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À La Une - Un peu plus de...

Angoisse 2.0

BBM (l’instant messaging de BlackBerry) a buggé. Les Libanais aussi. Agitation générale. Que se passe-t-il? Comment on fait? Comment on va faire? Comme si le BB User ne savait pas fonctionner via SMS, comme si Internet, qui disparaît de son téléphone, l’empêchait de vivre normalement. Du grand n’importe quoi. BB a collapsé? Et que ça pleut des commentaires sur Facebook ou sur Twitter. Débandade absolue, déconnexion du monde. On philosophe sur l’inutilité d’avoir un Smartphone, qu’on en est l’esclave. Bla-bla-bla... Effectivement. Il y a quelques années encore, on se passait de ce petit clignotement rouge, des cellulaires, de Facebook, du Net, de Twitter, du WiFi, de l’ADSL, des chats, du câble et de ses 150 chaînes, du iPod et des ordinateurs portables. Et on ne s’emmerdait pas. Mais alors pas du tout. Bien au contraire. On se portait très bien. Mieux même. On ne connaissait pas ces angoisses 2.0. Ni la peur de voir son téléphone rendre l’âme ni la peur d’être déconnecté du monde. On n’était pas joignable tout le temps. The person you have called is unreachable/unavailable for the moment, please try again later. Le bonheur. Injoignable, introuvable, intraçable. Pas d’intrusion dans la vie privée. On était bien. On était bien parce qu’on ne savait pas. On ne savait pas ce que c’était d’être à la merci des nouvelles technologies. On ne savait pas qu’on pouvait vivre avec. Faut pas s’étonner, en conséquence(s), que les gens se mettent à paniquer quand on leur impose de vivre sans. Ces angoisses-là sont là, sont tout aussi nouvelles que l’est notre immaturité face à ces nouvelles technologies. On n’a pas assez de culture ni de recul pour appréhender ce qui peut nous arriver quand on se retrouve dans une situation du genre. Alors va pour l’excès. En tout et pour tout. Panique à bord si Internet plante durant une journée, si on n’a pas de WiFi, si WhatsApp déconne. Et pire encore, si Facebook change d’interface. Le système pète une durite. Ah l’explosion des réseaux sociaux. Twitter, Google + et surtout, surtout, le site de Mark Zuckerberg. On est happé en permanence, stimulé, excité par les informations, les données. Et soudain, on stresse. FOMO. Fear of Missing Out. Cet acronyme est de plus en plus utilisé dans le vocabulaire urbain. Mais qu’est-ce que ça veut dire, allez-vous me demander. Tout simplement, la peur de rater quelque chose. Ce samedi, je fais quoi? Je vais au vernissage nocturne ou au concert de jazz? À la soirée de X ou à l’anniversaire de Y? Ces petits dilemmes n’ont rien de nouveau, sauf qu’avec les réseaux sociaux, ils pullulent live sur nos écrans. On y va ou pas? Et maintenant, on va où? Quel événement vaut la peine de se déplacer? Quelle soirée rater? Anxiété massive à tel point que parfois, on finit par aller nulle part. Et comme par hasard, la soirée qu’on a loupée au SkyBar était la plus belle de l’été, le samedi où on n’est pas monté à Faraya, la neige était sublime, le spectacle du Festival de Byblos était grandiose, et même ce déjeuner auquel on n’a pas pu assister avec ses trois meilleures amies était génial parce que bourré de confidences. Surtout que les photos de ce fameux déj défilent sur l’écran de notre ordi alors qu’on est censé bosser. Ça avait l’air de papoter, de rigoler et ça a le don de nous agacer. FOMO, un syndrome lié à l’addiction à Internet? Ou juste une envie irrépressible de rester connecté en permanence afin de savoir ce qui se passe, afin de ne rater aucun événement, afin de ne laisser échapper aucune information intéressante... les non-adeptes du Web et de ses pratiques trouveront ça totalement immature et profondément débile. Certes, mais dans un pays comme le nôtre où le social, le mondain, la surenchère de la soirée de l’été, de l’expo de l’automne, de la signature de bouquin la plus hype, du mariage le plus décalé sont de rigueur, on finit par perdre le nord. Certains s’en tapent comme de l’an 40 et les plus fragiles en souffrent. Qu’est-ce que je vais mettre? Je ne pourrais pas y aller avant 23 heures. Et si je n’y suis pas à cette soirée ultrachiante où il fallait être, où le Tout-Beyrouth était? Pourquoi n’ai-je pas été invité(e)? Je ne fais donc pas partie des happy few? Walaw... Il faut juste se rappeler qu’avant – parce qu’il y a indéniablement un avant et après le Web 2.0 – quand on avait l’embarras du choix, c’était plutôt bon signe. Et puis, il faut savoir parfois briller par son absence.
BBM (l’instant messaging de BlackBerry) a buggé. Les Libanais aussi. Agitation générale. Que se passe-t-il? Comment on fait? Comment on va faire? Comme si le BB User ne savait pas fonctionner via SMS, comme si Internet, qui disparaît de son téléphone, l’empêchait de vivre normalement. Du grand n’importe quoi. BB a collapsé? Et que ça pleut des commentaires sur Facebook ou sur...

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