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À La Une - Afghanistan

Pour ne pas mourir, Gulnaz est résignée à épouser son violeur

Emprisonnée deux ans pour "adultère", la jeune femme a été graciée début décembre.

Gulnaz dit avoir "20 ou 21" ans. Capture d'écran/CNN

Tout juste libérée de prison, où elle a passé deux ans pour "adultère" après avoir été violée, Gulnaz, une jeune Afghane, est désormais menacée de mort par ses propres frères et résignée à se marier avec son agresseur pour pouvoir continuer à vivre.

 

Graciée début décembre, sous la pression d'une pétition signée par 5.000 personnes réclamant sa libération, Gulnaz, qui dit avoir "20 ou 21" ans, est finalement sortie de prison mardi. Mais elle vit à nouveau recluse, cachée dans un refuge pour femmes, placé sous l'autorité du ministère afghan des Affaires féminines et gardé secret, où l'AFP l'a rencontrée samedi.

 

En prononçant sa grâce, les responsables judiciaires afghans avaient recommandé qu'elle épouse son violeur, pour lui éviter d'être en danger après sa libération, en raison de la stigmatisation qui frappe les femmes victimes de viols en Afghanistan.

 

"Je dois me marier avec lui, j'ai besoin d'un père pour mon enfant, besoin de quelqu'un qui s'occuppe de ma fille et nous donne un foyer", explique Gulnaz à propos de son agresseur, toujours en prison. La jeune femme a refusé d'être photographiée ou filmée. "Je n'ai nulle part où aller, mes frères ont menacé de nous tuer, moi, mon agresseur et ma fille", ajoute-t-elle, alors que sa fillette, fruit du viol, qu'elle a élevée durant deux ans dans sa prison, joue à ses pieds.

 

Son agresseur est le mari de sa cousine. C'est en portant plainte auprès de la police qu'elle a été arrêtée, assure-t-elle.

"J'ai porté plainte et demandé au gouvernement d'arrêter cet homme, mais ils m'ont arrêté moi. Pourquoi ai-je été emprisonnée alors que je suis innocente?", demande-t-elle. "Je ne sais pas quel sorte de gouvernement nous avons, ils n'ont même pas pitié d'une pauvre femme. J'ai dénoncé ce qui était arrivé pour obtenir justice, mais on m'a mise en prison".

 

En raison des différents appels, Gulnaz et son agresseur ont été jugés trois fois, et par trois fois condamnés tous les deux. Une première Cour d'appel avait fait passer la peine de Gulnaz de trois à 12 ans de prison, la même que son agresseur, condamné à 16 ans en première instance. En dernier ressort, elle a écopé de trois ans de prison, son agresseur de sept.

 

En prononçant la grâce de Gulnaz, le président afghan Hamid Karzaï et les autorités judiciaires ont reconnu que les victimes de viol ne devaient pas être poursuivies, estime l'avocate américaine de Gulnaz, Kimberley Motley, basée partiellement à Kaboul. "Malheureusement, la culture (afghane) veut souvent que même si une femme est violée ou une victime, la meilleure façon pour elle de se protéger est d'épouser son agresseur", a-t-elle expliqué à l'AFP.

"Les femmes sont souvent traitées comme des citoyens de seconde classe et n'ont pas voix au chapitre. La meilleure solution pour elles est d'avoir une figure masculine pour les protéger et je pense que Gulnaz se débat actuellement avec toutes ces questions", a-t-elle ajouté. Selon elle, Gulnaz "essaie de savoir quelle est la meilleure façon de se protéger et de protéger sa fille".

 

Dix ans après la chute du régime ultra-rigoriste des islamistes talibans, chassés du pouvoir par une coalition emmenée par les Américains, la condition des femmes afghanes a évolué, surtout dans les villes, mais la société afghane reste fortement traditionaliste et patriarcale, et des pratiques telles que les mariages forcés et les "crimes d'honneur" restent monnaie courante.

 

L'ONU soulignait dans un récent rapport qu'aucune statistique officielle n'était disponible en Afghanistan sur les cas de violences contre les femmes, et que la plupart n'étaient pas signalés.

Selon l'ONG Oxfam, 87% des Afghanes disent avoir subi "des violences physiques, sexuelles ou psychologiques ou avoir été obligées de se marier de force" et de nombreuses filles tentent de se suicider pour échapper à ces traitements.

Tout juste libérée de prison, où elle a passé deux ans pour "adultère" après avoir été violée, Gulnaz, une jeune Afghane, est désormais menacée de mort par ses propres frères et résignée à se marier avec son agresseur pour pouvoir continuer à vivre.
 
Graciée début décembre, sous la pression d'une pétition signée par 5.000 personnes réclamant sa libération, Gulnaz, qui dit...

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