Pauvres passagers étrangers qu’on croit leurrer, victimes de maintes illusions. Une gent qui ne révère que le corps de mannequins surfaits, malgré les buffets foisonnant de mezzés qu’on laissait défiler pour titiller les papilles.
Soit. Cela ne constitue pas, seul, le propos de mon accusation. J’accuse avoir vu des nombrils se trémousser sur les bars et dans les night-clubs, sous la rubrique « Activities ». J’accuse n’avoir vu aucune autre activité saine, ni vélo, ni trekking en montagne, ni jogging, ni skiing, ni running à cheval. Allez, alléchons touristes et indigènes, montrons les liftées qui se déhanchent sur une techno déjantée. Et j’attendais, j’attendais dans l’espoir de voir les galeries d’art, peinture, photographie, sculpture, Gibran, Néaïmé, Rihani, Astarté et Adonis, des artistes qui installent des affiches de théâtre, une école de ballet, l’orchestre symphonique... tout ce qui titille les neurones assoiffés de culture et qui montre l’autre visage du pays, le beau visage. Mais surtout je guettais l’apparition du musée national, poteries, lampes à huile, verre irisé, motifs omeyyades, bijoux anciens... Disparus, volatilisés de la mémoire, de l’existence.
Et qu’a-t-on fait des conférenciers à l’université, des écrivains en pleine gestation d’œuvres, un promeneur qui lit tranquillement son journal sur la corniche ou sous le perron d’une maison traditionnelle, à l’ombre des belles arcades de pierre, oubliant quelques instants les tours qui dominent et atterrent ?
« Welcome to Lebanon », situation lacrymale.
On a tué Ahiram et ravi son sarcophage !
Bon atterrissage.