Rechercher
Rechercher

La transition en Libye est un projet à long terme

La prolifération des armes inquiète dans le pays et en dehors

Beaucoup redoutent que les équipements militaires délaissés ne tombent entre les mains d’el-Qaëda ou n’alimentent les conflits au Sahel ou dans la bande de Gaza.

Des jeunes Libyens, assis sur un missile Scud, profitent de l’ombre d’un arbre pour se reposer. Reuters/Goran Tomasevic

Des adolescents brandissant des kalachnikovs dans les rues de Tripoli aux combattants armés de lance-roquettes sur le front, les armes sont partout en Libye et mettent en péril l’assise des nouvelles autorités.
Cette prolifération inquiète aussi hors de Libye, où beaucoup redoutent que ces armes ne tombent dans les mains de groupes terroristes comme el-Qaëda ou n’alimentent les conflits en cours comme au Sahel ou dans la bande de Gaza.
Sur un site de construction abandonné dans les faubourgs de Tripoli, des boîtes vides sont éparpillées par terre. Elles contenaient des fusils d’assaut, des lance-grenades et des munitions, que des milliers de Tripolitains sont venus piller après la chute de la capitale fin août.
« Il y avait des centaines et des centaines de boîtes, avec de tout : des kalachnikovs, des carabines, des grenades, toutes sortes de munitions », raconte Imed, 25 ans, qui a pris un fusil d’assaut. « Des milliers de personnes sont venues ici. Certains, comme moi, ont pris seulement un pistolet, mais d’autres en ont pris deux, trois ou cinq. Et certains ont chargé des camions pendant plusieurs jours », ajoute-t-il. Tout était en libre-service, sans le moindre contrôle.
Et ce site n’était que l’une des multiples caches d’armes disséminées par le régime de Mouammar Kadhafi à travers la capitale et le pays.
Les armes sont maintenant disponibles au marché noir. Une kalachnikov coûte environ 650 dollars, une grenade 80 et les balles s’échangent à moins de 1 dollar, selon des habitants.
« Maintenant tout le monde à Tripoli a au moins un fusil », assure Imed. Et « les gens ne vont pas les rendre, ça c’est sûr. Nous sommes libres maintenant ».
Nombre de ces armes sont désormais entre les mains des combattants du nouveau régime, qui cherchent à déloger les derniers fidèles du colonel Kadhafi dans leurs bastions de Syrte ou Bani Walid.
Mais les rues de Tripoli sont aussi inondées d’armes. Les postes de contrôle sont souvent tenus par de jeunes hommes, certains même à peine adolescents, kalachnikov ou voire lance-roquettes à l’épaule. Et la nuit, la capitale résonne des tirs d’armes automatiques.
Cette prolifération inquiète les gouvernements occidentaux, en particulier les États-Unis, qui ont annoncé collaborer étroitement avec le Conseil national de transition (CNT) libyen pour protéger les stocks d’armes ou même en détruire certains. Washington redoute tout particulièrement de voir certains des milliers de missiles sol-air portables de l’ancien régime tomber dans les mains de terroristes, dans la mesure où ces armes sont susceptibles d’être utilisées contre des avions de ligne.
La trace d’au moins 10 000 missiles sol-air a été perdue en Libye, a estimé un haut responsable militaire de l’OTAN, cité hier par le site Internet de l’hebdomadaire allemand Der Spiegel. Le chiffre évoqué par l’amiral Di Paola est cependant le double de celui donné samedi à Benghazi par un responsable militaire du nouveau régime libyen. Le général Mohammad Adia, chargé de l’armement au sein du ministère de la Défense du Conseil national de transition (CNT), a estimé à « environ 5 000 » le nombre de SAM-7 « toujours manquants et dans la nature ».
« Malheureusement, il est possible que certains de ces missiles soient tombés entre de mauvaises mains (...) à l’étranger », a-t-il reconnu.
« Tout le monde est inquiet. Il semble que les stocks d’armes libyens soient supérieurs à ceux qui se trouvaient en Irak en 2003 (lors de l’invasion menée par les États-Unis) », explique Shashank Joshi, expert au Royal United Services Institute de Londres.
L’OTAN a cependant assuré que le CNT contrôlait désormais les sites regroupant les stocks d’armes chimiques de l’ancien régime, en particulier une dizaine de tonnes de gaz moutarde.
Selon les experts, la présence de ces armes va aussi empêcher le CNT d’assoir son autorité, même lorsque les derniers bastions pro-Kadhafi auront été pris. Le CNT « aura du mal à récupérer toutes les armes. Cela va prendre du temps pour installer une autorité centrale libyenne qui puisse revendiquer le monopole de l’usage légitime de la force », estime Karim Bitar, expert à l’Institut des relations internationales et stratégiques à Paris.

(Source : AFP)
Des adolescents brandissant des kalachnikovs dans les rues de Tripoli aux combattants armés de lance-roquettes sur le front, les armes sont partout en Libye et mettent en péril l’assise des nouvelles autorités.Cette prolifération inquiète aussi hors de Libye, où beaucoup redoutent que ces armes ne tombent dans les mains de groupes terroristes comme el-Qaëda ou n’alimentent...