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À La Une - Le billet

Quand l’homme se rêve rat-taupe

Au rythme où va la recherche, bientôt, nous mourrons en bonne santé.

Chaque mois, relevait récemment un expert dans le domaine, près de 1 000 articles scientifiques sur la biologie du vieillissement ou de la longévité sont publiés.
Certes, c’est bien moins que le nombre d’articles publiés sur le printemps arabe, mais la biologie du vieillissement ne peut se permettre le luxe de l’approximation et de la supputation, les deux mamelles de trop d’analyses géopolitiques.
Entre autres pistes pour ralentir le vieillissement voire inverser le processus de dégénérescence, les scientifiques proposent la reprogrammation des cellules centenaires en cellules souches et un traitement enzymatique réparant les télomères. Les télomères étant l’extrémité des chromosomes qui recèlent, entre autres joyeusetés, les clés du vieillissement, des cancers et d’autres pathologies dont on se passerait bien.
À terme, ces découvertes devraient nous permettre d’éviter les affres de la vieillesse, à savoir maladies et sénilité, et nous rapprocher, nous humains, du rat-taupe.
Ceci est une bonne nouvelle. Enfin, en quelque sorte...

Le rat-taupe, animal blanchâtre, bigleux et doté de deux aberrantes incisives, est un fouisseur qui passe des dizaines d’années à creuser des terriers. Et ce sans se fatiguer, au grand dam des jardiniers. Il creuse, creuse et creuse encore jusqu’au jour où, sans le moindre signe avant-coureur, coup de mou ou poussée de fièvre, il casse sa pipe.
L’animal meurt a priori sans souffrance. Une mort subite, comme une (mauvaise) surprise. Une mort au léger parfum de frustration tout de même. Mourir en pleine santé... comme un sentiment de gâchis.

Si l’on sort le nez du nombril, l’on réalisera que mourir en bonne santé a des implications qui dépassent largement notre petite personne.

Pour les États ayant encore des ambitions sociales et une sécurité du même nom, mourir en bonne santé est une aubaine en forme d’économies majeures. La solution inespérée pour combler le trou de la sécu.

Pour l’industrie cosmétique, en revanche, le ralentissement du vieillissement voire l’arrêt du processus de dégénérescence relève du cauchemar.
Finis botox, lifting, raffermissement de la fesse et redressement du sein. Finie l’ère de l’anti-âge, l’anti-tâche, l’anti-ride, l’anti-relâchement. Finis les vibreurs qui restaurent les capacités de drainage, les soins resubstanceurs, les vecteurs accélérateurs de collagène, les technologies exclusives et ciblées, les co-enzymes et autres activateurs d’énergie. Finies les crèmes qui « se déroulent sur la peau à la façon d’un patch et accrochent le fond de la ride pour la remonter ».

Fini, de manière générale, le marché du troisième âge dans sa dimension déclinante, de l’appareil auditif au fauteuil releveur, en passant par le téléphone à grosses touches et le déambulateur.
Avec l’avancée de la science, le secteur du tourisme sera également appelé à se réinventer. Finies les minicroisières pour seniors le long des falaises de la Côte Vermeille, place à la croisière s’amuse aux Baléares.

Mais au-delà de ces histoires de gros sous, c’est ailleurs que se jouera le grand chambardement. C’est au niveau des relations sociales et humaines que la vraie révolution est à prévoir.
Exit la crise de la cinquantaine. Pourquoi aller chercher une jeunette, quand sa légitime est encore fraîche et pimpante.
En revanche, bonjour la crise de la vingtaine. Pourquoi se taper une godiche/un jeunot, quand on peut avoir l’expérience sans les ravages du temps. L’heure de gloire de Mrs Robinson et de son homologue masculin va sonner.

C’est donc au moment où la jeunesse prendra des airs d’éternité que l’on réalisera à quel point cette jeunesse est passablement surévaluée.
Au rythme où va la recherche, bientôt, nous mourrons en bonne santé.Chaque mois, relevait récemment un expert dans le domaine, près de 1 000 articles scientifiques sur la biologie du vieillissement ou de la longévité sont publiés.Certes, c’est bien moins que le nombre d’articles publiés sur le printemps arabe, mais la biologie du vieillissement ne peut se permettre le...

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