporain à la culture du « hard discount », dont les magasins Aldi en Allemagne ont été les pionniers.À Ludwigshafen, ville industrielle au bord du Rhin où le géant mondial de la chimie BASF a ses quartiers, les supermarchés à bas prix...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut